Marc Hengen: «Pour les plus jeunes, il y a lieu de faire preuve de prévoyance.» (Photo: Maison Moderne)

Marc Hengen: «Pour les plus jeunes, il y a lieu de faire preuve de prévoyance.» (Photo: Maison Moderne)

À long terme, le système de pension étatique, sous pression, peinera de plus en plus à maintenir le niveau des allocations de retraite accordées aux contribuables. Selon l’Aca, pour y parvenir, il est essentiel de renforcer les deux autres piliers de l’assurance retraite.

Au Luxembourg, comme dans de nombreux pays européens, c’est surtout l’État qui veille à nous assurer des conditions de revenus correctes une fois que l’âge de la pension a sonné. Pour ce faire, il collecte des cotisations sociales tout au long de la vie active de chacun des travailleurs salariés au Luxembourg, qu’ils soient résidents ou frontaliers, dans l’optique de financer ce que l’on appelle communément le premier pilier de l’assurance pension.

«Le niveau des montants accordés à la pension par l’État reste très important au Luxembourg. Cependant, il faut faire le constat que la pérennisation du système actuel est intrinsèquement liée à la croissance de l’emploi et de l’économie au Luxembourg. Si celle-ci reste dynamique, par rapport à ce qui peut être constaté dans d’autres pays européens, on ne peut non plus ignorer les limites à cette croissance, de plus en plus perceptibles», commente Marc Hengen, administrateur-délégué de l’Association des Compagnies d’Assurances et de réassurances du Grand-Duché de Luxembourg (Aca). La situation, en outre, n’est pas neuve. «La réforme du système des retraites, intervenue en 2012, actant une diminution de l’ordre de 15% des prestations étatiques, constituait déjà un aveu des difficultés rencontrées à maintenir durablement le système», poursuit le dirigeant.

Les pensions publiques sous pression

Le système public des retraites n’est actuellement pas directement menacé. Le fonds de compensation commun au régime général de pension, dont le but est de garantir la pérennité du régime général de pension, dispose et gère des réserves confortables, correspondant à plus de quatre fois le montant des prestations annuelles (autour de 24.000 millions d’euros en 2022).

«Cependant, à l’occasion d’un de ses avis, l’Inspection générale de la sécurité sociale (IGSS) a souligné la très grande probabilité que, d’ici cinq à six ans, les dépenses liées aux prestations de pension deviennent plus importantes que les recettes générées par les cotisations», poursuit Marc Hengen. Autrement dit, sans réforme du système des retraites (ce que n’envisagent pas les partis susceptibles de gouverner ensemble), il est probable qu’il faille commencer à puiser dans la réserve.  «Actuellement, il n’y a donc pas péril imminent en la demeure. Toutefois, à plus long terme, la situation peut s’avérer plus délicate. Pour les plus jeunes, il y a lieu de faire preuve de prévoyance», poursuit l’administrateur-délégué de l’Aca.

Les employeurs mobilisés

 À la suite de la réforme de 2012, le secteur de l’assurance a réagi à la décision de l’État de réduire les prestations de pension en proposant d’agir de manière complémentaire au premier pilier. «La volonté n’est aucunement de se substituer à l’État ou de privatiser le système de pension, mais de le compléter afin de permettre à chacun, grâce à des solutions de prévoyance, de s’assurer de continuer à disposer d’un revenu confortable une fois arrivé à l’âge de la retraite», commente Marc Hengen. 

En l’occurrence, plusieurs solutions complémentaires ont été introduites au Luxembourg. D’une part, les entreprises ont la possibilité de cotiser dans un plan de pension privée au profit de leurs salariés. «L’employeur peut alors cotiser jusqu’à maximum l’équivalent de 20% du salaire de l’employé dans ce plan d’épargne. C’est l’employeur qui paie les primes et les impôts associés. À l’âge de la retraite, le salarié perçoit le montant épargné exonéré d’impôts, explique Marc Hengen.

Pour les entreprises, ce régime constitue un outil de fidélisation des collaborateurs.» De manière générale, les entreprises qui mettent ce régime en place acceptent de payer des primes avoisinant 5 à 6% du salaire de l’employé. Si ce dernier le désire, il peut compléter le montant de la cotisation. Si le dirigeant de l’entreprise n’a pas mis en place ce régime, le salarié ne peut pas en profiter.

La prévoyance individuelle

À titre individuel, deux autres solutions de prévoyance sont proposées au Luxembourg. D’une part, l’assurance prévoyance décès ou mixte prévoit la constitution d’une épargne sous la forme d’une prime annuelle déductible fiscalement de 672 euros par membre du ménage. Le capital libéré à l’échéance du contrat est exonéré d’impôt sur le revenu. D’autre part, à travers l’assurance prévoyance-vieillesse, aussi appelée troisième pilier, vous pouvez déduire fiscalement jusqu’à 3.200 euros par an de primes par contribuable. «Il s’agit d’un produit d’épargne. Le capital cumulé est alors libéré une fois à l’âge de la retraite au plus tôt à 60 ans», explique Marc Hengen.

Ces produits connaissent un succès croissant. L’Aca fait état de 115.000 contrats d’assurance prévoyance-vieillesse au Luxembourg, soit plus d’un cinquième de la population active. Ce qui représente une épargne gérée avoisinant 1,5 milliard d’euros.

Relever les limites

«L’enjeu, face aux défis qui attendent le système de pension étatique, est d’encourager la population à faire preuve de prévoyance, en renforçant notamment les incitants fiscaux en la matière, poursuit l’administrateur délégué de l’Aca. Si la volonté est de soutenir les démarches visant à compléter le premier pilier à travers des produits d’investissements à long terme, qu’ils soient à taux garantis ou en unité de compte, il y a lieu de relever les limites en place.»