Amazon a racheté Whole Foods et ses 436 magasins, en grande majorité situés aux États-Unis, pour 13,7 milliards de dollars. (Photo: DR)

Amazon a racheté Whole Foods et ses 436 magasins, en grande majorité situés aux États-Unis, pour 13,7 milliards de dollars. (Photo: DR)

Alors qu’il disposait depuis 2007 d’une présence très faible dans l’industrie alimentaire après avoir lancé AmazonFresh – un service de livraison de produits frais –, le géant américain Amazon vient de passer à la vitesse supérieure en annonçant avoir racheté pour 13,7 milliards de dollars l’enseigne bio Whole Foods et ses 436 magasins répartis principalement aux États-Unis, mais également au Canada et au Royaume-Uni.

Commentant cette annonce, des analystes de la banque américaine JPMorgan Chase ont estimé qu’Amazon pourrait transformer les supermarchés Whole Foods en hubs pour donner un coup de fouet au segment des denrées alimentaires fraîches en ligne et continuer à en baisser significativement les prix.

Ne pas se laisser distancer

Selon eux, le bio cesserait alors d’être une niche, tandis que la livraison gratuite à domicile pourrait devenir la norme.

«Pour ne pas se laisser distancer, les supermarchés traditionnels vont devoir apprendre à vendre de la viande fraîche et du poisson frais à des prix bas, parce qu’Amazon est réputé pour casser les prix dans tous les secteurs qu’il a bouleversés», a encore indiqué l’un d’eux.

Au Luxembourg, l’annonce d’Amazon a fait réagir le nouveau directeur de la Confédération luxembourgeoise du commerce (CLC), Nicolas Henckes, pour lequel «cela démontre que le monde change de plus en plus vite et qu’on ne va pas échapper à des recompositions importantes du paysage des entreprises en général et du commerce en particulier».

Pari logistique

Selon lui, Amazon prend toutefois un risque important, mais qui est aussi une énorme opportunité. «Car s’ils réussissent leur coup, et que cette absorption fonctionne – ce qui n’est pas encore assuré à ce stade –, cela pourra être un fameux coup de levier pour leur plateforme logistique, puisque Amazon est avant tout une énorme machine logistique. Et pour elle, c’est un énorme pari.»

À la question de savoir si des analyses seraient en cours au Luxembourg pour anticiper de telles grandes manœuvres, Nicolas Henckes répond par la négative. «Mais ce qui se passe outre-Atlantique nous en donne un avant-goût», ajoute-t-il.

«Si cela fonctionne, on peut être sûrs que cela arrivera en Europe et que des plateformes commerciales éventuellement chinoises ou américaines tenteront le même genre d’opération chez nous», poursuit Nicolas Henckes.

Alibaba en Europe?

«Ce sera au premier qui parviendra à trouver un accord avec une grande chaîne de supermarchés. Ça va se jouer au niveau du pouvoir d’achat de ces grands groupes. Alibaba Group, par exemple, en a les moyens. Il peut effectuer une opération de la même envergure, peut-être pas sur toute l’Union européenne, mais au moins sur un grand pays européen. Amazon a, lui, financé le rachat de Whole Foods par un endettement et ne va donc peut-être pas réitérer cette opération tout de suite. À moins que le succès soit fulgurant et qu’il y ait une stratégie derrière qui soit toute prête. Je pense que c’est un coup de génie, même si c’est un coup risqué.»

Pour les entreprises et les commerçants luxembourgeois, le message est, selon le directeur de la CLC, «qu’il n’y a pas d’autre chemin ou alternative que la convergence entre les boutiques en ligne et les boutiques en dur».

«Si Amazon ne peut pas se passer de boutiques en dur, du moins pour ce qui est de l’alimentaire, nos boutiques en dur ne peuvent pas se passer d’une présence en ligne», conclut-il.