Sous la direction de Gérard Hoffman, Proximus Luxembourg ambitionne de garder une place  parmi les sociétés innovantes de la Place. (Photo: Nader Ghavami)

Sous la direction de Gérard Hoffman, Proximus Luxembourg ambitionne de garder une place  parmi les sociétés innovantes de la Place. (Photo: Nader Ghavami)

L’inauguration ce jeudi soir du nouveau siège de Proximus Luxembourg marque une étape importante depuis le rapprochement des équipes de Telindus et Tango. 670 personnes que leur CEO, Gérard Hoffmann, est «fier de montrer».

C’est au zoning du Bourmicht à Bertrange, dans un bâtiment neuf détenu par Fidelity International, que Proximus Luxembourg a choisi d’établir son nouveau QG. L’entreprise détenue par le groupe de télécommunication belge inaugure ce soir ses nouveaux locaux, en présence de la CEO du groupe, Dominique Leroy, et du Premier ministre, .

Le patron au Luxembourg, Gérard Hoffmann, partage ses impressions et ses priorités, tant pour l’entreprise que pour un «Digital Lëtzebuerg» qu’il connaît bien.

Qu’éprouve-t-on après avoir pris possession de ce nouveau bâtiment qui réunit toutes les équipes de Proximus Luxembourg sous un même toit?

. - «Un sentiment de soulagement. Nous étions à l’étroit dans nos anciens locaux respectifs et nous recherchions un site qui corresponde à la hauteur de nos ambitions. J’éprouve aussi un sentiment de fierté. Ce déménagement est aussi l’occasion de montrer que nous avons pignon sur rue et que nous voulons rester un acteur majeur de notre secteur.

Le nouveau siège matérialise aussi la fusion des équipes de Telindus et Tango sous l’ombrelle du groupe propriétaire, Proximus…

«C’est l’accomplissement d’une vision poursuivie depuis 15 ans, avec en parallèle différents sites qui ont été étudiés pour réaliser ce déménagement. Nous avons été depuis toujours sur différents sites, ce qui est inhérent au développement d’une société dans un pays tel que le Luxembourg, où les opportunités immobilières d’une taille telle que celle de notre nouveau siège sont rares et difficiles.

Comme toutes les entreprises, nous souffrons d’un trop grand usage de l’e-mail et des communications électroniques.
Gérard Hoffmann

Gérard HoffmannCEOProximus Luxembourg

L’immobilier est un enjeu pour de nombreuses entreprises qui cherchent à trouver de l’espace...

«Nos usines sont nos data centers, mais ces derniers sont difficilement ‘exposables’. En revanche, nos collaborateurs, 670 actuellement pour Telindus et Tango, sont nos ambassadeurs. Nous devons être fiers de les montrer.

Quelles sont les particularités du bâtiment quant à l’organisation du travail?

«Nous avons misé sur la transparence, avec des parois aussi transparentes que possible et un rapprochement des collaborateurs. Pour se voir, pour bien communiquer. Comme toutes les entreprises, nous souffrons d’un trop grand usage de l’e-mail et des communications électroniques. Nous ne devons pas oublier l’importance du contact humain, même dans des métiers techniques et technologiques tels que les nôtres.

Étant donné que tous nos collaborateurs ne sont jamais présents au même moment dans nos murs en raison des missions chez ou pour nos clients, nous avons aussi introduit le ‘flex desk’ pour optimiser le partage des postes de travail. Ceci nous permet aussi d’absorber notre croissance. J’ajoute que nous avons choisi le site de Bertrange, car il présente des espaces de travail à proximité que nous pourrions louer à l’avenir en cas de besoin.

En outre, étant donné que les entreprises demandent davantage de flexibilité à leurs collaborateurs, je considère que la contrepartie est de répondre à leurs attentes en matière de besoins élémentaires, comme la restauration, sur laquelle nous avons fait un effort.

Nos marques synonymes de technologie représentent un attrait pour les candidats.
Gérard Hoffmann

Gérard HoffmannCEOProximus Luxembourg

Quid de la mobilité?

«Nous encourageons le covoiturage. C’est plus difficile au niveau des transports en commun, car les P+R sont souvent pleins. Mais nos métiers nécessitent beaucoup de déplacements, donc la voiture reste notre moyen de locomotion premier.

Le télétravail est-il un sujet pour vous?

«Nous avons effectué un ‘benchmark’ en vue de disposer d’une solution ad hoc. Mais le point d’achoppement reste la fiscalité des pays limitrophes, qui met des barrières à cette pratique. Or, 80% de nos collaborateurs sont frontaliers.

Compter 80% de frontaliers parmi vos collaborateurs, est-ce inhérent au marché luxembourgeois ou y voyez-vous un reflet du manque d’attrait des jeunes résidents vis-à-vis des matières techniques?

«Nous ne sommes évidemment pas les seuls dans ce cas. Les résidents choisissent moins les branches techniques. C’est probablement lié en partie au système éducatif, qui ne favorise pas forcément les sciences. Mais nous réussissons tout de même à trouver les profils dont nous avons besoin. Nous avons par exemple embauché 45 personnes cette année. Nos marques synonymes de technologie représentent un attrait pour les candidats.

Quels sont les profils que vous recherchez particulièrement?

«Outre les profils liés à la cybersécurité, depuis quelque temps, nous avons un grand besoin d’intégrateurs hardware et software en raison de nos activités. Les profils plus récemment recherchés sont ceux de data scientist et autres experts en intelligence artificielle et exploitation de données.

La taille du marché ne vous donne pas le droit à l’erreur.
Gérard Hoffmann

Gérard HoffmannCEOProximus Luxembourg

Vous avez été les premiers à tester les connexions 5G au Luxembourg, en conditions réelles, dans votre laboratoire. Pourquoi est-ce important d’être le premier dans ce créneau?

«Nous aimerions, par ces tests, envoyer un signal d’encouragement au gouvernement, à savoir qu’il procède rapidement à l’adaptation des fréquences et surtout à l’attribution des autorisations d’exploitation. On ne peut plus attendre.

La deuxième raison tient aussi à notre volonté d’être la société de services la plus innovante et ainsi de contribuer à l’apport de nouvelles technologies dans le secteur et sur le marché. Tango a été le premier opérateur à lancer la 4G, Telindus fait de même dans ses activités.

Il est crucial que l’Europe puisse se trouver sur la carte mondiale de l’ICT.
Gérard Hoffmann

Gérard HoffmannCEOProximus Luxembourg

Quels sont les freins à votre ambition en matière d’innovation?

«La taille du marché ne vous donne pas le droit à l’erreur. Si vous effectuez un choix technologique, il faut avoir fait le bon choix d’emblée. Comment éviter de se tromper? Avec des compétences excellentes. On revient toujours à l’importance des talents.

Nous réfléchissons aussi sur la manière dont les instances publiques peuvent nous aider à supporter l’innovation, qui est vitale pour un pays comme le Luxembourg, dont l’économie repose en large partie sur les services. Je vois deux pistes: la recherche et l’investissement.

La recherche privée n’augmente guère en pourcentage du PIB, alors que le pays caresse de grandes ambitions en matière technologique. Le gouvernement pourrait encourager les projets de recherche privée-publique autour de cahiers des charges sur des projets pilotes, par exemple.

Quant à l’investissement, le crédit d’impôt pour investissement dont les acteurs industriels peuvent bénéficier pour l’achat de matériel devrait être transposé dans notre secteur lorsque nous investissons par exemple dans un data center, des réseaux téléphoniques ou dans l’intelligence artificielle. Ceci permettrait d’atténuer l’effet de la taille du marché sur le choix technologique que j’évoquais précédemment en limitant la portée de l’investissement au début.

Nous aurions besoin de compléter le dispositif sur l’innovation et l’investissement.
Gérard Hoffmann

Gérard HoffmannCEOProximus Luxembourg

Quels sont les facteurs qui pèsent sur vos marges?

«Depuis la fin des frais d’itinérance sur les communications – qui était une bonne chose en soi – nous observons une course vers le bas au niveau des prix de vente qui n’est plus compensée par les volumes de communications. La mesure est positive du point de vue du consommateur, mais cela entraîne des répercussions sur la capacité des groupes technologiques à investir. Or il est crucial que l’Europe puisse se trouver sur la carte mondiale de l’ICT.

Nous n’avons pas un seul Gafa ou Alibaba en Europe. Nous achetons des services, de cloud par exemple, qui proviennent de l’international. Nos data centers souffrent de cette concurrence, nous devons trouver les moyens de recréer des services ICT en Europe, avec l’aide des gouvernements.

D’après ses informations, le dossier de Google «avance bien.» Gérard Hoffmann note qu’on  «oublie parfois ce que d’autres industries faisaient avant en termes de pollution.» (Photo: Nader Ghavami)

D’après ses informations, le dossier de Google «avance bien.» Gérard Hoffmann note qu’on «oublie parfois ce que d’autres industries faisaient avant en termes de pollution.» (Photo: Nader Ghavami)

Le Luxembourg va héberger , en plus de la structure gérant ce projet. Un bon point pour le pays?

«C’est un bel exemple de la conduite d’une stratégie industrielle de gouvernements successifs qui choisissent une orientation vers l’ICT depuis plusieurs années et qui se solde par des résultats spectaculaires. Je suis heureux pour ceux qui ont porté ce projet et pour les acteurs qui vont pouvoir bénéficier des répercussions de l’installation d’une telle infrastructure.

Comment une entreprise telle que la vôtre peut-elle en bénéficier?

«Nous pourrions offrir des services pour opérer le data center, vendre cette infrastructure à nos clients… D’autres projets lancés par le gouvernement ou avec sa collaboration représentent aussi des opportunités,  ou . La politique du gouvernement en matière d’ICT nous convient globalement par rapport à ce que nous pouvons voir ailleurs, mais comme je l’ai signalé, nous aurions besoin de compléter le dispositif sur l’innovation et l’investissement.

Ceux qui communiquent négativement autour d’un tel projet prennent une énorme responsabilité.
Gérard Hoffmann

Gérard HoffmannCEOProximus Luxembourg

Comprenez-vous les oppositions citoyennes émises autour du projet de data center de Google? Il s’agit d’évaluer notamment la consommation en énergie et en eau pour refroidir les infrastructures…

«L’opposition résulte d’une certaine crainte de citoyens faute d’informations précises sur ce projet. En connaissant le monde des data centers et aussi Google, qui est un partenaire de Proximus, je suis confiant que Google pourra apporter les réponses nécessaires à ces préoccupations environnementales, notamment aussi sur l’utilisation d’eau de refroidissement.

A-t-on trop parlé de ce projet en public?

«Les acteurs politiques ont communiqué trop tôt autour de ce projet alors qu’il n’était pas encore mûr. Mettez-vous à la place de Google, qui aurait dû prendre une décision alors même qu’il n’était pas certain que le terrain soit constructible. 

D’après mes informations, le dossier avance bien, il n’y a pas de raison de s’inquiéter. On oublie parfois ce que d’autres industries faisaient avant en termes de pollution.

On oublie que le pays a besoin d’entreprises pour que le budget de l’État soit bouclé?

«Ce type de projet va non seulement contribuer un peu à l’emploi, mais va aussi générer de la valeur sur le PIB. S’il se concrétise, ce sera le plus grand investissement industriel depuis SES. Il est crucial, dans ce genre de dossier, de maintenir une image positive du Luxembourg pour que Google prenne sa décision. Ceux qui communiquent négativement autour d’un tel projet prennent une énorme responsabilité.»