Pour François Chauvet, le palmarès 2023 est très représentatif de ce que l’on pourrait qualifier d’«économie de guerre». (Photo; Fundclass/Christophe Rabinovici)

Pour François Chauvet, le palmarès 2023 est très représentatif de ce que l’on pourrait qualifier d’«économie de guerre». (Photo; Fundclass/Christophe Rabinovici)

Ce 9 mars avait lieu à Paris la 17e édition de l’European Funds Trophy. François Chauvet, PDG de Fundclass – la société de notation qualitative de fonds qui calcule le palmarès de l’European Funds Trophy – tire les enseignements d’un «palmarès de guerre».

L’année 2022, à défaut d’avoir été bonne sur les marchés, l’aura été pour les gestionnaires d’actifs luxembourgeois. Ils sont ainsi trois à figurer cette année au palmarès des meilleurs gestionnaires européens. Il s’agit de Bluebay Funds, Candriam et Schroder.

L’an passé, un seul représentant de la Place avait été consacré à l’échelle du continent: Flossbach Von Storch. Rappelons que pour être rattaché à un pays, un promoteur doit avoir la majorité de sa gamme immatriculée dans ce pays. Et que pour être distingué, sa gamme doit afficher de bonnes performances sur la durée – 4 ans en l’espèce.

Sur les marchés, l’année a été «chaotique», commente François Chauvet. «Essentiellement à cause de la guerre en Ukraine. Après un tout début d’année où on a vu des plus hauts sur quasiment tous les marchés, on a décroché vers la mi-janvier lorsque les investisseurs ont considéré que la situation en Ukraine devenait sérieuse et que la guerre était inévitable. À partir de là, ça a plongé très fort. Malgré un rebond avant l’été, puis un deuxième au dernier trimestre, les marchés n’ont pu effacer qu’une partie de leurs pertes.»

Sur les 231 catégories que compte le classement APT sur lequel est bâti le palmarès de l’European Funds Trophy – soit autant de stratégies d’investissements –, on n’en compte que 19 qui ont pu afficher des performances positives. Pour la plupart fort modestes (cf tableau infra).

Ce sont essentiellement les matières premières – or métaux précieux, pétrole et alimentaires – qui ont profité de la situation. «Cela est très représentatif de ce que l’on pourrait qualifier “d’économie de guerre”. Les gérants actifs sur ces thématiques ont profité de la montée des cours consécutive à la guerre», explique François Chauvet. 

Pour toutes les autres stratégies et les autres gérants, la guerre conjuguée à l’inflation – «un effet de second tour» – a fait qu’il n’y avait aucun abri, aucune possibilité de se reporter sur une catégorie classique au profil prudent. C’est une raison probable pour justifier le retrait ce 278 milliards du secteur européen des fonds d’investissement européen en 2022 comme le note l’Efama, soit le plus haut niveau de sortie de capitaux depuis 2008. Pour mémoire, l’industrie des fonds en Europe avait attiré 888 milliards d’euros en 2021.

La guerre a également compliqué la vie des gérants ESG. Si depuis 2020, les adeptes du développement durable ont profité de l’accélération de la demande provoquée par la crise du Covid – au point même de créer un biais, les sociétés bien notées par rapport aux critères ESG attirant plus de capitaux que les autres – 2022 a été une année durant laquelle il a été impossible de trouver une classe d’actif «bien sous tout rapport» qui puisse leur permettre d’échapper à la déroute.

Les limites de la gestion indicielle

Si les marchés ont été très volatils, le palmarès de cette 17e édition des European Funds Trophy se révèle étonnamment stable. Une stabilité dont François Chauvet reconnaît qu’elle peut donner un côté «monotone» à la lecture des palmarès. Mais elle témoigne que, quelles que soient les conditions de marché – «et l’année dernière, ce n’était pas des conditions tout à fait classiques» –, «il y a des gestionnaires qui sont très bons et très résilients au meilleur niveau». Des gestionnaires que la méthodologie permet de distinguer.

«Année après année, les indices sont loin d’être les meilleurs de la classe», constate François Chauvet. «Ceux qui prônent la gestion indicielle font dès le départ un sacrifice de performance. Et quelquefois un gros sacrifice. La gestion indicielle, c’est bien dans la pratique lorsqu’on ne sait rien faire de mieux. Cela peut être une façon de se positionner en attendant la suite. Mais très clairement, pour le client final, la question de la performance régulière et à long terme doit se poser.»

Et demain? 2023 s’annonce moins chaotique.

«Globalement, sur 13 mois – de mi-janvier 2022 à mi-février 2023 – le marché a comblé ses pertes.» Et retrouvé des niveaux qui étaient avant la crise parmi les plus hauts historiques sur la plupart des marchés. «Nous nous retrouvons maintenant dans un régime de croisière où ce qui va importer n’est plus tant la guerre que l’inflation». Un risque un peu mieux maîtrisé que le risque géopolitique.

Le palmarès complet de la 17e édition se consulte  .