Mis à l’étude en 2009 par le Comité économique et social européen, le 28e régime est officiellement de retour: dans le cadre de la présentation de la «boussole de compétitivité», la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et son vice-président, Stéphane Séjourné, ont assuré que «les entreprises innovantes pourront bénéficier d'un ensemble unique de règles partout où elles investissent et opèrent dans le marché unique», probablement à partir de 2026.
Si les deux dirigeants n’ont pas été plus précis, ils semblent s’approprier les idées du rapport Draghi et avoir enterré le statut de société européenne, qui n’a pas survécu aux discussions politiques. Selon ces propositions, un corpus de règles harmonisant les aspects clés du droit des sociétés, de l’insolvabilité, du droit du travail et de la fiscalité pourrait être exploré dans le cadre d’une coopération renforcée par les États membres volontaires, comme décrit dans le chapitre sur l’innovation. Il faudrait donc qu’au moins neuf États soient d’accord sur le texte, conformément aux articles 20 TUE et 329 TFUE.
Le texte de Draghi précise qui serait concerné: «Les jeunes entreprises innovantes seront qualifiées en fonction de critères tels que les qualifications de leur personnel, les dépenses de R&D et la propriété des droits de propriété intellectuelle. Par exemple, définir les entreprises innovantes sur la base des critères déjà avancés dans l’acquis de l’UE en matière de concurrence (y compris au moins 10% des coûts d’exploitation totaux consacrés à la R&D), rendrait le nouveau statut accessible à au moins 180.000 PME innovantes (y compris les jeunes entreprises) et ETI innovantes (y compris les petites ETI) dans l’UE, selon les estimations du Centre commun de recherche de la Commission européenne.»
L’affaire n’est pas si simple puisque si la Commission européenne a évoqué des modifications du droit du travail et du droit fiscal, ce sont des prérogatives des États membres.
Mais ce jeudi, le commissaire européen en charge de la Démocratie, de l’État de droit, de la Justice et de la Protection des consommateurs, Michael McGrath, a publié une première «brique» du nouveau dispositif: une proposition de directive qui concerne l’extension et l’amélioration de l’utilisation des outils et processus numériques dans le domaine du droit des sociétés, «qui doit permettre aux entreprises d’économiser plus de 400 millions d’euros par an».
Le texte prévoit un certain nombre de dispositifs réclamés par les entreprises, comme:
- un contrôle préventif administratif, judiciaire ou notarial (ou une combinaison de ces types de contrôles);
- une extension de principe «une fois pour toutes», selon lequel les sociétés ne devraient pas avoir à soumettre plusieurs fois les mêmes informations aux autorités publiques, dont a déjà parlé le Premier ministre, (CSV), au Luxembourg;
- l’amélioration et la transparence des informations disponibles dans les registres du commerce;
- un certificat d’entreprise européenne;
- une procuration numérique européenne pour autoriser une personne à représenter une société dans des procédures transfrontalières et appuyée sur l’identification par des services de confiance, comme LuxTrust au Luxembourg;
- ou encore des exemptions de traduction des documents fournis par un registre d’un autre État membre lorsque les informations nécessaires sont accessibles via le certificat d’entreprise de l’UE ou le système d’interconnexion des registres.
Le commissaire irlandais est celui que le cabinet de la présidente désigne comme responsable de la mise en œuvre de ce 28e régime. «Vous dirigerez les travaux visant à établir un statut juridique à l’échelle de l’UE afin d’aider les entreprises innovantes à se développer, sous la forme d’un 28e régime, permettant aux entreprises de bénéficier d’un ensemble de règles simplifiées et harmonisées», rappelle un porte-parole de la présidente qui cite la lettre de mission que Mme von der Leyen a donnée à M. McGrath.
«Vous veillerez», dit un autre passage de cette lettre, «à ce que les règles existantes soient adaptées à leur objectif et vous concentrerez sur la réduction des charges administratives ainsi que sur la simplification de la législation. Vous devrez contribuer à la diminution des obligations de reporting d’au moins 25%, et d’au moins 35% pour les PME.»
«La mise sur pied d’un 28e régime est une priorité de cette commission et le travail est en cours», dit encore la porte-parole.