La vente de carburant aux routiers en transit, aux frontaliers et aux touristes à la pompe représente, à elle seule, 1,75 planète. (Photo: Shutterstock)

La vente de carburant aux routiers en transit, aux frontaliers et aux touristes à la pompe représente, à elle seule, 1,75 planète. (Photo: Shutterstock)

Depuis le début de la semaine, le Luxembourg vit à crédit écologique. Un constat inquiétant. Mais est-il possible d’agir pour faire reculer la date du jour du dépassement? 

Si l’ensemble des pays consommait autant de ressources que le Luxembourg, il faudrait en tout l’équivalent de huit planètes. Pire, le Luxembourg semble être , avec un «jour du dépassement» tombé cette année le 15 février. Autrement dit, depuis lundi, le pays vit climatiquement à crédit. C’est en tout cas ce que l’on peut découvrir suite à la publication de dernières données de l’ONG Global Footprint Network concernant l’indicateur de l’Overshoot Day. 

La pilule est amère, alors que le Luxembourg fait depuis plusieurs années des efforts en matière d’environnement (qui sont parfois très critiqués dans l’industrie). Le pays a également massivement investi et a mis en place de nombreuses mesures incitant au recyclage, à la mobilité douce, au développement de l’énergie renouvelable, à la suppression des sachets en plastique, etc.

Le jour du dépassement du Luxembourg cette année était le 15 février. (Visuel: Global Footprint Network)

Le jour du dépassement du Luxembourg cette année était le 15 février. (Visuel: Global Footprint Network)

Dès lors, faut-il en conclure que les mesures environnementales et écologiques prises ne sont finalement rien de plus qu’un coup d’épée dans l’eau ou, pire, faut-il tirer un constat d’échec global? Ce serait trop simple. La réponse est en réalité beaucoup plus nuancée. 

«L’indicateur de l’Overshoot Day est un indicateur non scientifique d’une enquête effectuée par l’ONG Global Footprint Network et qui est utilisé principalement dans un cadre de sensibilisation. Le but de la campagne de l’Overshoot Day vise à attirer l’attention sur le fait que les ressources naturelles sont restreintes et limitées, tant au niveau national qu’international. Il est cependant important, pour le gouvernement, de prendre également en compte les indicateurs qui s’appuient sur les directives et règlements européens, ainsi que sur les conventions internationales sur la protection du climat, la qualité de l’air, la protection de l’eau, la biodiversité et le développement durable, qui représentent les lignes directrices de la politique environnementale et climatique», souligne le ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable.

Qui cependant ne réfute pas pour autant les conclusions de l’ONG Global Footprint Network et est conscient que «le Luxembourg a une grande consommation de ressources par rapport à sa surface relativement petite. Son économie ouverte, en plus des 600.000 habitants et 200.000 frontaliers, et sans oublier le tourisme à la pompe sont repris dans le rapport de l’Overshoot Day, ainsi que dans les inventaires des émissions de gaz à effet de serre. Ces facteurs conduisent bien sûr à la consommation élevée de ressources par rapport aux disponibilités.»

Un argument également repris par une publication sur le site de l’Université du Luxembourg par deux chercheuses, Ariane König et Paula Hild, ainsi que par Jerome Ravetz, membre associé de l’université d’Oxford. «Le cas du Luxembourg est intéressant, car il montre clairement les mérites et les limites d’un tel outil (le calcul de l’empreinte écologique), qui repose sur l’agrégation d’un grand nombre de données différentes. C’est un excellent outil de communication et de sensibilisation, qui déclenche efficacement le débat. Mais, comme toutes les images et représentations sélectives, il y a des dimensions de la situation qu’elle suggère, révèle, mais aussi certaines qu’elle déforme et dissimule», indiquent-elles, sans pour autant, là aussi, atténuer la consommation (trop) élevée du Luxembourg.

Il est possible d’agir

Pour mieux comprendre l’empreinte écologique du pays, le Conseil supérieur pour un développement durable (CSDD) s’était déjà penché sur la question il y a un an, afin de décortiquer cette douloureuse empreinte dans un document de 15 pages, et cela sur base d’une étude de l’Institut fir Biologësch Landwirtschaft an Agrarkultur Luxemburg asbl.

On peut y comprendre à quoi correspondent les huit planètes dont a besoin le Luxembourg, mais surtout sur quels paramètres on peut agir. Notamment sur la consommation particulièrement élevée de papier du pays, imputable en grande partie au secteur des services (mais pas que), qui coûte l’équivalent de 0,45 planète. Même chose au niveau de la consommation alimentaire du Luxembourg, qui «coûte» 1,28 planète, dont 0,65 rien que pour la consommation élevée de viande et de produits d’origine animale.

L’empreinte écologique du pays grimpe notamment aussi à cause du tourisme à la pompe ou encore des exportations de produits fortement impactants, comme l’acier. 

La consommation d’énergie directe représente environ 60% de l’empreinte luxembourgeoise (soit environ 4,75 planètes). La vente de carburant aux routiers en transit, aux frontaliers et aux touristes à la pompe représente, à elle seule, 1,75 planète.

Finalement, la consommation de trois planètes est imputable directement aux seuls habitants du Luxembourg.

Une empreinte qui baisse quand même

En résumé, le Luxembourg possède effectivement une empreinte écologique bien trop élevée et consomme beaucoup trop de ressources. 

Mais la marge d’amélioration est énorme. D’ailleurs, on peut constater que le Luxembourg a vu son empreinte écologique diminuer légèrement au fil des années. En 2003, il fallait l’équivalent de 10,02 planètes dans le cas où l’ensemble des pays consommait comme le Luxembourg. Une donnée qui est passée à 9,42 planètes en 2010, puis à huit planètes cette année. À noter qu’en 1961, il fallait déjà (ou seulement) 4,28 planètes.