L’intention de fond de la directive européenne à l’origine de ce projet de loi est d’équilibrer vie pro et vie perso. Pourquoi dites-vous qu’il y a un risque à introduire de nouveaux congés dans la loi luxembourgeoise?
. – «Sur le fond, je suis d’accord avec la quête d’un meilleur équilibre, mais il existe d’autres moyens d’y arriver. On peut dire que le Luxembourg a un système de sécurité sociale plutôt favorable et un droit du travail qui autorise déjà le temps partiel, mais aussi un nombre élevé de jours de congés légaux, spéciaux, extraordinaires et fériés, dont les jours fériés compensés lorsqu’ils tombent un dimanche. Comme tout parent ou aidant, je peux comprendre certaines nécessités. Mais le nombre de congés spéciaux ou extraordinaires a déjà beaucoup augmenté ces dernières années et certains couvrent déjà des objectifs recherchés par les nouveaux congés, comme par exemple le congé pour raisons familiales. .
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Or l’entreprise a besoin de ses ressources pour faire face au Covid, à la transition énergétique et digitale, aux problèmes d’approvisionnement, au vieillissement de la population et au manque de personnel qualifié. La multiplication des congés autorisés crée un absentéisme qui désorganise l’entreprise qui va donc produire moins, au moment où elle a besoin d’être justement plus performante. La plupart des entreprises au Luxembourg sont de petite taille et auront du mal à s’adapter. Il y a un déphasage total entre les défis auxquels elles sont confrontées et les moyens de ses ambitions.
Que préconisez-vous, à la place d’une réduction de temps de travail?
«Une réflexion en profondeur sur la flexibilisation du cadre de l’organisation du temps de travail qui serait du ressort de l’employeur en accord avec les représentants internes du personnel et non d’une loi qui s’impose à tous, sans distinction. Nous ne voulons pas d’un débat sur la réduction, mais bien sur l’aménagement du temps de travail. Il y a des secteurs d’activité comme la construction ou l’Horeca (secteur de l’hôtellerie, de la restauration et des cafés, NDLR) et bien d’autres, qui travaillent plus ou moins selon la période de l’année.
L’annualisation du temps de travail, par exemple, n’est pour le moment pas possible selon la loi actuelle. Le cadre légal est encore basé sur une économie de fabrique datée du 19e siècle… Il y a pourtant des pistes qui ont déjà été lancées: l’annualisation, la semaine de quatre jours, le télétravail, la flexibilité horaire… La loi de 2016 ne prévoit pas de flexibilité au-delà de quarante-huit heures par semaine, le tout devant être lissé à quarante heures sur plusieurs semaines. Le LISER a fait une étude sur cette question qui sortira dans quelques mois. Cela pourrait servir de base à une nouvelle discussion.
D’autres instances patronales ont déposé un avis public à la Chambre. L’Union des entreprises luxembourgeoises (UEL) a-t-elle vocation à le faire également?
«Non, pas directement. Néanmoins, nous nous sommes concertés et nous alignons sur officiel rendu par deux de nos membres: la Chambre de commerce et la Chambre de métiers. La directive européenne portait davantage sur l’absence justifiée, mais ne prévoyait pas de rémunération compensatoire. Comme les chambres, nous pensons que ce n’est pas à l’employeur de la financer la politique familiale. Nous saluons l’engagement du gouvernement à la tripartite de prendre en charge à hauteur de 50% le coût pour l’employeur des deux nouveaux congés spéciaux, mais l’accord tripartite se limite actuellement à l’année 2023. Par ailleurs, en 2018, nous avions pu discuter avec le gouvernement et notamment le ministre du Travail avant l’ajout d’un jour de congé. Cette fois, le texte nous est imposé sans aucune concertation préalable.»