Le sans-abrisme est une réalité à Luxembourg-ville où plus d’un tiers des SDF sondés disent être à la rue depuis plus de cinq ans. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne)

Le sans-abrisme est une réalité à Luxembourg-ville où plus d’un tiers des SDF sondés disent être à la rue depuis plus de cinq ans. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne)

Un premier recensement de la population des sans-abris a été réalisé en octobre dernier. Des raisons qui mènent les sans domiciles fixes à la rue à la durée de leur itinérance, les autorités veulent en savoir davantage pour adapter les structures d’aide.

Mieux connaître les sans-abris, mais aussi vérifier si les structures de prise en charge sont adaptées à la situation: la ministre de la Famille et de l’Intégration a expliqué, mardi 21 février, les raisons qui ont poussé à réaliser le premier recensement de la population sans-abri dans les rues de la capitale. «Nous voulons travailler sur base de preuves, pour ensuite aider les gens à sortir de la rue», souligne (DP).

66 travailleurs sociaux ont arpenté les 24 quartiers de la capitale pour aller à la rencontre des SDF entre 17h et minuit, le 26 octobre 2022. Ils en ont comptabilisé 197 parmi lesquels 130 ont accepté de répondre à un questionnaire.

Lorsque le séjour dans la rue se pérennise, il est beaucoup plus compliqué de les en sortir.
Virginie Giarmana

Virginie Giarmanadirectrice adjointeInter-Actions

86% des sans-abris sont des hommes, un ratio similaire à celui observé à Paris ou Bruxelles a indiqué Virginie Giarmana, directrice adjointe d’, ASBL impliquée dans le recensement. Un quart vivent depuis toujours au Luxembourg et 35% depuis plus de 5 ans. 24% sont Luxembourgeois et 59% viennent d’autres pays de l’UE. Leur âge moyen est de 42 ans et 58% sont à la rue depuis plus d’un an. Pour plus d’un tiers, cela fait plus de 5 ans qu’ils n’ont plus de domicile fixe.

«Lorsque le séjour dans la rue se pérennise, il est beaucoup plus compliqué de les sortir de la rue que les personnes qui y sont depuis moins longtemps», a souligné Mme Giarmana. Sans surprise, les quartiers de la Ville Haute (25%), Gare (21%) et Bonnevoie (7%) concentrent la majorité des SDF.

Ceux-ci disent dormir principalement dans la rue (48%), dans un centre d’hébergement (35%) ou chez un tiers (7%). Il existe 220 places dans les structures d’aides. «Seulement 18% des personnes à la rue ne sont pas accompagnées, il y a donc une grande accessibilité de l’aide», indique Mme Giarmana.

Quant aux raisons qui poussent ces personnes à la rue, 34% sont arrivées au Luxembourg sans logement, 26% ont des problèmes financiers et 19% connaissent une séparation familiale. Quant aux ressources financières, la mendicité est la première (35%) devant le travail déclaré ou non (17%) et le Revis (13%). 31% des répondants ont déclaré n’avoir aucune ressource financière.

Logement et travail, deux priorités clés

Pour ce qui est de leur avenir, les sans-abris priorisent la recherche d’un logement (72%) devant celle d’un travail (53%) et enfin ambitionnent de se soigner (18%). Question délicate, la santé n’a été abordée que par les trois quarts de l’échantillon de 130 répondants. Si 28% estiment ne pas souffrir d’une pathologie, près de 26% reconnaissent des problèmes de santé mentale ou de dépression.


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«Il est clair qu’on mériterait d’avoir plus de prise en charge de la santé mentale des personnes dans la rue», commente encore Mme Giarmana. Cette dernière admet toutefois qu’il y a autant de besoins variés que de personnes à la rue.

«Les structures existantes sont adaptées, mais ne sont pas assez nombreuses. Et puis, ce n’est pas une fin en soi», fait valoir Corinne Cahen. La ministre a reconnu que «le problème du logement est un problème récurrent et si vous êtes un maillon très faible, il est très difficile d’en trouver».

Le soir, nous observons une sortie de la Ville liée au fait que les transports en commun sont gratuits.
Virginie Giarmana

Virginie Giarmanadirectrice adjointeInter-Actions

Les travailleurs sociaux ont par ailleurs constaté que des personnes visibles dans la rue en journée ne l’étaient pas au moment du recensement. Certaines étaient peut-être dans un squat ou chez un proche, mais Virginie Giarmana explique aussi que «le soir, nous observons une sortie de la Ville liée au fait que les transports en commun sont gratuits».

D’ailleurs, l’étude menée en octobre à Luxembourg-ville pourrait s’exporter dans au moins une commune périphérique de la capitale. Inter-Actions a confié être sollicité par des municipalités voisines de Luxembourg-ville qui signalent des personnes vivant dans la rue. La deuxième étape de ce sondage est prévue en mai puis en décembre de cette année, au moment où la Wanteraktioun (WAK) sera ouverte.

Pour rappel, le Luxembourg a signé la déclaration de Lisbonne pour mettre fin aux sans-abrisme en Europe d’ici à 2030. «C’est une grande ambition vers laquelle nous devons aller», conclut Corinne Cahen.