Dr Jean-Luc Dourson: «Oui il faudrait revoir les procédures d’attribution des marchés, oui il faudrait revoir la construction des appels d’offres et oui il faudrait avoir une transparence sur l’utilisation des budgets.» (Photo: Patricia Pitsch / Maison Moderne)

Dr Jean-Luc Dourson: «Oui il faudrait revoir les procédures d’attribution des marchés, oui il faudrait revoir la construction des appels d’offres et oui il faudrait avoir une transparence sur l’utilisation des budgets.» (Photo: Patricia Pitsch / Maison Moderne)

Entre octroi des marchés et guerre des talents, le Covid-19 agite le secteur des laboratoires, selon le directeur de Bionext Lab, le Dr Jean-Luc Dourson. Qui demande des aides au gouvernement.

Quel est votre ressenti concernant le marché des tests de dépistage du Covid-19?

. – «Le marché est très tendu: il y a une volumétrie qui ne cesse d’augmenter avec une très forte demande qui n’est pas uniquement médicale mais aussi administrative, liée aux pays qui demandent des tests pour l’entrée des voyageurs. Un autre aspect touche les ressources humaines: le vol de talents du secteur privé vers le secteur public. Force est de constater qu’au niveau salarial, on n’arrive pas à suivre par rapport au secteur public. Cela lance le sujet des conventions collectives: nous n’en avons pas et je dirai que c’est dommage parce que nous n’avons au final pas de moyens d’être compétitifs au même niveau que l’est aujourd’hui le secteur public. Je suis ouvert à ce qu’on en introduise une, encore faudrait-il trouver un moyen de la financer.»

Vous avez souligné dans une lettre ouverte diffusée cet été avec les Laboratoires Ketterthill que les tests PCR choisis pour le large scale testing – opéré par vos concurrents des Laboratoires Réunis – étaient «moins performants». Vu l’existence de faux négatifs, cela vous conforte-t-il dans votre approche?

«Je ne pense pas que la lettre avait dénoncé une moindre performance des tests, c’est plus une façon de les utiliser. La technique PCR est extrêmement performante en tant que telle. Le prélèvement peut être fait dans le nez ou dans la gorge. Peut-être que pour le patient, le confort est plus important dans la gorge mais les données publiées à ce jour montrent que la sensibilité est plus forte dans le nez que dans la gorge. Par le nez, on aura un meilleur prélèvement et donc, on se donne plus de chance de détecter le coronavirus. Mais le patient garde le choix de prélèvement qu’il souhaite.

Les modalités d’attribution des marchés ou des choix de tests ou protocoles doivent-ils être revus?

«Oui il faudrait revoir les procédures d’attribution des marchés, oui il faudrait revoir la construction des appels d’offres et oui il faudrait avoir une transparence sur l’utilisation des budgets. Il est intéressant de voir les chiffres des tests. Depuis le début de la pandémie, nous avons 7.023 cas (*) positifs cumulés. Sur ce total, 4.540 ont été diagnostiqués grâce à une ordonnance, fruit du travail du corps médical. 1.795 autres cas ont été détectés sur base du contact tracing mené par l’inspection sanitaire. Ces deux canaux représentent donc la majorité des sources de détection de l’infection. 473 personnes ont été diagnostiquées positives dans le cadre du large scale testing soit 6% du total. De toute évidence, le large scale testing sert puisqu’on a détecté des cas. Mais qu’est-ce que cela a coûté et comment ces budgets ont-ils été utilisés? C’est peut-être la question à se poser.

Quel est l’impact de la crise sanitaire sur l’activité de votre laboratoire?

«L’impact est double: le volume a augmenté mais les charges et frais ont décuplé. Travailler de nuit, du weekend, c’est forcément mobiliser des ressources en heures supplémentaires. Le matériel, la protection et les prélèvements sont de plus un plus onéreux vu la tension sur l’approvisionnement. Avant la crise, notre dossier moyen tournait aux environs de 80 euros. Avec la crise, il a chuté aux environs de 60 euros. La demande se concentre sur le test PCR, alors qu’avant le dossier moyen comportait généralement plusieurs analyses.

Que voudriez-vous demander au gouvernement?

«Vu l’augmentation de nos charges, nous avons besoin d’aides pour ne pas être en déséquilibre en termes de trésorerie. Pour l’instant, et malgré les demandes introduites, nous ne sommes pas éligibles aux aides étatiques pour supporter notre activité dans la crise.»

(*) au 08/09/2020, dernières données disponibles au moment de l’interview.

Cet article a été rédigé pour l’édition magazine de  qui est parue le 24 septembre 2020.

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