Disney+ attend beaucoup de son «The One and Only Ivan», le gorille au gros cœur, bientôt disponible. (Photo: Disney+)

Disney+ attend beaucoup de son «The One and Only Ivan», le gorille au gros cœur, bientôt disponible. (Photo: Disney+)

Treize ans après le virage numérique de Netflix, Disney proposera son service de contenu à domicile le 15 septembre au Luxembourg. Moins d’un an après l’arrivée de Disney+ sur un marché très concurrentiel, l’ogre est parti pour tout dévorer. Plus de 60 millions de clients y ont déjà souscrit.

«Si vous nous aviez demandé il y a un an ‘Quelles sont les chances qu’ils arrivent à 60 millions d’abonnés en un an?’, j’aurais dit ‘zéro’. Comment c’est possible? Ils ont réussi une performance très impressionnante!»

Reed Hastings n’en revient pas.

Alors que le CEO historique de Netflix se prépare tout doucement à quitter le navire, Disney a atteint en neuf mois le nombre d’abonnés que son service de contenu vidéo a mis sept ans à atteindre. Le 15 septembre, Disney+ sera lancé au Luxembourg (et en Belgique, au Danemark, en Finlande, en Islande, en Norvège, au Portugal et en Suède), mais il faudra patienter avant de connaître exactement le catalogue proposé.

Lancée en novembre dernier aussi, Apple TV va devoir débourser des milliards de dollars pour espérer rester dans la course, malgré l’abonnement le moins cher du marché – à 4,99 euros par mois (sauf pour ceux qui viennent d’acheter un produit Apple ou ceux qui ont un abonnement à Apple Music).

Disney opère depuis le Luxembourg…

La marque à la pomme a «signé» Leonardo DiCaprio, Ridley Scott et Martin Scorsese, elle s’est offert les services de Richard Plepler, l’ancien CEO de HBO, pour qu’il alimente le pauvre catalogue en séries via sa société de production, Eden Productions, et discute avec MGM pour acquérir les droits des James Bond. Off the record, le géant commence à se «vendre» comme un excellent service de streaming d’accompagnement de Netflix ou Disney+.

Car Disney, qui consolide ses comptes au niveau mondial via sa holding luxembourgeoise depuis 2011, a sorti l’artillerie lourde: pour 6,99 dollars par mois ou 69,99 dollars par an, soit deux mois gratuits, Disney+ permet non seulement de définir jusqu’à sept profils, mais aussi d’en utiliser quatre en simultané – dont des profils spéciaux pour les enfants, histoire d’éviter qu’ils ne tombent sur du contenu inadapté –, et propose le téléchargement en illimité sur 10 appareils.

En nombre de contenus, il n’était en milieu d’année qu’en troisième position, derrière Amazon Prime Video (247 séries et 1.427 films) et Netflix (149 séries et 291 films), mais la qualité de son offre est hors de portée de ses concurrents avec les catalogues (entre autres) de Disney, Pixar, Marvel, Star Wars et National Geographic.

… et Netflix le quitte pour Amsterdam

L’ancêtre Netflix, présent depuis 1998 mais qui existe sous sa forme actuelle seulement depuis 2007, a non seulement ajouté un deuxième CEO à son management avec Ted Sarandos à la mi-juillet, mais aurait également dépensé 12 milliards de dollars en 2018 et 15 milliards en 2019 pour ajouter du contenu, notamment européen, pour répondre à la fameuse «exception culturelle européenne». En 2011 aussi consolidée au Luxembourg, l’acteur star du streaming a préféré Amsterdam en 2015 pour payer encore moins d’impôts et a récemment relevé ses tarifs à 7,99 euros par mois pour le premier prix.

Pour l’instant bien placé à la faveur des contenus qu’il propose pour 49 euros par an, Amazon Prime Video, dans le cadre d’une offre Amazon Prime, est en train de préparer un feu d’artifice pour échapper aux coups de griffes de Disney+: ajout de chaînes comme OCS pour 11,99 euros ou 1,99 euro pour d’autres chaînes moins connues, accès à FilmoTV et ses 700 films, location à la demande pour 3,99 euros le film ou à l’achat à 11,99 euros.

De son côté, Rakuten TV, construite sur la base de l’espagnole Wuaki TV qu’elle a rachetée, compte 8 millions de clients en Europe, mais n’a déjà plus aucun rôle à jouer. Les films sont accessibles pour 4 à 17 euros et l’abonnement n’est proposé que pour ses contenus originaux.

«Hamilton» (comédie musicale de Broadway dans laquelle jouent Lin-Manuel Miranda et Phillipa Soo) sera l’occasion de vivre une expérience unique, promet Disney+. (Photo: Disney+)

«Hamilton» (comédie musicale de Broadway dans laquelle jouent Lin-Manuel Miranda et Phillipa Soo) sera l’occasion de vivre une expérience unique, promet Disney+. (Photo: Disney+)

Seulement, l’ogre Disney+ est loin d’avoir rassasié son immense appétit de clients. Son ambition n’est pas d’être le leader mondial du streaming mais du «direct-to-consumer». Quelle différence? Le premier consiste à proposer du contenu «délinéarisé», autrement dit que le spectateur peut consommer quand il veut et où il veut. Disney entend ajouter du contenu plus classique de télévision et de retransmissions sportives ou culturelles, comme la célèbre comédie musicale de Broadway «Hamilton».

145 nominations «Primetime» des Emmy Awards

Le 4 août, à l’occasion de la présentation des résultats du troisième trimestre, le nouveau CEO de Disney depuis février, Bob Chapek, s’est félicité que les résultats de Disney+ compensent de plus en plus les pertes de Hulu et de ESPN – 100 millions d’abonnés à eux trois – à la faveur du «Frozen II» de Pixar et du nouvel épisode «Star Wars: The Rise of Skywalker»… voire de la sortie de l’album visuel de Beyoncé «Black is King».

Parmi les cartons de la rentrée, Disney attend beaucoup de «The One and Only Ivan», de «The Right Stuff» de National Geographic sur le projet Mercury de la Nasa, ou encore de «The Mandalorian», annoncé en octobre (qui a reçu 15 Emmy Awards cette année).

Les nominations sont un autre motif de satisfaction pour l’ogre: le jury des Emmy a attribué 145 nominations pour des «Primetime» des entités de Disney, dont 92 étaient des contenus originaux qu’elles ont produits!

Le CEO a aussi annoncé le lancement, l’an prochain, de Star, une nouvelle plateforme de streaming de contenus d’ABC, FX, Freeform, Searchlight et 20th Century Studios, et pas des sociétés qu’il a déjà sous licence.

Seuls les ingénieurs réseau vont s’arracher les cheveux: Netflix consomme déjà la moitié du trafic internet aux États-Unis et beaucoup plus dans certaines régions du monde. Un débat que les fournisseurs abordent avec confiance. L’ogre a tellement faim qu’il sème lui-même des petits cailloux pour attirer les parents en plus des enfants. La magie de Disney, probablement.