Christophe Hansen: «Nous avons, c’est incontestable, une faiblesse institutionnelle à 27.» (Photo: Anthony Dehez / Archives)

Christophe Hansen: «Nous avons, c’est incontestable, une faiblesse institutionnelle à 27.» (Photo: Anthony Dehez / Archives)

Dix partis présenteront des listes au Luxembourg. Tous nourrissent de grandes ambitions, mais les différences sont grandes entre ceux qui veulent plus d’Europe, ceux qui veulent la restructurer et ceux qui veulent la faire disparaître. Cette série continue avec Christophe Hansen, candidat CSV.

Quels sont les axes principaux du programme européen du CSV?

Christophe Hansen.-  «Le programme du CSV est un programme qui en revient à un fondamental de l’Union européenne, sa raison d’être: protéger ses citoyens. Notre programme est également celui du renouveau et pas seulement des responsables politiques européens.

Renouveler sa promesse à l’Europe, c’est l’inscrire dans le monde contemporain et lui donner les moyens de prendre pleinement sa place. Renouveler sa promesse à l’Europe, c’est comprendre ses faiblesses et les corriger. Renouveler sa promesse à l’Europe, c’est renouer avec ses valeurs fondamentales. Il en va de notre identité, de notre destin commun, de notre force et de notre place dans le monde.

Quelle est votre vision de l’Europe? Doit-on la restructurer au niveau de son fonctionnement?

«Je suis un enfant de l’Europe, j’ai 37 ans, je n’ai connu que cela. C’est une chance et à la fois une responsabilité. Prendre l’Europe pour acquise peut aboutir au désengagement et à la distance. Je refuse d’appartenir à la génération qui aura laissé l’Europe nous échapper, régresser, se fragiliser. Je veux au contraire porter la vision d’une Europe capable de se reformer pour affronter les défis qui l’entourent, une Europe qui assume sa volonté d’être puissante, une Europe capable de dire ‘non’ quand il le faut, sans avoir à en rougir.

Nous avons, c’est incontestable, une faiblesse institutionnelle à 27. Avancer, c’est parfois devoir choisir de le faire en nombre réduit, je suis partisan d’une Europe des cercles concentriques, ceux qui veulent avancer ensemble doivent pouvoir le faire sans que les autres ne les y empêchent.

On nous demande de l’action concrète, pas de débattre de sujets institutionnels si éloignés des préoccupations de nos concitoyens.
Christophe Hansen

Christophe HansencandidatCSV

Faut-il supprimer les décisions européennes prises à la majorité absolue?

«Nous pouvons déjà dépasser les minorités de blocage sans modifier les traités! Prenez l’exemple de la création du Parquet européen, dont la mission sera de mieux lutter contre la fraude à l’échelle de l’UE: la volonté d’avancer en la matière par le biais d’une coopération renforcée a entraîné dans son sillage d’autres États, 16 participants en 2017 et 22 aujourd’hui! On nous demande de l’action concrète, pas de débattre de sujets institutionnels si éloignés des préoccupations de nos concitoyens.

Que répondre à ceux qui veulent garder l’Europe mais aussi plus de fédéralisme?

«Qui fédère? Pour aller vers le fédéralisme, il faudrait pouvoir fédérer... Certains croient pouvoir fédérer en traçant une ligne entre ‘progressistes’ et ‘nationalistes’, c’est antinomique avec la définition même de l’union. Mais compte-tenu du monde dans lequel nous vivons, nous n’avons guère le choix.

Après la Seconde Guerre mondiale, nos dirigeants ont fait le choix de déléguer notre sécurité et une partie de notre indépendance aux États-Unis et à l’Otan; or nos alliés historiques nous tournent le dos, le multilatéralisme est mis à mal dans de nombreuses régions du monde, les instabilités régionales à nos frontières extérieures se multiplient quand d’autres puissances nous considèrent simplement comme une part de marché à conquérir, quitte à semer la division entre nous pour y parvenir. Nous devons retrouver notre cohérence, notre capacité d’action, dépasser les blocages institutionnels, et c’est urgent.

Doit-on revoir Schengen?

«Nous devons sauver Schengen! Nous avons supprimé nos frontières intérieures sans définir clairement et sécuriser réellement nos frontières extérieures. Nous sommes en train de constituer une véritable force de sécurité des frontières extérieures, il n’y pas de liberté sans sécurité et la survie de Schengen dépendra de notre capacité à sécuriser notre espace et à accompagner, dans un esprit de sincère coopération, les pays les plus exposés géographiquement.

Je salue à cet égard le renforcement de l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex) en termes d’équipements techniques et de personnel, avec un contingent permanent comprenant jusqu’à 10.000 agents opérationnels d’ici 2027. En outre, son mandat s’est élargi afin de soutenir l’action des États membres en matière de protection des frontières, de retour et de coopération avec les pays tiers.

Notre rôle est de protéger les intérêts des citoyens européens et des entreprises européennes.
Christophe Hansen

Christophe HansencandidatCSV

Le Brexit incarne-t-il un échec européen? D’autres nations seront-elles tentées de suivre la même voie?

«C’est d’abord un échec pour les responsables politiques britanniques qui ont joué avec le feu pour des raisons électoralistes. L’Europe a respecté l’injonction des dirigeants britanniques, elle respecte aujourd’hui la majorité qui s’est exprimée dans les urnes. Notre rôle est de protéger les intérêts des citoyens européens et des entreprises européennes.

Chacun a son rôle. Au niveau européen, nous sommes prêts et depuis longtemps, ce n’est pas le cas outre-Manche. Depuis la victoire du ‘oui’, ils disent ‘non’ à tout, veulent le beurre et l’argent du beurre, mais cela ne fonctionne pas comme cela. Le Brexit n’est pas un échec européen mais le fruit des mensonges populistes.

Quels sont les enjeux principaux pour le Luxembourg au niveau de la politique européenne?

«Toutes les politiques européennes sont des enjeux pour le Luxembourg! L’agriculture, l’environnement, la mobilité, la libre circulation, le renforcement de l’Union économique et monétaire, les services financiers, le dumping social. Notre économie est intrinsèquement liée à l’Union et ce n’est pas en permettant à la Chine, par exemple, de développer ses nouvelles ‘routes de la soie’ que l’on rend service à l’Union et à son pays!

Où se situe le plus gros enjeu au Luxembourg: perte d’un siège pour le CSV? Perte d’un siège pour le LSAP?  Vague verte? Poussée des partis d’extrême?

«Je ne vais pas spéculer sur la future composition de la délégation luxembourgeoise au Parlement européen. Il nous faut des députés qui s’investiront dans les commissions-clés pour le Luxembourg, pas de ‘private branding’, du travail de fond!

Le gouvernement Bettel n’avait pas de plan B dans l’hypothèse d’un Brexit sans accord, il en a fait adopter un dans la précipitation. Le gouvernement Bettel, trop occupé par le ‘nation/Bettel branding’ et n’ayant même pas jugé utile de répondre à la consultation publique de la Commission européenne, se retrouve aujourd’hui avec une réforme de l’Autorité européenne des marchés financiers qui inquiète notre industrie des fonds pour ne citer que quelques exemples de cet amateurisme...

L’enjeu est de savoir si l’on veut que le Luxembourg continue à façonner la construction européenne ou si l’on accepte d’en être simplement spectateur. L’enjeu principal pour le Luxembourg est donc de désigner des députés capables d’assumer leurs responsabilités, pour l’Europe et notre pays.»