Thierry Raizer, rédacteur en chef de Paperjam. (Photo: Maison Moderne)

Thierry Raizer, rédacteur en chef de Paperjam. (Photo: Maison Moderne)

C’était en 2012... On parlait à l’époque de crise économique, de hausse du chômage, de recul de la compétitivité et de la nomination d’un jeune quadra au ministère de l’Économie après la démission soudaine de Jeannot Krecké.

(LSAP), premier conseiller de gouvernement et proche collaborateur du ministre sortant, faisait ainsi son entrée boulevard Royal sans être élu, mais avec une solide expérience des affaires de l’État et du monde de ­l’entreprise. Sept ans plus tard, et après avoir été reconduit deux fois dans ses fonctions, le voilà qui évoque en public la possibilité de son départ anticipé. Une surprise? Non.

«Je suis vraiment convaincu qu’il faut limiter le mandat de ministre sur deux périodes, dix ans, déclarait-il déjà sur Paperjam TV en janvier 2013. Peut-être qu’il faut un mandat pour vraiment entrer dans le business, connaître les liens, les procédures… et puis le deuxième mandat (...) pour qu’on fasse vraiment ce qui est dans l’intérêt du pays, et pas uniquement dans l’intérêt d’une ­réélection. C’est ce que je reproche en général en politique.» Dix ans donc, et pas plus. Meneur de projets et d’hommes, son influence au sein du gouvernement en tant que vice-Premier ministre et les retombées indéniables de Spaceresources.lu lui ont permis de passer dans le cercle des ténors qui combinent plusieurs portefeuilles ministériels. Au cœur de la campagne pour les législatives, à l’automne 2018, Étienne Schneider – qui se serait bien vu Premier ministre – ne déprimait pas à l’idée d’arrêter la politique en cas d’échec. Ni même dans l’absolu. De quoi relancer les spéculations...

Au LSAP, son départ rebat les cartes pour, dès à présent, préparer les prochains scrutins. Avec le retrait du «pro-business» Étienne Schneider, c’est aussi la ligne du parti qui sera amenée à être discutée, sous la houlette du président (47 ans) qui termine sa première année à ce poste. Lui qui souhaitait que les socialistes retrouvent leurs accents de gauche va pouvoir ouvrir cette séquence avec ­l’appui de son comité exécutif, où siège la ministre de la Coopération et proche d’Étienne ­Schneider, (51 ans). Celle-ci tient la corde pour devenir ministre de ­l’Économie (sans être élue non plus le cas échéant). Et qui pour prendre le leadership socialiste au conseil de gouvernement? Le ministre du Travail et des Sports, (57 ans), pourra le revendiquer plus ou moins ouvertement. Sa proximité avec l’OGBL n’est pourtant pas de nature à rassurer le patronat.

2020, l’année du rééquilibrage des forces internes aux différents partis? Le CSV tente de son côté, vaille que vaille, de se trouver une ligne politique en criant régulièrement au scandale à défaut de pouvoir revenir aux affaires. Les membres de Déi Gréng se serrent les coudes pour digérer deux épisodes malheureux: le retrait tragique du très respecté ministre de la Justice et le «pataquès» de l’affaire de l’abri de jardin de l’ex-bourgmestre de Differdange, Roberto Traversini. Quant au DP, il poursuit son rajeunissement et son positionnement «social-libéral» voulu par l’axe Bettel-Cahen depuis 2013. Et voit des élus confirmés au niveau national comme le ministre des Finances  (DP) et, chez les jeunes, le ministre des Classes moyennes  (DP).

L’heure n’est pas encore au bilan d’Étienne Schneider, qui devra être dressé – comme pour tout ministre de l’Économie – à l’aune des entreprises étrangères attirées au Luxembourg, des lignes de production inaugurées sur place et des emplois créés. L’homme n’a jamais caché qu’il disait tout haut ce que d’aucuns pensent tout bas. Le fin ­politique qu’il est devenu a en tout cas le respect de la parole donnée, ce qui mérite d’être souligné quand, chez d’autres, le pouvoir est devenu une drogue dure.