Acquérir de la confiance
Les nombreux scandales qui ont défrayé la chronique ces dernières années (e.g. des fraudes retentissantes autour de certaines ICO, des cyberattaques d’applications utilisant la blockchain) ont provoqué une certaine méfiance tant du grand public que des entreprises ou des législateurs.
Sécurité juridique
Ainsi, pour que cette technologie regagne ses titres de noblesse, un encadrement juridique, réglementaire et de gouvernance semble être un des enjeux principaux. Si de nombreux pays ont commencé à se pencher sur la question, voire même à légiférer (même au Luxembourg avec la loi du 1er mars 2019 permettant l’inscription de titres financiers sur une blockchain), de nombreuses clarifications sont attendues dans nombre de domaines (e.g. comptabilité, fiscalité, valeur légale des smart contracts et de la preuve…).
S’agissant des smart contracts, le flou légal commence à être résolu avec plus de clarifications autour de la situation juridique des smart legal contracts. Le code peut clairement faire loi, mais seulement dans les conditions du droit des obligations.
Certifications et professionnalisation
Un écosystème s’est développé autour de la blockchain, avec différents acteurs tels que des développeurs d’infrastructures et d’applications, des fournisseurs de services («blockchain as a service»), des avocats et des consultants juridiques, financiers…
Un encadrement également par le biais de licences, certifications/agréments de ces nouveaux acteurs sera un autre enjeu majeur comme gage de fiabilité et de sérieux dans ce domaine.
Des mesures de standardisation et de normalisation
La confiance se gagnera également grâce à la standardisation et la normalisation de cette technologie. Au Luxembourg, le comité d’étude national ISO/TC307 assure le suivi des travaux de normalisation internationaux pour le domaine de la blockchain. Un rapport technique a d’ailleurs été récemment publié traitant des smart contracts1.
Au-delà de la confiance que créent de telles mesures, le développement de bonnes pratiques, d’un cadre et d’un langage commun à tous les acteurs pourra assurer l’interopérabilité des différentes infrastructures blockchain.
Cela demeure un enjeu technique de taille pour l’adoption massive de cette technologie. Un besoin de normes existe également autour des cryptoactifs. Ainsi, la course à la standardisation des tokens (e.g. T-REX de Tokeny, ERC20 et ERC1400…) devrait continuer en 2020.
L’adoption par des acteurs reconnus et robustes
Si la technologie blockchain est née d’une méfiance du pouvoir centralisé, les institutions gouvernementales et étatiques restent tout de même des acteurs incontournables avec le poids pour influencer positivement l’adoption de cette technologie. Ainsi, on observe de nombreux projets (inter)gouvernementaux dont les résultats sont vivement attendus:
- l’EBSI (European Blockchain Services Infrastructure2) est une initiative de la Commission européenne pour développer des services publics paneuropéens utilisant la technologie blockchain (e.g. notarisation d’actifs, la gestion de l’identité digitale, la reconnaissance des diplômes);
-la première blockchain publique à Luxembourg – pour réaliser des applications au profit des citoyens et entreprises au Luxembourg et contribuer à améliorer la transparence, la fiabilité et la sécurité des systèmes d’information et processus numériques du secteur public.
Des groupes internationaux importants, capables d’imposer de nouveaux processus de travail, se sont également engagés dans des projets blockchain3 pour sécuriser les chaînes logistiques.
Des applications métiers utiles et pragmatiques
Après la phase d’éducation et de sensibilisation, et le lancement de projets pilotes pour se familiariser avec cette technologie, l’année à venir sera davantage marquée par la consolidation de projets «métier ou business» moins nombreux mais plus ambitieux, qui utiliseront la technologie blockchain comme back-end.
Par exemple, les experts considèrent la blockchain comme un complément naturel à l’ERP en servant de couche sécurisée pour le partage de données à travers une chaîne hétérogène.
De plus, avec ce niveau d’intégrité plus élevé, l’ERP et la blockchain peuvent travailler ensemble pour automatiser nombre de tâches chronophages (e.g. facturation, lancement des paiements dans un cadre interentreprises).
Le cabinet de conseil Tractica prévoit d’ailleurs une augmentation de l’adoption de la blockchain qui ferait passer le marché à plus de 20 milliards de dollars d’ici 20254.
Progrès techniques
Si les questions de vitesse et de scalabilité restent des enjeux de taille, mais en passe d’être résolus grâce à des bockchains hybrides, la question de l’interopérabilité entre les différentes blockchains et les systèmes existants demeure un enjeu technique majeur.
Interopérabilité entre blockchains, entre systèmes existants (ERP)
Les blockchains vont arrêter de fonctionner en silo et vont commencer à communiquer avec les autres réseaux et technologies (e.g. IoT, ERP…) grâce au développement d’un cadre garantissant leur interopérabilité.
Passer à des modes de validation moins énergivores
Bien qu’il existe une variété de mécanismes de consensus, le mécanisme PoW reste encore le plus utilisé (i.e. bitcoin, ethereum). PoW nécessite de résoudre des problèmes complexes, mettant en jeu de grandes quantités d’énergie. Ce point deviendra de plus en plus critique dans les années à venir et le passage à d’autres mécanismes de consensus moins énergivores devra être accéléré.
Ainsi, la technologie blockchain doit se préparer à surmonter la phase de désillusion que subit toute nouvelle technologie. Il s’agira dès lors de consolider les efforts dans l’adoption de cette technologie à des usages utiles où la blockchain apporte ses vertus intrinsèques de partage, de transparence, de sécurité et d’automatisation. Cela pourra se faire qu’en assurant un cadre réglementaire adapté instaurant la confiance et en surmontant des enjeux techniques qui demeurent aujourd’hui majeurs.
1 ISO/TR 23455: 2019 Blockchain and distributed ledger technologies – Overview of and interactions between smart contracts in blockchain and distributed ledger technology systems.
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3 Les problématiques de transparence de la chaîne d’approvisionnement et de traçabilité des matières premières et des produits finis mobilisent des ressources importantes. La technologie permet de simplifier et d’automatiser les échanges d’informations et de générer une confiance accrue entre les différents partenaires: suivi de la température de stockage d’un produit frais tout au long de son transport en ayant recours à des capteurs dont les relevés seraient consultables par l’ensemble des acteurs concernés, mise en place de procédures de vérification du respect des réglementations par les fournisseurs.
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