Métro fermé dans une capitale européenne fantôme. (Photo: Twitter)

Métro fermé dans une capitale européenne fantôme. (Photo: Twitter)

Les week-ends se suivent et se ressemblent un peu, sur le front de l’information et de la lutte contre la terreur aveugle. À Paris meurtrie mais Paris debout a succédé Bruxelles en état d’alerte.

Les images de la capitale, de la Belgique et de l’Europe, désertée, sans transports en commun mais avec des militaires et des blindés dans des artères barricadées, font peine à voir. C’est d’ailleurs du jamais vu… On notera, dans ce contexte de peur et de tensions extrêmes, que les opérations policières appuyées par l’armée, pour débusquer des présumés djihadistes, ont pu compter sur une sorte d’embargo total des médias et réseaux sociaux dimanche soir. Les autorités avaient demandé le respect de la discrétion absolue aux internautes médiatiques, afin de protéger le secret et l’efficacité des mouvements de troupes (qui ont abouti à une série d’interpellations) et donc éviter de signaler la présence d’intervenants en armes à tel ou tel endroit stratégique de l’opération… Et globalement, il y a eu un «silence radio» assez inédit. Bien!

Il reste que la Belgique vit dans une psychose paralysante, singulièrement concentrée sur la région bruxelloise, et que, ce lundi, l’heure est encore aux fermetures exceptionnelles, de centres commerciaux, de crèches, d’écoles tous niveaux confondus, et même de l’université libre de Bruxelles. Là encore, c’est du jamais vu.

On soulignera, entre sourire béat et contrition gênée, que les syndicats qui avaient bloqué la date pour une action de protestation sociale, en Wallonie notamment, ont maintenu leur action… Seul le pays du surréalisme pouvait vivre de l’intérieur la fermeture des niveaux d’enseignement et l’ouverture d’une grève de rue, en même temps qu’une chasse aux terroristes.

Tuer les esprits à petit feu

Mais ne rions pas à cette énième blague belge d’un goût douteux. Réjouissons-nous plutôt de ce que le Luxembourg, malgré son voisinage direct avec des pays cibles, malgré sa fin de présidence européenne, malgré les menaces globales, conserve une relative sérénité. Il y a pourtant eu des signaux, une mosquée taguée, de fausses alertes à la bombe, des bâtiments évacués, des signalements de suspects. Comme partout, là où le régime de la peur se manifeste insidieusement. C’est un des buts premiers du terrorisme, que de déstabiliser une société, de faire vaciller les certitudes, de remuer les fondements de la démocratie et des droits.

En plus de tuer aveuglément et physiquement, en usant du feu nourri des armes automatiques ou de bombes humaines, les terroristes tuent les esprits à petit feu.

Pas facile de ne pas être pris au piège. Il faut savoir que la liberté totale et la sécurité accrue ne vont pas aisément de pair. Que l’on ne peut pas à la fois réclamer des mesures de surveillance renforcées, un état d’urgence et de protection martiale, et se plaindre de contrôles aux frontières ou de limitations de la liberté de déplacement. On ne peut pas se désigner comme cible potentielle et en stigmatiser une autre.

C’est un art délicat que de préparer la guerre pour avoir la paix. Loin de la théorie du vieux James Bond qui titrait «Vivre et laisser mourir», l’enjeu aujourd’hui est peut-être, vaille que vaille, de vivre et laisser vivre.