La présidente de l’Asti, Laura Zuccoli, réclame un accès aux soins et à l’information «sans faille pour tous, peu importe son origine, sa nationalité, son statut administratif ou sa capacité économique». (Photo: Jan Hanrion/Maison Moderne/archives)

La présidente de l’Asti, Laura Zuccoli, réclame un accès aux soins et à l’information «sans faille pour tous, peu importe son origine, sa nationalité, son statut administratif ou sa capacité économique». (Photo: Jan Hanrion/Maison Moderne/archives)

La crise sanitaire pourrait être l’occasion d’insister sur l’aspect multiculturel et de renforcer la cohésion sociale dans le pays, selon la présidente de l’Asti, Laura Zuccoli. Tout d’abord en s’adressant à la population en plusieurs langues.

«Cette crise peut être l’occasion de nous rendre plus sensibles à l’aspect multiculturel», estime la présidente de l’Association de soutien aux travailleurs immigrés (Asti), Laura Zuccoli, alors que la pandémie de Covid-19 et ses conséquences sur l’économie touchent au Luxembourg une population dont près de la moitié est composée d’étrangers, sans compter les plus de 200.000 travailleurs frontaliers.

En cette période de grave crise, il y aurait «une carte à jouer», selon Laura Zuccoli: «Les gens sont très réceptifs, car ils ont peur, ils sont dans l’attente, ils s’interrogent sur la manière d’agir. Et si la communication insiste sur l’aspect multiculturel, cela pourrait nous y rendre plus sensibles. Cela permettrait de souder les gens et de créer un vrai sentiment d’appartenance.»

D’autant que la situation de crise sanitaire rappelle au pays sa dépendance vis-à-vis des frontaliers, qui constituent la grande majorité des employés du secteur hospitalier, mais aussi des maisons de retraite ou des commerces alimentaires. «Ceux qui réclament la fermeture des frontières peuvent tout aussi bien demander celle des hôpitaux», a d’ailleurs rappelé récemment le Premier ministre, Xavier Bettel.

«Dépendants des frontaliers»

Un propos que ne peut que partager Laura Zuccoli: «Nous sommes dépendants des frontaliers et nous prenons conscience que certains métiers sont essentiels, comme les aide-soignants, les infirmiers, les éducateurs, les femmes de ménage; or ce ne sont pas forcément les plus valorisés», ajoute-t-elle. «En ce moment, nous avons besoin d’eux et pas de spécialistes de la finance. J’espère qu’à l’avenir nous serons plus vigilants vis-à-vis des gens dans ces secteurs non protégés, et que nous ne les oublierons pas après la crise.»

Mais si Laura Zuccoli se réjouit de ce que, dans un récent discours, Xavier Bettel se soit adressé aux frontaliers dans plusieurs langues, elle s’inquiète de l’impact de la crise sur les populations les plus vulnérables, cette «société grise», en grande partie immigrée, qui se situe en bas de l’échelle sociale et qui est frappée de plein fouet. Ces gens au chômage partiel qui ne peuvent pas se permettre de perdre un peu de leur salaire ou qui, malgré l’absence de matériel de protection, sont dans l’impossibilité de refuser un travail même s’ils craignent pour leur santé.

Parmi cette frange de la population, les sans-papiers sont bien sûr en première ligne. Ils vivent «une situation dramatique», alerte Laura Zuccoli. Car non seulement ils ne perçoivent plus de revenus, mais ils sont confrontés à de graves problèmes sanitaires. «Nous espérons qu’ils vont se rendre dans les services sanitaires, mais, de peur d’être contrôlés, je ne pense pas qu’ils vont beaucoup se montrer», s’inquiète la présidente de l’Asti.

Accès aux soins et à l’information pour tous

Pour protéger ces personnes, l’Asti réclame un accès aux soins et à l’information «sans faille pour tous, peu importe son origine, sa nationalité, son statut administratif ou sa capacité économique». Et rappelle la nécessité de diffuser ce message et de communiquer sur l’évolution de la situation dans de nombreuses langues, «par souci de transparence et de cohésion sociale».

Si elle se réjouit des communications gouvernementales en traduction simultanée lors des dernières conférences de presse, Laura Zuccoli constate que, malgré des efforts évidents, «les systèmes des ministères et des services publics ne sont pas encore assez sensibilisés à l’aspect multiculturel. Ce n’est pas de la mauvaise volonté, il y a une vraie envie de s’occuper de tout le monde. Mais on oublie l’aspect multiculturel. Chacun a une manière différente de parler, de fonctionner. Il faut y penser», rappelle Laura Zuccoli.