Devant une audience d’une vingtaine de journalistes financiers européens rassemblés à Londres, Guy Henriques, le responsable de la distribution pour l’Europe et l’Asie chez Capital Group, n’est pas peu fier de souligner que la croissance du gestionnaire est «entièrement organique». Et cela depuis 1931. Non seulement l’un des plus anciens gestionnaires d’actifs, avec près de 2.300 milliards de dollars d’actifs sous gestion, Capital Group se hisse également parmi la dizaine des principaux acteurs du marché.
Il est d’autant plus intéressant de se pencher sur l’approche de gestion active de Capital Group que l’asset manager a domicilié la majorité de ses fonds d’investissement au Luxembourg et a été nommé «Best Asset Manager 2022, Luxembourg» par Morningstar.
Un tiers de notre équipe obligataire travaillait déjà ensemble pendant la crise financière asiatique. Ce n’est donc pas leur premier rodéo dans le domaine des crises et cette perspective à long terme est importante.
«Nos 90 années d’histoire sont vraiment importantes. Notre création remonte à la Grande Dépression et cela souligne la façon dont nous avons investi à travers les cycles économiques», précise Guy Henriques. Le gestionnaire d’actifs a donc vécu l’ensemble des crises financières de l’histoire moderne. C’est un détail qui a son importance, car Capital Group attend de ses gestionnaires de portefeuille qu’ils développent leur carrière sur le long terme au sein de l’entreprise. Les gestionnaires de portefeuille étant rémunérés sur base de leurs résultats au bout de cycles d’un an, de trois ans, de cinq ans et de huit ans, leur ancienneté moyenne chez Capital Group est de 22 années. «C’est un chiffre assez inhabituel», observe-t-il, tout en illustrant l’importance de l’ancienneté des gestionnaires: «Un tiers de notre équipe obligataire travaillait déjà ensemble pendant la crise financière asiatique (Ndlr: débutée en juillet 1997). Ce n’est donc pas leur premier rodéo dans le domaine des crises et cette perspective à long terme est importante.»
Une faible rotation des titres
Si le succès de la gestion active de Capital Group repose sur ses gestionnaires de portefeuille, le responsable de la distribution européenne et asiatique se défend d’employer tout «gestionnaire vedette». En effet, Guy Henriques tient à couper court à toute idée préconçue: «Ce n’est pas comme ça que nous gérons l’argent. Nous avons des équipes de gestion star, mais nous n’avons pas de gérants star sur lesquels une stratégie particulière pourrait s’appuyer.»
Nous voulons que nos gestionnaires de portefeuille investissent vraiment dans leurs meilleures idées et qu’ils ne finissent pas par détenir des positions dans lesquelles ils ne croient pas.
Pour sa part, Alexandra Haggard, head of investment products and services chez Capital Group, confirme la structuration des équipes de gestion, basée sur une diversité d’opinions: «Aucun gestionnaire de portefeuille n’est censé être bon dans tous les domaines en même temps.» Dans certains cas, cela peut donner des équipes avec jusqu’à 10 gestionnaires de portefeuille pour une seule stratégie.
L’accent est également mis sur la conviction des gestionnaires. «Nous voulons que nos gestionnaires de portefeuille investissent vraiment dans leurs meilleures idées et qu’ils ne finissent pas par détenir des positions dans lesquelles ils ne croient pas», ajoute Alexandra Haggard. Ce qui, selon elle, permet d’avoir une rotation faible des positions dans les portefeuilles. «La période de détention est en moyenne de quatre ans par titre.»
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L’importance des analystes
Cependant, les résultats obtenus par les gestionnaires de portefeuille ne seraient rien sans le soutien apporté par les analystes en investissements. À en croire Andrew Cormack, fixed income portfolio manager, l’approche de Capital Group dans l’emploi des analystes se distingue de la concurrence: «Nos analystes gèrent tous de l’argent dès le premier jour.» Ainsi, lorsqu’un analyste lui suggère une idée, il précise: «Je ne suis pas partenaire d’une idée, je suis alors partenaire d’une idée dans laquelle l’analyste investit.» Cela illustre l’approche «bottom-up» privilégiée par le gestionnaire d’actifs.
Nos analystes gèrent tous de l’argent dès le premier jour.
Bien évidemment, une approche «top-down» existe également, mais elle se limite à des forums semestriels où les idées d’investissements et les tendances macroéconomiques sont diffusées auprès des gestionnaires de portefeuilles. Chaque mois, ceux-ci échangent entre eux au travers de téléconférences sur des stratégies d’allocation par secteur ou par devises, par exemple. Mais c’est essentiellement au quotidien que les analystes et les traders collaborent entre eux pour affiner les idées d’investissement.
L’absence de réelle stratégie de type «top-down» se traduit par «l’absence de vue maison», selon Caroline Randall, equity portfolio manager et membre du comité de gestion de l’asset manager. «Il n’y a pas de vue maison sur les taux d’intérêt, il n’y a pas de vue maison sur la croissance», note-t-elle. Tout dépend donc du gestionnaire de portefeuille et de l’analyste, tous deux n’étant pas obligés de suivre les modèles de prévision macroéconomique internes.