Sur la base des données du dernier recensement de 2021, le Statec a étudié l’évolution des déplacements domicile-travail des résidents luxembourgeois sur dix ans, excluant les frontaliers entrants et les frontaliers sortants. Soit 204.093 résidents qui, en 2021, effectuaient des déplacements domicile-travail vers une commune luxembourgeoise.
Le Statec compare le nombre de résidents qui travaillent dans une commune différente de celle dans laquelle ils vivent: 149.269 en 2021, contre 123.442 en 2011. La proportion de ces «navetteurs» «est très variable à travers le territoire», constate cependant l’Institut. Il y a peu de navetteurs dans les villes qui proposent le plus d’emplois et ils sont nombreux dans les endroits situés à proximité des grandes communes pourvoyeuses d’emplois. Ainsi, Luxembourg-ville compte la part de navetteurs la plus faible du pays (24,7%) et Weiler-la-Tour la plus importante (92,7%).
Depuis 2011, de plus en plus de communes ont vu ce chiffre augmenter: six possédaient une part extrême de navetteurs (plus de 89,5% de résidents travaillant dans une autre commune), contre 17 en 2021. Un phénomène qui touche particulièrement «les communes proches de Luxembourg-Ville, de la Nordstad et de Mersch» précise le Statec.
Cinq pôles d’emploi à travers le pays
Une fois la proportion de navetteurs identifiée, l’Institut de statistiques a défini cinq pôles d’emploi dans le pays (en utilisant une méthode qui est un compromis entre la définition des pôles d’emploi des aires urbaines de l’INSEE et celle des agglomérations du Programme directeur de l’aménagement du territoire):
– L’Agglomération-centre, composée de neuf communes, dont Luxembourg-ville qui en est la commune-centre, totalise 109.231 emplois, soit 53,5% du total d’emplois des résidents du pays.
– L’Agglomération-sud, constituée de sept communes, dont sa commune-centre, Esch-sur-Alzette, représente 30.977 emplois, soit 15,2% du total d’emplois des résidents.
– La Nordstad réunit quatre communes, dont la principale est Ettelbruck, et compte 11.127 emplois, soit 5,5% du total d’emplois des résidents.
– Mersch constitue à elle seule le «pôle intermédiaire» entre l’Agglomération-centre et la Nordstad. La commune rassemble 3.243 emplois résidents, soit 1,6% du total.
– Enfin, le pôle rural du nord du pays, qui est uniquement composé de la commune de Wiltz, représente 2.147 emplois, soit 1,1% du total d’emplois des résidents.
Le Statec indique que «les 23,2% des emplois restants sont des emplois occupés dans les 80 autres communes du territoire (en dehors des pôles d’emploi).»

Les principaux pôles d’emploi du Luxembourg avec leur commune-centre et leur périphérie. (Source: Statec RP2021, Université du Luxembourg)
Un contraste apparaît entre la partie nord du pays et sa partie sud qui regroupe à elle seule «presque 70% du total des emplois occupés par les résidents». Mais une différence est à noter entre l’Agglomération-centre et l’Agglomération-sud. Dans la première, 73,4% des emplois du pôle sont dans la commune-centre, Luxembourg-Ville, démontrant sa «forte monopolarisation». Dans la deuxième, la commune-centre, Esch-sur-Alzette, ne compte «que» 36,8% des emplois du pôle, se qui témoigne de son «caractère polycentrique» selon le Statec.
L’Agglomération-centre «au cœur des déplacements des résidents»
L’étude s’intéresse ensuite à l’attraction des pôles d’emploi sur l’ensemble du pays. Elle est déterminée grâce aux aires de navettes qui représentent «la part de résidents travaillant dans un pôle d’emploi donné parmi les habitants en emploi de chaque commune».
Sans surprise, l’Agglomération-centre est «au cœur des déplacements des résidents» pour le Statec, car en 2021, au moins 10% des résidents de chaque commune travaillent dans ce pôle. Et sur les 102 communes du pays «24 possèdent une part de résidents travaillant dans l’Agglomération-centre comprise entre 50% et 70%, et 30 communes entre 35% et 50%. Ainsi, pour plus d’un tiers des communes du pays, la moitié des résidents travaillent dans ce pôle, et pour presque deux tiers des communes, c’est plus d’un tiers des résidents qui y travaillent.»
L’Agglomération-sud est, quant à elle, qualifiée de «pôle stable et en expansion le long des frontières». Entre 2011 et 2021, son aire de navettes s’est en effet largement étendue le long de la frontière ouest, dans le canton de Rédange. Même si, comme pour l’Agglomération-centre, «les parts de résidents y travaillant diminuent avec l’éloignement».
Pour la Nordstad, «les communes qui constituent le pôle sont celles qui possèdent la part de résidents travaillant dans la Nordstad la plus importante.» En 2021, Ettelbruck comptait par exemple entre 40% et 62,2% de résidents en emploi dans ce pôle. Mais, selon le Statec, «depuis 2011 la part de résidents des communes du pôle travaillant dans la Nordstad a diminué au profit de l’Agglomération-centre, en particulier à Ettelbruck et Diekirch», même si une extension vers le nord de l’aire de navette peut être observée.
Coincé entre l’Agglomération-centre et la Nordstad, le pôle de Mersch bénéficie d’une attraction limitée. Seulement 18,9% des habitants de l’unique commune du pôle y travaillent, alors qu’ils sont 47,3% à travailler dans l’Agglomération-centre. L’étude relève qu’en «dix ans, la part d’habitants de Mersch en emploi dans leur commune a largement diminué puisqu’elle était de 23,9% en 2011.»
Tout au Nord, l’aire de navettes du pôle de Wiltz «s’étendant principalement le long de la frontière ouest et nord, ainsi que plus faiblement au Sud jusqu’aux aires de navettes des autres pôles.» Dans la commune de Wiltz, 34,3% des habitants travaillent au sein du pôle, contre 41,2% en 2011.
Des flux plus nombreux et plus importants
Les trajets domicile-travail des navetteurs constituent des flux de déplacements. Si leur structure n’a pas particulièrement changé depuis 2011, «la croissance de la population a engendré de plus en plus de flux et a intensifié ceux existants». En 2021, 235 flux différents de plus de 100 résidents en emploi s’étendaient sur l’ensemble du territoire (ce qui représente 83.805 travailleurs), contre 197 (69.217 travailleurs) en 2011.
Conformément à l’analyse de l’attractivité des pôles, la majorité de ces flux sont à destination de l’Agglomération-centre, «représentant plus de 75% des résidents en emploi». 52 flux, comptabilisant 13.747 résidents en emploi, sont aussi à destination de l’Agglomération-sud, principalement d’Esch-sur-Alzette. «En ce qui concerne les flux à destination de la Nordstad, les plus importants ont lieu entre Diekirch et Ettelbruck», ajoute le Statec. «Quant aux flux à destination de Mersch et Wiltz, ils comptabilisent 369 et 499 résidents en emploi.»
En dix ans, les déplacements domicile-travail des résidents luxembourgeois se sont clairement polarisés, conclut l’étude, notamment parce que la part de résidents ayant un emploi parmi la population totale a augmenté ces dix dernières années: quasiment 50% en 2021 contre un peu plus de 43% en 2011. Le Statec annonce que «d’autres analyses et publications à travers des variables de mobilité quotidienne comme le mode de transport utilisé, la durée et la distance du trajet compléteront cette première étude des navettes du recensement de 2021.»