Un seul exemple vaut parfois mieux que mille mots pour l’expliquer. Même quand cet exemple tient en dix lignes… «Prenez une société qui a des voitures de sociétés électriques et des panneaux solaires. Sa stratégie est de recharger les voitures en dehors des heures de bureau par exemple, pour que les employés les aient pendant les heures de bureau. L’électricité qui sera utilisée à ce moment-là sera l’électricité achetée à un fournisseur, sans qu’on ait toujours la garantie qu’elle soit verte. Et faute d’utilisation de la totalité de l’électricité produite sur le site, cette électricité-là sera remise sur le marché. À la fin, mieux vaudrait peut-être repenser sa stratégie pour utiliser l’électricité produite par les panneaux solaires autant que possible et n’utiliser le fournisseur externe qu’à la marge.»
Philippe Gruber marque une pause. Le directeur de nZero (pour l’Europe, le Moyen Orient et l’Afrique) à Luxembourg – que nous avons baptisée – pourrait multiplier les exemples. L’ancien communicant préfère une phrase, elle aussi, très efficace. «On ne peut pas changer ce qu’on ne peut pas mesurer!»
nZero permet de réunir toutes les informations sur la consommation de toutes les formes d’énergie dans une entreprise, réunies en trois couches:
– le gaz, l’eau et les liquides frigorifiques (climatisation) pour le «scope» 1;
– l’électricité pour le «scope» 2;
– et la consommation liée à l’activité, comme celle liée à la production et à l’envoi de la production, aux déchêts ou au parc logistique pour livrer ses produits, pour le «scope» 3.
Un dashboard redoutable de précision
Grâce à des capteurs installés dans une entreprise ou dans un immeuble, il est possible de tout savoir de ces trois variantes. Le bilan est établi à partir des compteurs électriques ou d’eau déjà digitalisés ou de capteurs spécifiques qui seront proposés par des partenaires de la start-up américaine, à l’instar d’All In One Technologies à Munsbach.
À partir de ces capteurs et des données empiriques traitées manuellement par un opérateur de la start-up pour chaque client, la plateforme est nourrie des données de l’entreprise et offre un dashboard d’une redoutable précision. Été comme hiver, de jour comme de nuit, à chaque heure de la journée, pour chaque partie du bâtiment – que ce soit le siège, les unités commerciales ou les sous-sols où opèrent des centres de données – chaque endroit livre sa vérité.
À charge pour le management ou pour des architectes, par exemple, d’améliorer la situation pour consommer moins d’énergie, produire moins de CO2 ou entamer des travaux pour améliorer son score, réduire son empreinte carbone ou sa facture énergétique.
Reporting obligatoire sur deux des trois scopes en 2025
La solution livre un «sommaire environnemental» qui résume tout dans le détail pour des questions d’obligation de reporting. À compter de 2025, le reporting sur les scopes 1 et 2 devra être documenté et les Européens sont en train de se mettre d’accord sur le moment et la manière d’envisager le reporting du scope 3.
nZero propose un document selon trois niveaux de standardisation, dont le Gresb (Global real estate sustainability benchmark). «Mais si vous voulez avoir un document pour une réunion du conseil d’administration sur la consommation d’électricité dans un seul de vos bâtiments, dans le cadre d’une nouvelle stratégie, vous pouvez aussi avoir ça en une seconde. C’est toujours utile pour alimenter correctement ce genre de discussions», explique encore Philippe Gruber. «Nos 26 ingénieurs ont non seulement chiffré les informations pour que chaque client reste le strict propriétaire de ses données» souvent sensibles, mais «ils peuvent aussi développer des fonctionnalités spécifiques qui conviendraient à un client ou un type de clients.»
Aux États-Unis, un premier État a adopté la technologie: le Nevada. Au Luxembourg, nZero a pour l’instant séduit une importante enseigne locale de la grande distribution et un investisseur, qui a, par exemple, équipé un bâtiment du boulevard Royal de 4.000 capteurs. Ainsi que les communes de Mondorf et de Remich.
Un cas d’usage du cloud souverain
«De manière générale, on entend parler de cette problématique, mais imaginez un grand incendie. À quoi bon éteindre un bout du feu dans un coin si on n’éteint pas tout? Les petites initiatives c’est super, mais il faut aller beaucoup plus loin! Et regarder où sont nos forces et nos faiblesses. L’immobilier produit 40% des émissions de CO2 mondiales, de la fabrication des produits utilisés à l’utilisation des bâtiments livrés.»
«C’est pour cela que nous discutons avec les autorités, qui sont à la fois un bon client potentiel et ceux qui définissent les règles du jeu. Le ministère de l’Économie et la CEO de Luxinnovation sont très intéressés par cette technologie. Il y a encore beaucoup d’entreprises qui ne sont pas du tout prêtes pour ces impératifs déclaratifs à venir. Nous avons une solution prête à l’utilisation», explique encore le country manager de nZero.
Le projet, né aux États-Unis, pourrait aussi être un cas d’usage parfait du pour permettre à de gros clients industriels d’héberger au Luxembourg toutes ces données sensibles. «Parfois, par exemple dans l’automobile, savoir ce que consomme une ligne de production pourrait indiquer à des concurrents quel est le niveau de charge de cette ligne. Mieux vaut protéger cela correctement», explique-t-il, alors que pour l’instant, les données chiffrées sont hébergées dans des centres de données d’Amazon Web Services en Europe pour les clients européens.