Pour son CEO Thomas Friederich et EarthLab Luxembourg, cette restructuration doit favoriser une croissance plus spectaculaire. Reste à savoir combien Telespazio compte mettre dans cette nouvelle phase de l’aventure. (Photo: Jan Hanrion/Maison Moderne/archives)

Pour son CEO Thomas Friederich et EarthLab Luxembourg, cette restructuration doit favoriser une croissance plus spectaculaire. Reste à savoir combien Telespazio compte mettre dans cette nouvelle phase de l’aventure. (Photo: Jan Hanrion/Maison Moderne/archives)

Sept ans après le lancement en grande pompe de l’EarthLab par l’ex-ministre de l’Économie Étienne Schneider, ses actionnaires luxembourgeois ont «quitté le navire», encouragés par Telespazio. La pérennité de la structure d’intelligence artificielle au service des données n’est pas menacée.

Capable à partir de données et d’intelligence artificielle, d’apporter de nouvelles solutions aux assureurs ou au monde financier, d’où son arrivée au Luxembourg, avec le soutien du ministre de l’Économie de l’époque, (LSAP), de Post et d’Hitec.

Sept ans et plus de 6 millions d’euros de dettes plus tard, pour un chiffre d’affaires qui atteint 500.000 euros annuels en 2020 et 2021, cinq personnes continuent d’apporter un soin particulier au développement de leur plateforme Max-ICS. Mais les Luxembourgeois ont quitté l’aventure après avoir longtemps tenu la start-up de l’espace sous perfusion financière.

Au lieu de passer notre temps à aller chercher du capital, les actionnaires nous ont permis de poursuivre le développement.
Thomas Friederich

Thomas FriederichCEOEarthLab Luxembourg

«C’était une stratégie», commente le CEO de la structure luxembourgeoise, Thomas Friederich. «Au lieu de passer notre temps à aller chercher du capital, les actionnaires nous ont permis de poursuivre le développement.» Au total, selon nos calculs à partir des rapports financiers, ils ont injecté près de 500.000 euros en cinq ans. Un montant qui n’est pas si élevé au regard des promesses.

Pas d’alignement d’intérêts et restructuration

Mais quand l’initiateur de ce projet, le groupe Telespazio (filiale de Thales Alenia Space et Leonardo), a compris qu’il n’y avait pas vraiment alignement d’intérêt, et que les autres actionnaires ne semblaient pas très emballés à recapitaliser la société, le groupe a décidé de reprendre le contrôle complet de la start-up. Cet été, Hitec et Post ont cédé leurs participations pour des montants sur lesquels personne ne semble avoir envie de s’étendre. «Il y avait un risque financier», reconnaît le directeur général adjoint de Telespazio Group, Jean-Marc Gardin, depuis Toulouse.

«En tant qu’actionnaire fondateur, Post a soutenu l’ancrage de ce projet innovant au Luxembourg, qui est parfaitement en ligne avec les ambitions de développer le poids du secteur spatial dans notre économie», fait savoir le groupe luxembourgeois par mail. Ce dernier salue «les développements intéressants en matière de traitement de données spatiales» et indique avoir cédé ses parts «pour permettre à l’entreprise de franchir une nouvelle étape stratégique».

Thales Alenia Space avait annoncé en 2019 la création au Luxembourg d’une Digital Factory, et l’EarthLab pourrait la rejoindre pour renforcer ce centre de compétences.

Jean-Marc Gardindeputy CEOTelespazio Group

Cet été, comme il l’avait indiqué au Congrès international d’astronautique de Paris, le groupe français a intégré la structure luxembourgeoise dans une nouvelle entité, du Benelux, ce qui lui permet d’apurer la dette. «Il nous faudra évidemment réinvestir dans la société pour favoriser l’accélération de son développement, mais le montant est en discussion», explique Jean-Marc Gardin. «Nous avons plusieurs axes stratégiques à prendre en compte: d’abord, le potentiel de la plateforme peut aller bien au-delà de l’assurance et de la finance. Nous le voyons avec le premier de nos Earth Lab, en Aquitaine qui joue un rôle de plus en plus important au service de l’agriculture. Ensuite, Thales Alenia Space avait annoncé en 2019 la création au Luxembourg d’une Digital Factory et l’Earth Lab pourrait la rejoindre pour renforcer ce centre de compétences.»


Lire aussi


Annoncé en 2019, c’est en 2021 que le groupe français a confirmé le lancement de cette fabrique digitale pour favoriser «le développement de solutions numériques très innovantes pour les produits spatiaux de télécommunication, d’observation et de navigation. Il s’appuiera sur les technologies du big data, de l’intelligence artificielle et de la cybersécurité pour relever les défis de systèmes satellitaires complexes, tout en recherchant l’excellence en termes d’expérience utilisateur.»

Doublement du chiffre d’affaires en 2023

Enfin, dit encore Jean-Marc Gardin, l’Earth Lab Luxembourg pourrait aussi développer des activités commerciales à la fois pour ses solutions et pour les solutions du groupe, l’intérêt étant clair: certains domaines nécessitent d’avoir une expertise du terrain avant de vendre des solutions d’intelligence artificielle pointue.

Après avoir multiplié le chiffre d’affaires par dix pendant la période de la pandémie – Telespazio est devenu le premier client d’Earth Lab Luxembourg – Thomas Friederich est confiant. «J’espère que nous atteindrons le million d’euros de chiffre d’affaires l’an prochain, pendant que nos datascientists continuent à faire progresser l’intelligence artificielle pour développer de nouveaux projets verticaux.»

Outre l’assurance, à qui Max-ICS pourrait permettre de réaliser plus vite un état des lieux après une catastrophe pour accélérer le dédommagement, et ajouter de la granularité à ses primes d’assurances, Earth Lab pourrait également aider à anticiper les tornades et autres catastrophes climatiques, et à opérer une surveillance sur Terre et dans l’espace, le sujet des débris spatiaux étant un thème clé de l’Agence spatiale luxembourgeoise.

«Notre maîtrise de l’IA nous donne une petite avance, nous devons en tirer profit», conclut le CEO d’Earth Lab Luxembourg.

Cet article est issu de la newsletter hebdomadaire Paperjam Tech, le rendez-vous pour suivre l’actualité de l’innovation et des nouvelles technologies. Vous pouvez vous y abonner