Pour l’un des deux avocats interrogés, l’obligation vaccinale conserve ses limites. Pour l’autre, au contraire, si la situation le justifiait, le gouvernement pourrait aller loin dans la mise en pratique d’une obligation vaccinale. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne/archives)

Pour l’un des deux avocats interrogés, l’obligation vaccinale conserve ses limites. Pour l’autre, au contraire, si la situation le justifiait, le gouvernement pourrait aller loin dans la mise en pratique d’une obligation vaccinale. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne/archives)

D’une «simple» limitation des déplacements non essentiels aux non-vaccinés à des contrôles jusqu’au domicile, deux avocats imaginent ce à quoi pourrait ressembler, ou non, une obligation vaccinale si elle était votée au Luxembourg.

. Depuis que le Premier ministre (DP) a , nombreux sont ceux à s’être prononcés en faveur d’une obligation générale,

Toutefois, d’un point de vue législatif, qu’est-il possible, à ce jour? «En principe, le pouvoir de l’État est souverain. Si, demain, on vote une loi pour obliger la vaccination à partir de 12 ans, elle s’imposera à tout le monde», analyse Me Joël Marques. Sauf si le gouvernement choisit une obligation sectorielle. Avec, en tout cas, des exceptions pour les personnes ne pouvant se faire vacciner et un délai pour se mettre en règle avec cette loi. «On peut dire que ces mesures sont justifiées par la nécessité», créée par la crise sanitaire.

Un confinement pour les non-vaccinés

Me Marques imagine une sorte de «lockdown» pour les non-vaccinés, ces derniers ne pouvant «pas sortir sauf s’ils justifient d’un motif impérieux». Pour l’avocat, «on ne peut pas interdire aux gens de faire leurs courses ou de monter dans une ambulance». Mais on peut leur demander à chaque fois de réaliser un test. «On essaie de les avoir à l’usure.» Encore plus de restrictions pour entrer dans des lieux publics qui ne sont pas encore touchés par le système 2G+, comme les commerces non essentiels, seraient ainsi envisageables.

Au niveau du contrôle, «cela peut se présenter de différentes façons». Il s’attend à voir des policiers dans les rues ou sur les routes, «comme pour des contrôles de papier». Mais aussi aux frontières, puisque «des règles comme celle-ci s’appliquent sur l’ensemble du territoire». En revanche, à domicile, «je ne pense pas». Il rappelle que même lorsque la loi avait fixé un nombre maximum d’invités que chacun pouvait recevoir, la police ne pouvait, en réalité, entrer dans le logement pour vérifier son application, «sauf si elle avait une ordonnance d’un juge d’instruction».

Les sanctions, en cas de non-respect de l’obligation lors des contrôles, iraient alors d’un avertissement simple à taxé. «Cela pourrait aller jusqu’à la prison, même si je ne pense pas que c’est ce vers quoi le gouvernement va aller.»

L’hypothèse du pire

«Tout est possible», estime de son côté Me Nadia Chouhad. Pour elle, plusieurs atteintes à des droits fondamentaux ont déjà été faites. Elle cite par exemple l’obligation de présenter un pass pour se rendre au travail – une mesure déjà en place . «Le gouvernement est dans une situation inédite», justifie-t-elle. Ce qui lui permet de porter atteinte à des droits individuels. Ce serait alors «de nouveau le cas» avec une obligation vaccinale, selon elle. Quels contrôles et quelles sanctions seraient alors possibles? «À partir du moment où on a décidé de le faire, toutes les barrières tombent.»

L’avocate devine que le gouvernement ira «crescendo». Par exemple, s’il opte pour une obligation sectorielle, «rien ne dit que la prochaine loi ne dira pas que vous pouvez licencier en cas de refus». Ceci pourrait cependant créer des problèmes de discrimination, précise-t-elle.

Pour contrôler la mise en place d’une obligation générale, cela pourrait commencer par des moyens simples, «lors d’une visite chez le médecin», illustre-t-elle. Jusqu’à des contrôles dans la rue, voire à domicile, «si demain, X ou Y raisons le justifie. Ce serait une énième atteinte à un droit fondamental.»

À terme, l’obligation pourrait-elle aussi toucher des services essentiels et empêcher les non-vaccinés de faire ou même de recevoir leurs courses ou de se rendre aux urgences? «La loi change en fonction de la situation. Il y a deux ans, cela nous paraissait impensable d’avoir une obligation vaccinale», rappelle alors la juriste en guise de réponse. Et qu’en est-il d’une vaccination forcée? «Tout est possible, si une loi est adoptée.»

L’obligation et ses garanties

Et pour qu’une loi soit adoptée, «tout est question de proportionnalité», résume-t-elle. «Je pense que le gouvernement peut tout faire si la nécessité l’exige.» C’est sur ce rapport entre atteinte aux droits et nécessité que le Conseil d’État rendra ses différents avis, que les députés voteront ou non les différentes lois et que la population elle-même les acceptera ou non, se projette-t-elle.

De même pour les sanctions possibles. «La logique est à chaque fois revue et adaptée selon les effets.» Si le simple avertissement ou l’amende ne suffisent pas à augmenter le taux de vaccination, l’emprisonnement serait donc envisageable.

«À partir du moment où le gouvernement oblige à se faire injecter un produit, il doit s’engager à ce qu’il ne soit pas nocif», ajoute cependant l’avocate. Ce qui, en cas de problèmes graves liés aux vaccins, «ouvre le droit au recours, car le citoyen n’a plus le choix». Reste à savoir quelles options le gouvernement choisira et si cette question de la garantie figurera dans le texte de loi.