Pour Ben Weekers, les professionnels de la gestion de patrimoine doivent améliorer l’expérience client s’ils veulent améliorer leur position concurrentielle. (Photo: Capgemini)

Pour Ben Weekers, les professionnels de la gestion de patrimoine doivent améliorer l’expérience client s’ils veulent améliorer leur position concurrentielle. (Photo: Capgemini)

Dans un contexte d’augmentation de la population des millionnaires, les professionnels de la gestion de fortune vont devoir s’adapter à de nouvelles attentes ainsi qu’à l’irruption de nouveaux thèmes d’investissement, estime Ben Weekers, senior director chez Capgemini Invent BeLux.

Si le nombre de millionnaires continue d’augmenter, la démographie des millionnaires change. Et avec leurs attentes et leurs besoins. Pour Capgemini, tant pour fidéliser leur clientèle que pour accéder à des segments sous-exploités, les professionnels de la gestion de fortune vont devoir repenser leur stratégie commerciale en en s’appuyant un recours accru à la digitalisation et à l’hyper personnalisation de la relation client. 

«La démographie des personnes fortunées évolue, avec de plus en plus de femmes, de personnes LGBTQ+, et de membres des générations Y et Z qui recherchent désormais des services de gestion de patrimoine. Ces segments de clientèle émergents ont chacun leurs propres valeurs, préférences et exigences que de nombreuses sociétés de gestion de patrimoine ne sont actuellement pas en mesure de satisfaire. Par conséquent, nombre de ces personnes fortunées se tournent vers des concurrents plus adaptés ou des family offices plus petits», explique Ben Weekers, senior director chez Capgemini Invent BeLux. Selon lui, les sociétés de gestion de fortune «traditionnelles» vont devoir s’adapter.

Des attentes multiples et diversifiées

Il détaille plusieurs exemples. Celui des femmes d’abord qui, toutes tranches de richesse confondues, devraient hériter de 70% de la richesse mondiale au cours des deux prochaines générations. «Elles recherchent des sociétés qui assurent non seulement une transparence sur les frais et la sécurité des données, mais aussi une formation sur la manière de faire fructifier ce patrimoine.»

Il cite également les familles LGBTQ+ dont la structuration patrimoniale et successorale demande désormais des experts pointus.

«Le boom du secteur technologique et l’essor des licornes financées par des fonds de capital-risque ont créé un groupe unique de millionnaires ‘tech-wealth’, et ce segment important de personnes fortunées offre un énorme potentiel pour les sociétés de gestion de patrimoine, mais seuls 27% des sociétés déclarent cibler activement ces prospects.

«De même, 39% des personnes fortunées de la génération Y ont changé de gestionnaire au cours de l’année écoulée en raison d’un manque de transparence. Ils se tournent souvent vers de nouveaux gestionnaires de patrimoine qui proposent davantage d’interactions numériques, de formation et sont plus pratiques», poursuit Ben Weekers.

Pour lui, les professionnels de la gestion de patrimoine doivent améliorer l’expérience client. «De plus en plus de sociétés de gestion de patrimoine ont créé un nouveau poste de directeur de la clientèle (CCO pour Chief Customer Officer), destiné à entretenir l’intimité avec les clients et à les placer au cœur du processus de gestion de patrimoine. Ce rôle consiste à tirer parti des atouts des données et du numérique dans l’ensemble de l’organisation pour répondre aux demandes complexes et évolutives des clients et les fidéliser.». Un exemple qu’il espère voir se généraliser et devenir la nouvelle norme.

L’irruption de nouveaux modes d’investissement

L’arrivée de nouveaux modes d’investissement est également en train de bouleverser le secteur de la gestion de patrimoine. Et va encore obliger les sociétés de gestion de fortune «traditionnelles» à s’adapter.

C’est le cas de l’investissement ESG qui devrait atteindre la barre des 5.000 milliards de dollars d’actifs sous gestion d’ici 2025.

55% des personnes fortunées investissent dans de tels actifs avec une forte volonté d’obtenir un impact. Une proportion qui varie en fonction de l’origine géographique – 69% des millionnaires asiatiques sont actifs sur ce créneau contre 66% d’européens et 55% de nord-américains – et de l’âge – les millionnaires de moins de 40 ans sont beaucoup plus sensibles à ces thèmes que leurs ainés. Ils sont 80% à s’investir sur ces thèmes contre 33% des 60 ans et plus. Le niveau de fortune entre également en ligne de compte. 78% des millionnaires dans la tranche des plus de 30 millions de dollars d’actifs s’intéressent à ce thème contre 44% des personnes fortunées dont la richesse est comprise entre un et 5 millions de dollars.

Surtout, 64% des personnes fortunées demandent les scores ESG pour connaître l’impact sociétal d’un fonds. Mais 40% des gestionnaires de patrimoine estiment qu’il est difficile d’afficher un impact ESG précis. Un écart qui peut se révéler problématique à terme.

Le boom des actifs digitaux

Les actifs digitaux font également leur apparition dans la palette des sociétés de gestion et dans le portefeuille de leurs clients. Si le marché reste marginal – on recense 16.000 cryptomonnaies représentant une capitalisation de 2.000 milliards de dollars, «soit peu ou prou la capitalisation d’Apple» –, ils suscitent l’intérêt des investisseurs. 71% des personnes fortunées ont investi dans ce segment. Une proportion qui monte à 91% chez les moins de 40 ans.

Ce sont les investissements directs dans les cryptomonnaies qui sont les plus populaires (39%), suivis par une exposition indirecte via des ETF (33%), les digital security tokens (28%), les investissements dans le métavers (21%), les actifs digitaux comme les noms de domaines (20%), les Non Fongible Tokens (19% et les investissements dans les start-up via le private equity [15%].

«Cette nouvelle demande pose des défis aux sociétés de gestion d’actifs qui ont besoin de nouvelles capacités en matière de produits et d’éducation, ainsi que de partenariats avec des écosystèmes permettant de diversifier les portefeuilles d’offres numériques.»

Cet article est issu de la newsletter Paperjam + Delano Finance, le rendez-vous hebdomadaire pour suivre l’actualité financière au Luxembourg.