L’affaire
La Cour de cassation française a récemment annulé le licenciement pour faute grave d’un salarié, notamment en raison de propos échangés lors d’une conversation privée avec trois personnes au moyen de la messagerie professionnelle installée sur son ordinateur professionnel et à laquelle l’employeur a eu accès.
L’employeur était d’avis que ce genre de messages devait entrainer et justifier un licenciement conformément à son obligation générale de prévention de tout acte de harcèlement sexuel et d’autres agissements de nature sexiste.
Dans cette affaire, la Cour de cassation a décidé que le salarié avait agi dans un cadre strictement privé sans rapport avec l’activité professionnelle et que la conversation litigieuse était de nature privée et n’était pas destinée à être rendue publique. Elle ne pouvait dès lors constituer un manquement du salarié aux obligations découlant du contrat de travail.
Le rappel des grands principes
Cette décision rappelle que si l’employeur peut ouvrir des fichiers présumés professionnels, il ne peut pas sanctionner un salarié pour des contenus relevant de sa vie privée, même s’ils ont été envoyés depuis un outil professionnel, sauf s’il y a usage abusif de l’outil informatique.
L’arrêt de la Cour de cassation permet de rappeler un principe essentiel: la protection de la vie privée des salariés, même dans le cadre professionnel, notamment en ce qui concerne leurs communications personnelles. Les salariés bénéficient d’un droit au respect de leur vie privée, incluant le secret des correspondances, même sur le lieu de travail.
Ainsi, un employeur ne peut pas sanctionner un salarié en se fondant sur le contenu de messages à caractère personnel, émis ou reçus via un outil informatique mis à disposition pour le travail, sans violer ce droit fondamental.
Au final, cette décision renforce le principe selon lequel la liberté d’expression est protégée dans l’entreprise, et qu’un salarié ne peut être licencié pour des propos qui, bien qu’inappropriés ou critiquables, ne constituent pas un abus manifeste de cette liberté.
Que disent les tribunaux luxembourgeois dans un tel cas de figure?
Cette décision rejoint en partie la jurisprudence luxembourgeoise suivant laquelle la correspondance d’un salarié échangée à partir de l’équipement professionnel et qui n’est pas identifiée comme privée est présumée être de nature professionnelle. De ce fait, l’employeur y a librement accès et pourra le cas échéant s’en prévaloir à des fins disciplinaires.
A voir si les tribunaux luxembourgeois iront aussi loin que leurs collègues français en limitant l’étendue du pouvoir disciplinaire de l’employeur en fonction du caractère privé et du contexte des échanges ?
Quid en cas d’agissements dégradants ou sexistes?
Contrairement au droit du travail français, le Code du travail luxembourgeois, bien qu’il garantisse l’égalité de traitement entre femmes et hommes et condamne le harcèlement sexuel, ne prévoit pas expressément de sanctions en cas d’agissements purement sexistes. Rien n’interdit cependant à un employeur luxembourgeois de prendre des mesures disciplinaires adéquates face à un tel comportement d’un salarié.
Un tel comportement devrait cependant être en rapport avec l’activité professionnelle du salarié et constituer un manquement à ses obligations découlant du contrat de travail.
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