La Chambre de commerce n’apprécie guère le mécanisme d’indexation tel qu’il est actuellement pratiqué au Luxembourg, c’est-à-dire de manière intégrale et automatique.  (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne/Archives)

La Chambre de commerce n’apprécie guère le mécanisme d’indexation tel qu’il est actuellement pratiqué au Luxembourg, c’est-à-dire de manière intégrale et automatique.  (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne/Archives)

Une indexation basée sur un panier davantage durable, qui ne pourrait pas intervenir plus d’une fois par an et avec un plafonnement dès 5.300 euros de revenu, telle est la proposition de la Chambre de commerce pour révolutionner le système d’indexation des salaires.

En vue de nourrir le débat électoral en cette année de double scrutin, la Chambre de commerce a présenté en février une série de On y retrouve quelques-uns des thèmes majeurs ayant animé la vie économique de ces derniers mois et qui feront certainement de même dans les prochains. À l’image du système d’indexation des salaires, une spécificité luxembourgeoise (qui existe également en Belgique et à Malte, mais sous des formes différentes) qui permet aux salaires – ainsi qu’aux traitements des fonctionnaires et aux pensions – d’être automatiquement augmentés de 2,5% lorsque l’inflation augmente, elle aussi, de 2,5%.

Inadapté en période de forte inflation

Sans grande surprise, la Chambre de commerce n’apprécie guère ce mécanisme d’indexation tel qu’il est actuellement pratiqué au Luxembourg, c’est-à-dire de manière intégrale et automatique.

«Tout d’abord parce cette intégralité le rend inégalitaire, exacerbant même les écarts salariaux», explique Christel Chatelain, directrice des affaires économiques à la Chambre de commerce. «Ensuite, parce qu’il a été mis en place pour adapter les salaires aux coûts de la vie en période de plus faible inflation. Mais, lorsque cette même inflation est importante, qu’elle tend à se stabiliser à un niveau élevé comme on semble le voir aujourd’hui, il ne fonctionne plus correctement», ajoute-t-elle.


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«Quand on regarde les diverses études menées internationalement, on table ainsi sur une inflation qui se stabiliserait autour de 3% par an. Ce qui aurait pour conséquence une succession de tranches indiciaires. On risquerait alors d’en connaître régulièrement deux ou trois par an. Du coup, la situation de ces derniers mois, qui est jugée exceptionnelle, risquerait de devenir une sorte de norme.»

Une indexation, c’est un coût de 765 millions pour les entreprises

Un mécanisme qui s’avérerait particulièrement coûteux pour les entreprises, le Statec chiffrant chaque indexation à un coût dont le montant est évalué (sur la base de la masse salariale de 2022) à 965 millions d’euros, dont 765 à la charge des entreprises. «Et la perte de compétitivité qui en découle est importante, notamment dans les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre, confrontés à une concurrence étrangère», complète Christel Chatelain.

Il faut adapter le système aux enjeux planétaires et à la nécessaire évolution des modes de consommation.
Christel Chatelain

Christel Chatelaindirectrice des affaires économiques à la Chambre de commerce

C’est pourquoi la Chambre de commerce propose une évolution de ce système, «afin que celui-ci devienne davantage soutenable. Cette évolution est basée sur les trois piliers du développement durable: l’économique, le social et l’environnemental. Les trois étant cumulatifs», explique la directrice belge.

1er pilier, le pilier économique

La Chambre de commerce souhaite qu’il ne puisse pas y avoir plus d’une seule indexation par an, au maximum. «C’est une mesure qui apporterait une prévisibilité aux entreprises et sécuriserait grandement ces dernières en leur donnant de la visibilité au niveau de l’évolution du coût du travail», développe Christel Chatelain.

Qui plus est, le coût du travail au Luxembourg est déjà le deuxième plus élevé en Europe, si l’on en croit les statistiques d’Eurostat pour la dernière année disponible, à savoir 2021.

2e pilier, le pilier social

La Chambre de commerce souhaite que l’indexation de 2,5% soit intégralement versée jusque 1,5 fois le revenu mensuel médian (soit, pour l’heure, un salaire brut mensuel de 5.310 euros), avant que celle-ci ne soit plafonnée (à 2,5% de 1,5  fois le salaire médian actuel, soit 133 euros) jusqu’à quatre fois le revenu médian (14.140 euros brut).

Tous les employés qui touchent entre quatre et cinq fois le revenu médian (17.700 euros) auraient, eux, droit à une augmentation dégressive (allant de 133 à 0 euro). Tandis qu’il n’y aurait pas d’indexation pour ceux qui touchent plus de cinq fois le revenu médian.

«Ce serait un mécanisme beaucoup plus égalitaire. Le pouvoir d’achat des ménages les plus modestes serait ainsi préservé, sans que les écarts salariaux ne soient pour autant exacerbés», explique Christel Chatelain.

3e pilier, le pilier environnemental

La Chambre de commerce souhaite réformer la composition du panier qui permet de calculer l’indice des prix à la consommation (IPC). Ainsi, elle voudrait obtenir un «panier durable», en excluant de celui-ci les énergies fossiles, le tabac et l’alcool. «Afin d’adapter le système aux enjeux planétaires et à la nécessaire évolution des modes de consommation», explique Christel Chatelain. «On ne retirerait que des choses mauvaises pour la santé et l’environnement.»

À noter cependant que si elle envisage donc le retrait des énergies fossiles de l’IPC, la Chambre de commerce souhaiterait que des aides ciblées soient alors mises en place par l’État si la situation le demandait. «Parce qu’il ne faudrait pas que cela engendre une perte de pouvoir d’achat chez ceux qui n’ont, par exemple, pas d’autre choix que d’utiliser leur voiture pour aller travailler. L’objectif, ici, n’étant pas de faire peser un poids supplémentaire sur les épaules des salariés», conclut Christel Chatelain.