Le Cercle des médecins anesthésistes-réanimateurs du Grand-Duché de Luxembourg (CMARL) s’est dit à son tour favorable à une vaccination obligatoire générale. (Photo: Nader Ghavami/Maison Moderne/archives)

Le Cercle des médecins anesthésistes-réanimateurs du Grand-Duché de Luxembourg (CMARL) s’est dit à son tour favorable à une vaccination obligatoire générale. (Photo: Nader Ghavami/Maison Moderne/archives)

En Europe comme au Luxembourg, l’idée de rendre la vaccination obligatoire est de plus en plus concrète. Des voix de plus en plus nombreuses la réclament. Reste à savoir si le gouvernement n’a pas fait preuve de trop d’attentisme à ce sujet.

Lors de l’annonce de , le Premier ministre  (DP) a indiqué que la vaccination obligatoire, sectorielle ou générale, sera débattue au mois de janvier. «C’est un sujet de discussion. Nous faisons des études comparatives et demandons des avis juridiques sur le sujet. Nous voulons être fixés en janvier», a ainsi souligné le Premier ministre.  (LSAP), ministre de la Santé, a ajouté qu’il était en effet «nécessaire d’avoir une base légale» solide, tout en indiquant vouloir recourir à cette mesure «en dernier recours».

C’est en tout cas un virage presque à 180° par rapport à ce qui était il y a encore quelques semaines, quand la simple idée de rendre la vaccination obligatoire était balayée d’un revers de la main, mesure jugée non éthique. «On ne va pas aller chercher les gens pour leur mettre une aiguille dans le bras», pouvait-on entendre, notamment.

De plus en plus de voix commencent à s’élever pour demander au gouvernement de prendre ses responsabilités en imposant la vaccination obligatoire.

Voici quelques semaines, la Fédération des hôpitaux luxembourgeois (FHL) s’est dite favorable à une vaccination obligatoire sectorielle. Le Cercle des médecins anesthésistes-réanimateurs du Grand-Duché de Luxembourg (CMARL) va plus loin, en soutenant ouvertement une vaccination obligatoire générale. «L’obligation vaccinale sectorielle n’est pas suffisante, et, dans le milieu hospitalier, cela représente une goutte d’eau par rapport aux personnes non vaccinées dans la population», souligne le docteur Philippe Welter, président du CMARL. «De plus, cela donne l’impression que c’est à l’hôpital que l’on attrape le Covid-19, ce qui n’est pas le cas», ajoute-t-il.

Sans la vaccination, nous n’y arriverons pas.

Dr Philippe WelterprésidentCercle des médecins anesthésistes-réanimateurs du Grand-Duché de Luxembourg

Selon les estimations, il y a 500 personnes sur environ 8.000 au sein des quatre grands groupes hospitaliers du Luxembourg qui ne sont pas vaccinées, alors qu’environ 110.000 personnes éligibles à la vaccination au sein de la population résidente du pays n’ont pas encore sauté le pas.

«Sans la vaccination, nous n’y arriverons pas. Certains disent que, même en étant vacciné, on peut se retrouver à l’hôpital. C’est vrai. Mais je n’ose même pas imaginer la situation si nous n’avions pas de vaccin. On en a fait l’expérience l’année dernière, et nous ne voulons pas revivre cela», prévient le Dr Philippe Welter. «Au gouvernement de prendre ses responsabilités et d’assumer l’obligation vaccinale. Actuellement, c’est une très forte recommandation ou une obligation à peine déguisée avec des mesures restrictives, mais cela reste un choix libre et personnel. La responsabilité est donc tout autre», peste le président du CMARL.

Un avis partagé par le Collège médical, ordre qui regroupe les médecins, médecins dentistes, pharmaciens et psychothérapeutes. Il estime que l’obligation vaccinale de doit pas être sectorielle, mais bien générale, pour ne pas stigmatiser le personnel médical. Le Collège médical estime également que l’obligation vaccinale générale est accueillie favorablement par la communauté scientifique, mais aussi par la population. Il va même plus loin, en demandant au gouvernement d’imposer la vaccination lors de la prochaine modification de la loi Covid.

L’obligation vaccinale est une mesure égalitaire visant l’égalité civile et sociale. Mais nos gouvernants n’ont toujours pas le courage nécessaire. C’est une procrastination sans fin.
Gérard Schockmel

Gérard Schockmelmédecin consultantHôpitaux Robert Schuman

Un discours qui n’est pas sans rappeler la position de la présidente de l’OGBL, , qui a plusieurs fois regretté le choix du gouvernement d’éviter de prendre la responsabilité de la question vaccinale.

Le docteur Gérard Schockmel a aussi récemment déploré l’attentisme du gouvernement, et regretté qu’il soit sans doute trop tard pour que la vaccination obligatoire soit pleinement efficace: «Si une obligation vaccinale avait été appliquée dès le printemps, nous ne serions pas dans une situation de crise cet hiver. Le calcul politique a été clair: éviter l’obligation vaccinale afin de ne pas se rendre impopulaire. Mais cela ne fonctionne pas. Cela a au contraire créé la division au sein de la société, entre les vaccinés et les non-vaccinés. Au contraire, l’obligation vaccinale est une mesure égalitaire visant l’égalité civile et sociale. Mais nos gouvernants n’ont toujours pas le courage nécessaire. C’est une procrastination sans fin.»

, Gilbert Pregno, président de la Commission consultative des droits de l’Homme (CCDH), avait souligné que le recours à l’obligation vaccinale au Luxembourg «serait une atteinte justifiable et légitime aux droits humains».

Pour rappel, au 1er février 2022, l’Autriche va imposer à toute sa population l’obligation vaccinale. L’idée commence à faire son chemin en Allemagne et dans d’autres pays européens. Le 1er décembre dernier, Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, avait également déclaré qu’il était temps d’y réfléchir et de mener une discussion sur le sujet.

Au Luxembourg, la vaccination semble en tout cas à nouveau patiner en ce qui concerne les primo-vaccinés. Entre le 13 et le 19 décembre, ils ont été 4.012 à recevoir une première dose. Le taux total de personnes ayant un schéma vaccinal complet par rapport à toute la population vaccinable ne passe toujours pas la barre des 80%, étant à 79,7%. Un résident luxembourgeois sur cinq pouvant être vacciné ne l’est donc pas.

L’obligation vaccinale sera sans aucun doute un sujet incontournable dès les premiers jours de l’année 2022.