Le frère de Tanya, qui habite à quelques kilomètres de l’aéroport, témoigne des traces d’un bombardement russe sur Kiev. (Photo: DR)

Le frère de Tanya, qui habite à quelques kilomètres de l’aéroport, témoigne des traces d’un bombardement russe sur Kiev. (Photo: DR)

Depuis le Luxembourg, Julien et Tanya restent en contact avec leur famille prise au piège à Kiev. 

«Dès les premières explosions à Kiev, jeudi vers 4h30, le téléphone n’a pas cessé de sonner. C’était ma belle-famille et des amis proches qui habitent à Boryspil, dans l’agglomération de Kiev, pas très loin de l’aéroport», explique Julien, résidant au Luxembourg avec sa femme, Tanya, Ukrainienne, qui est sous le choc.

Le couple suit la situation ukrainienne avec stupeur et tente de rester en contact avec sa famille actuellement à Kiev. «À Kiev, la vie est à l’occidentale. Il y a des magasins, des bars, de la vie, comme dans une capitale européenne. Alors, se réveiller sous les bombardements, et les troupes russes en approche, c’est un choc pour eux. Je pense que ça a été la stupeur», lance Julien.

Prévoyant, il donnait des conseils à ses proches depuis plusieurs jours pour se préparer au pire. «Acheter un vieux téléphone portable, car la batterie d’un smartphone tient un jour, se procurer des euros, car en cas de conflit, l’argent ukrainien va vite perdre de la valeur, faire des provisions et le plein d’essence. Car l’idée était qu’ils quittent Kiev le plus vite possible», explique Julien.

Ils ont été coincés dans les embouteillages. Pour finir, ils sont restés à Kiev, car certaines routes sont bloquées.

Julien

Un groupe d’amis proche a très vite réagi, dès les premiers signes d’un bombardement. «Ils ont réussi à quitter Kiev en voiture. Mais depuis, nous n’avons pas trop de nouvelles. L’idée est de rejoindre la Pologne ou la Roumanie pour ensuite venir jusqu’ici, au Luxembourg», glisse Julien. «On leur a envoyé des documents montrant qu’ils ont de la famille au Luxembourg, et le but n’est pas qu’ils s’arrêtent en Pologne, mais bien qu’ils puissent arriver jusqu’ici, puis faire les démarches administratives».

Par contre, sa belle-famille n’a pas réussi à quitter la capitale ukrainienne. «Ils ont été coincés dans les embouteillages. Pour finir, ils sont restés à Kiev, car certaines routes sont bloquées dès la sortie des villes», s’inquiète Julien, qui reçoit des informations mentionnant des forces russes à 15 kilomètres de la capitale. «Les Russes sont aux portes de Kiev, et ceux qui ne sont pas arrivés à quitter la ville, j’ai bien peur qu’ils soient définitivement bloqués à Kiev. Je pense que cela va être très compliqué de les faire sortir, désormais», ajoute-t-il.

À la question de savoir pourquoi ne pas les avoir fait venir au Luxembourg plus tôt, Julien répond qu’il n’est pas aussi facile de quitter son pays. «Le frère de Tanya a une famille, une femme et un enfant. Il est chauffeur de bus. Venir ici, cela veut dire quitter son travail, et donc son revenu. La mère de Tanya a 77 ans. Elle était réticente à l’idée de venir en raison d’une santé fragile», souligne encore Julien.

Dans les premières heures, dans l’urgence absolue, tu penses à ta famille, et tu restes en contact permanent avec eux.

Julien

«À Kiev, les gens sont extrêmement choqués. Je pense que l’on n’arrive pas trop à se rendre compte vu d’ici, mais sur les cinq dernières années, Kiev a fait un saut extraordinaire en termes de développement. Les gens vivent comme dans une capitale européenne avec des centres commerciaux, des bars, des restaurants, des sorties, des spectacles. La seule différence se trouve dans le coût de la vie. Ils n’étaient pas prêts à vivre cette situation et, jusqu’au dernier moment, ils ne pensaient pas qu’elle puisse à ce point dégénérer. On a vu des vidéos, des bombardements, des vitres qui tremblent, le bruit… on n’est pas prêt à cette violence», décrit Julien.

Julien et Tanya pensent déjà à la suite, à savoir comment héberger la famille, même si, pour le moment, ils restent dans le flou et ils ne savent pas encore comment ils vont pouvoir mettre leur famille en sécurité, au Luxembourg. «Dans les premières heures, dans l’urgence absolue, tu penses à ta famille et tu restes en contact permanent avec eux. Par la suite, on va sans doute échanger un peu plus avec la communauté ukrainienne qui est assez soudée au Luxembourg», termine Julien, de plus en plus inquiet, avant d’ajouter: «On vient de me dire que les hélicoptères russes sont au-dessus de Kiev. L’armée ukrainienne commence à se déployer dans le centre-ville. Il va y avoir une bataille à Kiev pendant la nuit.»