À la suite d’un concours européen d’architecture mis en place par la Ville de Luxembourg, le groupement formé par 2001, bureau mandataire en association avec le bureau CIVIC et Mersch Ingénieurs-Paysagistes est sorti conçu pour la transformation et la reconversion du site des anciens abattoirs dans le quartier de Hollerich.
Le site, dit Schluechthaus, représente une surface de 2,5 hectares située à proximité immédiate du campus scolaire Geesseknäppchen et est au croisement des quartiers Gare, Merl et Belair. Il s’inscrit aussi en continuité du projet de développement urbain Porte de Hollerich qui deviendra à terme un écoquartier.
L’activité du site comme abattoir s’est arrêtée en 1997. Depuis, les bâtiments ont servi à différents usages: garages, bureaux pour l’administration communale, entrepôts et lieux de stockage, skate-park et murs autorisés pour les graffitis.
Aujourd’hui, le site est en occupation transitoire, avec le maintien du skate-park et des arts urbains, auxquels s’ajoutent régulièrement des activités et animations ponctuelles en vue de la nouvelle réaffectation du site.
Plusieurs bâtiments sont classés au patrimoine national et sont donc à conserver. De plus, la Ville de Luxembourg avait rédigé un cahier des charges pour la réaffectation du site, qui doit conserver l’art urbain comme fil rouge identitaire, accueillir des activités culturelles, sportives et commerciales, favoriser les rencontres et la convivialité, avoir des espaces verts et devenir un nouveau pôle pour le quartier tout en maintenant les ouvertures vers les quartiers voisins.
Un double défi
Le groupement doit faire face à un double défi: la fois conserver un maximum du bâti existant puisque patrimonial tout en intégrant une programmation multiple, mais aussi éviter l’effet ilot de chaleur créé par cette surface scellée. Il est par ailleurs de leur responsabilité de concevoir un projet qui puisse répondre aux défis actuels et futurs de la ville, notamment ceux liés au dérèglement climatique.
C’est pour ces raisons que le groupement a opté pour une architecture proactive. Plutôt que de concevoir une architecture ou un morceau de quartier, ils imaginent un équipement métropolitain. Au lieu de raser, ignorer ou simplement rénover l’existant, une approche englobante de réécriture du site est entamée.
Pour cela, ils décident de construire une très vaste toiture vitrée protectrice qui couvre l’ensemble du patrimoine bâti. Telle une nouvelle canopée, cette hyperstructure unifie le site tout en permettant l’activation de la diversité en dessous. Elle intervient aussi comme un écran prenant en compte le programme et les nouvelles conditions climatiques avec la création d’un microclimat.

En ajoutant cette super-structure, les architectes portent ce projet à l’échelle métropolitaine. (Illustration: 2001 & Civic)
Un programme divers
La stratégie du groupement est de révéler le patrimoine existant en le désencombrant des éléments non classés. Des modifications ponctuelles (création d’accès extérieur dans le respect des baies, enlever des cloisons pour permettre plus de flexibilité, enlever des allèges pour apporter de la lumière naturelle…) seront réalisées pour permettre l’accueil du nouveau programme (espaces de création, de répétition, de présentation, parc des sports urbains, lieux de rencontres multiusages, activités commerciales avec concept store, marchés, restauration…).
Les espaces libres entre les bâtiments, couverts, éclairés et sécurisés par la toiture, peuvent être activés pour accueillir des activités variées. Ils offrent une autre qualité d’espace qu’à l’intérieur même des bâtiments et qu’en dehors de la zone couverte par la toiture. Ainsi, en activant tous les types d’espaces disponibles, aucune construction additionnelle n’est nécessaire pour répondre à l’ensemble du programme. Cela crée aussi un ensemble de surfaces adaptables aux futurs usages du site, rendant l’intervention durable et résiliente.
Cette diversité programmatique est aussi traduite dans s^^^h, le nom du projet lauréat. «Schluechthaus est un nom luxembourgeois difficile à prononcer qui ne correspond plus à la population cosmopolite de la ville», expliquent les concepteurs. «De plus, sa définition est rétrospective, limitée, voire négative. Aussi, nous avons imaginé un acronyme qui permet un euphémisme stratégique qui recouvre plusieurs utilisations: Skate Hall, Spray Haus, Stad Hal, Solar Hall, Super Hangar…» est-il précisé dans les documents de présentation du projet.
Activer une trame verte et bleue
En libérant le terrain grâce à la démolition d’une partie du bâti existant, ces surfaces peuvent devenir de nouvelles zones vertes, ayant un impact positif sur l’effet îlot de chaleur. De plus, cela permettra de faire le lien entre le parc de Merl, la vallée de la Pétrusse et le futur réaménagement vert du campus scolaire voisin. Le parking au nord du site, la rue de l’Abattoir et le futur parvis sud seront par conséquent transformés pour devenir des zones vertes
Pour la trame bleue, une noue de rétention est envisagée du nord au sud pour récolter les eaux pluviales et créer un climat plus confortable sur le site.

De nouvelles zones vertes pourront être créées autour du site. (Illustration: 2001 & Civic)
Une superstructure climatique
Cette structure, qui s’élève au-dessus du site et le recouvre dans son ensemble, a plusieurs fonctions. Elle agit comme une toiture protectrice qui couvre le patrimoine. Elle externalise ainsi l’isolation nécessaire des bâtiments anciens, évitant une intervention invasive sur le patrimoine. Elle permet aussi d’utiliser les espaces extérieurs avec un moindre souci des conditions météorologiques. Sous la canopée, on est à l’abri du soleil, de la pluie, de la neige…
La hauteur de l’enveloppe permet de créer un effet de tirage vers le haut, ramenant dans l’enceinte un courant d’air rafraichi par la présence de végétation et de plans d’eau.
Par le vitrage teinté, de l’ombre peut être créée.
La toiture permet également de récupérer les eaux de pluie qui seront stockées dans un bassin latéral. Elle devient aussi une zone de production d’énergie par l’intégration de panneaux photovoltaïques.
Le jury a choisi ce projet à l’unanimité, estimant qu’il s’agit d’«un projet pour la ville de demain, notamment dans les domaines des écologies, des énergies ou encore dans la culture, et se veut un véritable landmark dédié à la culture urbaine sur le territoire de la capitale.»
Toutefois, ce projet à ce stade demande encore la réalisation de nombreuses études supplémentaires «afin de répondre entièrement aux demandes de la Ville de Luxembourg, en particulier pour ce qui est des aspects techniques.»
Fiche technique Maitre d’ouvrage: Ville de Luxembourg
Architectes: 2001, CIVIC
Paysagiste: Mersch Ingénieurs-Paysagiste
Ingénieur-Conseil statique: Greisch
Ingénieur-Conseil technique: Greisch
Acoustique: Simon Christiansen
Concept: Bamhaus