Quelques mois avant la pandémie, Spaces a ouvert son premier espace de 6.500m 2  dans le quartier de la gare à Luxembourg. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

Quelques mois avant la pandémie, Spaces a ouvert son premier espace de 6.500m 2 dans le quartier de la gare à Luxembourg. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

Avant la crise sanitaire, les espaces ouverts et le coworking étaient une tendance qui avait le vent en poupe. Mais le télétravail a rebattu les cartes et de nouvelles questions se posent.

Le télétravail a pesé lourdement sur la tendance forte du coworking. «Nous avons en effet été impactés par la crise sanitaire du fait d’une présence moins importante de nos clients. Nous avons observé une disparition de certains revenus en lien avec les services disponibles dans nos installations», confirme sans surprise William Willems, le directeur général de Spaces Luxembourg, société spécialisée dans la location d’espaces de travail partagés.

Pour rappel, jouxtant la gare de la capitale en novembre 2019. Un deuxième site de 4.500m2 a été ouvert en octobre 2020 à Hamilius sur le boulevard Royal et un troisième site doit faire de même en face du centre commercial de la Cloche d’Or au premier trimestre 2022.

«En moyenne, en Europe, le mètre carré pris en location annuelle a reculé de 43%», souligne Alain Brossé, CEO de Welkin and Meraki, opérateur d’espaces de travail à la demande très haut de gamme et à destination des entreprises. , mais également à Eindhoven, Paris et Bruxelles, la société affiche tout de même un chiffre d’affaires en croissance de 15%. «Normalement, nous sommes sur une croissance entre 30% et 50%. Mais je suis tout de même fier d’afficher une croissance de 15% dans le contexte actuel. Une croissance qui s’explique par notre modèle d’affaires, dans la mesure où, contrairement à des opérateurs comme Regus ou Spaces, nous sommes un peu différents et nous signons avec nos clients pour des périodes de deux à trois ans», assure Alain Brossé, occupé à finaliser un contrat avec un très grand client mondial. 

Le chantier du tram en plus de la pandémie

«Le chiffre d’affaires a baissé, mais la bonne nouvelle est d’avoir réussi à maintenir un taux d’occupation tout à fait raisonnable dans nos sites ouverts avant la crise», souligne pour sa part William Willems, qui ne cache néanmoins pas les difficultés rencontrées par Spaces dans le quartier de la gare: «Cela a été un peu plus compliqué. En plus de la crise sanitaire, les travaux du tram ont rendu l’accessibilité de la zone très difficile pendant huit mois. Aujourd’hui, on voit une reprise de nos locations et j’espère que d’ici la fin de l’année, on pourra atteindre un taux d’occupation raisonnable avec un objectif de 70%.» 

Du côté du boulevard Royal, le taux d’occupation était de 50% l’année dernière, soutenu par la présence d’un important client occupant un tiers de la surface dans l’attente de la disponibilité de ses nouveaux locaux. De plus, Spaces a accueilli les clients de Regus (qui appartient au même groupe) pour des raisons de rénovation. «Il y a un grand nombre de sociétés qui sont en train de refondre leur politique de mètres carrés. Il faut être créatif sur un marché luxembourgeois qui n’est pas un marché où il est facile de louer à des prix attractifs. On offre cette possibilité en plus de la flexibilité. La crise actuelle a montré que le monde du travail ne peut plus se permettre d’avoir de grosses concentrations d’espaces. C’est plus simple de passer par un opérateur comme nous pour diversifier sa force de travail et la relocaliser, faire du travail cellulaire», explique William Willems, qui ne croit guère au télétravail comme à une solution miracle. «Je suis absolument convaincu que le télétravail a ses limites. Il coûte cher aux salariés. Il y a des statistiques qui montrent que le télétravail coûte plus de 350 euros par mois si l’on additionne la connexion internet, la consommation électrique, le chauffage, le café, l’eau, etc. Si vous voulez acheter un appartement avec un espace dédié au télétravail, en Belgique, il faut compter 30.000 euros de plus dans son budget. Avec les prix de l’immobilier au Luxembourg, on peut facilement multiplier la somme par trois», estime-t-il. 

Au Luxembourg, aucune étude n’a chiffré officiellement le coût du télétravail pour un salarié. En France, des études ont cependant estimé ce coût entre 13 et 186 euros par mois. 

Une demande en flexibilité toujours forte

Le coworking n’est donc pas mort et, selon Alain Brossé, le monde du travail va se diriger vers un certain équilibre entre télétravail et coworking. Mais au Luxembourg, la décision de louer des espaces de travail prend du temps. «Je constate que la prise de décision est plus lente qu’avant la crise sanitaire», dit-il. «Aujourd’hui, il faut entre 60 et 120 jours pour avoir une décision, alors qu’auparavant, il fallait 30 jours. Je pense que l’on va être dans le même bain jusqu’en septembre et je ne sais même pas si l’on va retrouver la normalité d’avant. Il faudra peut-être se faire vacciner tous les ans. Je pense que l’on va se diriger vers de l’hybride. Il y aura toujours des bureaux, mais peut-être des bureaux avec 10 places pour une équipe de 20 personnes et la société fonctionnera en rotation», explique le CEO de Welkin and Meraki.

Ce dernier reste optimiste en constatant une «demande de la part des clients corporate pour plus de flexibilité. Selon les experts, cette demande va augmenter de 20 à 30%. Les entreprises ont vu ce que représentaient les coûts fixes, qui sont difficiles à porter pendant une crise», ajoute Alain Brossé, qui termine en assurant que «l’humain a besoin de l’humain et d’interactions, même dans les affaires».