Olivier Goemans, head of investment services and innovation, Bil. (Photo: Maison Moderne)

Olivier Goemans, head of investment services and innovation, Bil. (Photo: Maison Moderne)

À l’heure où la Banque centrale européenne (BCE) semble disposée à engager une nouvelle série de mesures de relance monétaire, Mario Draghi s’est efforcé dernièrement de convaincre les marchés que les outils de politique monétaire disponibles ne manquaient pas.

Sur fond d’anticipations d’inflation à des niveaux historiquement bas et de baisse du volume des échanges mondiaux grevant la zone euro, la BCE semble prête à assumer son rôle de soutien à l’économie. Toutefois, les leviers des politiques monétaires encore actionnables étant peu nombreux, les commentateurs s’interrogent sur la forme que pourrait prendre une nouvelle série de mesures de relance monétaire.

Selon nous, un nouveau programme d’achat d’actifs (PAA) d’ici la fin de l’année est de plus en plus probable. Le président sortant, Mario Draghi, a déclaré en juin que la BCE disposait d’une «marge de manœuvre considérable» pour lancer un éventuel PAA, mais qu’elle se heurtait à plusieurs difficultés quant à sa conception, la première étant qu’elle pourrait se retrouver sous peu à court d’obligations à acheter.

Un nouveau programme prônant l’augmentation des achats d’obligations d’entreprises pourrait constituer une piste, mais celui-ci aurait également un gros inconvénient.
Olivier Goemans

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Une situation qui s’explique principalement par le fait que la BCE s’est elle-même imposé une limite de 33% des obligations d’un même émetteur pour éviter qu’elle ne puisse bloquer un vote sur la restructuration de la dette d’un pays de la zone euro. La Banque centrale pourrait bien sûr lever cette contrainte, mais il faudrait pour cela qu’elle fasse son examen de conscience et se demande si cela ne revient pas tout simplement à renflouer un État. Si cette limite était maintenue, on estime que la BCE atteindrait le niveau maximum de 33% de détention de dette allemande d’ici un an.

Une modification de ce seuil de 33% lui permettrait d’acheter plus de Bunds allemands, mais une telle mesure de relance ne s’avèrerait pas des plus efficaces dès lors que les investisseurs se ruent déjà sur cette classe d’actifs. Elle pourrait également opter pour une modification de sa clé de répartition du capital, mais cela entraînerait une hausse des achats de dette italienne, française et espagnole, au risque de soulever des questions d’ordre moral.

Un nouveau programme prônant l’augmentation des achats d’obligations d’entreprises pourrait constituer une piste, mais celui-ci aurait également un gros inconvénient: les obligations bancaires devraient probablement être exclues afin d’éviter un conflit d’intérêts pour la BCE qui se retrouverait à la fois en position de régulateur et d’investisseur.

Si les options existent encore, choisir la plus appropriée relève de la gageure.
Olivier Goemans

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Mario Draghi a suggéré une autre possibilité, à savoir une baisse des taux. Cette mesure a d’ores et déjà amené les marchés à intégrer une réduction de 10 points de base du taux de la facilité de dépôt (à -0,5%) d’ici septembre.

Toutefois, les rendements négatifs sont particulièrement problématiques pour les banques et les assureurs. Les membres du conseil d’administration de la BCE, Benoît Cœuré et Peter Praet, ont laissé entendre que de nouvelles réductions nécessiteraient de reconsidérer le concept de taux de dépôt différencié afin de réduire la pression sur les banques.

Et donc, si les options existent encore, choisir la plus appropriée relève de la gageure. Quel que soit le choix de la BCE, le marché espère qu’une décision sera annoncée lors de la réunion du 25 juillet, même si la mise en œuvre intervient plus tard, peut-être sous la direction de Christine Lagarde.

Pour l’heure, Mario Draghi a encouragé les gouvernements à réfléchir de leur côté aux mesures de politique budgétaire possibles: «Une politique monétaire peut toujours atteindre ses objectifs seule, et plus particulièrement en Europe où les secteurs publics occupent une place importante. Mais elle peut y parvenir plus rapidement et avec moins d’effets secondaires si les politiques budgétaires s’alignent sur elle.»