Philippe Ledent est senior economist chez ING Belux. (Photo: Archives/Maison Moderne)

Philippe Ledent est senior economist chez ING Belux. (Photo: Archives/Maison Moderne)

Au-delà de l’évolution des prix de l’énergie, pour lesquels trouver une explication rationnelle aux mouvements de très court terme devient de plus en plus difficile, cette semaine était aussi marquée par la publication des chiffres du marché du travail américain.

Après des statistiques décevantes pour le mois d’août, l’évolution du marché du travail en septembre était attendue de pied ferme dans les marchés. Rappelons que par rapport au niveau d’avant la crise du Covid, il manque toujours plus de cinq millions d’emplois aux États-Unis, et ce alors même que l’activité a d’ores et déjà dépassé son niveau pré-Covid. Malheureusement, une nouvelle déception était au bout du suspense. Avec la création nette de seulement 194.000 emplois, on est en effet loin des 500.000 attendus par le marché. Seule consolation, le chiffre des créations d’emplois en août a été (légèrement) revu à la hausse et, surtout, le taux de chômage, basé sur une enquête auprès des ménages (et non pas sur un comptage officiel) passe de 5,1% en août à 4,8% en septembre. 

La faiblesse du rapport sur l’emploi de septembre indique-t-elle que la reprise est en train de s’effondrer aux États-Unis? Pas vraiment. Par contre, cela démontre que la croissance bute de plus en plus contre des contraintes d’offre. Les problèmes d’approvisionnement en composants et en matériaux limitent la capacité à produire… et à embaucher, quelle que soit la vigueur de la demande. Dans ce contexte, les pressions à la hausse sur les prix ne sont finalement que l’expression du déséquilibre macro-économique entre la demande et l’offre. 

Un marché du travail en déséquilibre

De surcroît, les contraintes d’offre concernent également le marché du travail.

Les entreprises américaines ont toujours du mal à embaucher. Cela se traduit d’ailleurs par une forte hausse des salaires, qui progressaient de 4,6% sur un an en septembre. Cela peut paraître paradoxal, sachant que, comme indiqué plus haut, le marché du travail n’a pas encore retrouvé son niveau d’avant-crise. Mais il faut tenir compte du fait que dans ce laps de temps, un nombre important de travailleurs se sont simplement retirés du marché du travail. C’est notamment le cas de très nombreux travailleurs âgés. 

En conclusion, les mauvais chiffres de l’emploi ne remettent pas nécessairement en cause la trajectoire de reprise de l’économie américaine, ni même probablement la stratégie de la Fed pour les prochains mois (des annonces importantes sont attendues en novembre). Ceci étant, la reprise reste marquée profondément par les déséquilibres engendrés par la crise du Covid. Et cela ne va pas s’améliorer directement.