Faut-il une loi nationale obligeant les entreprises ayant leur siège au Luxembourg à prendre toutes les mesures nécessaires afin d’éviter les violations des droits humains?
Pour les ONG, la réponse est oui. Sans hésitation. Mais pour que cette volonté devienne «un mandat clair» pour , elles en appellent à l’opinion publique. Et selon les résultats d’une enquête en ligne menée par TNS Ilres du 9 au 16 octobre auprès de 505 résidents, celle-ci est majoritairement en faveur d’une telle loi – 92% des sondés, pour être exact. Ils sont 93% à être en faveur de mesures pour empêcher des dommages environnementaux ayant un impact négatif sur les droits humains et 86% à estimer que le Grand-Duché serait plus crédible avec une telle loi dans son arsenal législatif au moment où le pays est candidat à un siège au Conseil des droits de l’Homme de l’Onu.
Que fait le Luxembourg, concrètement, sur le sujet?
Soupçon de passivité
Il soutient une proposition de réglementation à l’échelle européenne que prépare actuellement la Commission et que le commissaire à la justice, Didier Reynders, doit présenter au début de l’année.
Insuffisant pour les ONG concernées qui dénoncent une passivité justifiée par cette action au niveau européen. Pour elles, il ne faut pas opposer législation européenne et législation nationale. «Les deux doivent être complémentaires.» Cette priorité donnée à l’Europe leur apparaît comme le signe concret d’une absence de volonté politique sur le sujet.
Et de mettre en avant, en parallèle, les initiatives prises par la Finlande et l’Allemagne pour souligner ce manque.
En Finlande – pays également candidat à un siège au Conseil des droits de l’Homme de l’Onu –, une telle législation est prévue par l’accord de coalition et une consultation publique a été lancée. En Allemagne, un consensus politique a été trouvé sur le sujet. Et une étude publique également lancée.
Au Grand-Duché, il faut se «contenter» d’une action de soutien symbolique de différents députés, le 11 novembre dernier, alors que Jean Asselborn, le ministre des Affaires étrangères et européennes, prononçait la déclaration sur la politique étrangère et européenne du gouvernement à la Chambre des députés.
Le 1er janvier entrera en vigueur le Règlement européen sur les minerais de conflit. Un texte devant permettre de mieux contrôler la chaîne d’approvisionnement de quatre minerais (l’or, l’étain, le tungstène et le tantale) provenant tous de zones touchées par des conflits armés et connus pour être des enjeux financiers entre groupes armées et occasionner de nombreux cas de violations de droits humains.
Pour 87% des sondés, le gouvernement devrait publier régulièrement la liste des entreprises luxembourgeoises qui seront soumises à ce règlement. Et 85% souhaitent une compétence des tribunaux du pays en matière de responsabilité.
Socfin et Ferrero en ligne de mire
Le Luxembourg abrite-t-il des entreprises dont l’action est condamnable? On trouve, dans le collimateur de l’initiative, Socfin (société du groupe Bolloré, côté au Luxembourg) et Ferrero. La première, pour ses menaces envers les défenseurs des droits de l’Homme, et la seconde, pour ses fournisseurs de noisettes en Turquie qui exploiteraient des enfants et des réfugiés.
L’Initiative pour un devoir de vigilance au Luxembourg a été lancée en mars. Elle regroupe Action Solidarité Tiers Monde, Caritas Luxembourg, le Cercle de coopération des ONG, le Comité pour une paix juste au Proche-Orient, la commission luxembourgeoise paix et justice, Etika, Fairtrade Lëtzebuerg, Frères des Hommes Luxembourg, Greenpeace Luxembourg, l’OGBL, l’ONG OGBL Solidarité syndicale, Partage.lu – Bridderlech Deelen et SOS Faim Luxembourg.