Jean Stock (Luxe.TV) (Photo: Eric Chenal/Blitz (archives))

Jean Stock (Luxe.TV) (Photo: Eric Chenal/Blitz (archives))

Un mois, presque jour pour jour, après la faillite de DVL TV, maison mère de la chaîne de télévision luxembourgeoise Luxe.TV, Jean Stock, l’un de ses fondateurs, a officiellement signé, le 12 novembre, la convention de rachat de ses actifs, auprès de Me Yves Baden, curateur de cette faillite. Le montant de la transaction n’a pas été communiqué.

«Nous repartons de zéro et nous allons nous baser sur des recommandations stratégiques que nous ­avions formulées il y a deux ans», explique Jean Stock, désormais attelé à rebâtir un véritable projet industriel sur les ruines laissées par le précédent actionnaire majoritaire, en l’occurrence le milliardaire russe Sergueï Pougatchev, qui avait pris le contrôle de Luxe.TV au printemps 2009.

Créée en 2006 par cet ancien journaliste de RTL Télé (qui a également été très impliqué dans les aventures de M6 et de TV5), cette chaîne intégralement dédiée au luxe avait rapidement eu besoin, pour se développer à l’international, d’argent frais que les actionnaires fondateurs (essentiellement la famille Stock) n’étaient plus en mesure d’injecter. C’est là que l’homme d’affaires russe Sergueï Pougatchev, à qui l’on prêtait le «titre» de «banquier de Poutine» était entré dans la danse, via ses holdings OPK et Luxadvor. D’abord réticent, le gouvernement luxembourgeois (con­cerné par la concession de diffusion attribuée à Luxe.TV) s’était finalement laissé convaincre après la prise de participation réalisée par le Russe dans le fabricant anglais de meubles de luxe Linley, fournisseur de la Cour royale et propriété du fils de la Princesse Margareth.

Un passif provisoire de 4,3 millions d’euros

Devenu actionnaire majoritaire (à 72%), M. Pougatchev n’a pas, pour autant, insufflé le moindre élan entrepreneurial dans l’entreprise, en dépit d’un certain nombre de garanties et d’assurances apportées à la société autant qu’au gouvernement. «Une première directrice générale a été nommée, Natalya Vashko, mais elle n’est, en six mois, jamais venue au Luxembourg, indique M. Stock. Or, la présence au siège de la société des décideurs directement en charge de la gestion de la société fait partie des critères de localisation d’une chaîne, tels que définis dans la concession. Un second directeur général a ensuite été nommé, Jacques Rousseaux, qui était censé s’installer au Luxembourg. Mais ça n’a pas été le cas. Il se contentait de fréquentes visites depuis Paris, ce qui n’a pas été sans poser des problèmes pour la conduite des affaires.» Des affaires qui ont subi de plein fouet les déboires financiers de Sergueï Pougatchev, dont l’un des fleurons de son empire, la banque Mejprombank (la 30e plus importante banque d’affaires russe), est tombé en faillite en octobre dernier.

Entre-temps, cet été, un plan social avait touché 24 des 37 salariés («un plan qui n’a jamais été soumis au conseil d’administration», indique M. Stock), signe avant-coureur d’une fin imminente. Une fin finalement provoquée par la famille Stock, elle-même (via sa société Algave, actionnaire de DVL TV, alors dans l’attente du remboursement de quelque 2,6 millions sur les 3,25 millions d’euros prêtés au nouvel actionnaire majoritaire) qui a saisi le Tribunal de Commerce pour que soit constatée la situation de faillite de la société. Selon l’hebdomadaire d’Land, le passif était, début novembre, provisoirement estimé à 4,3 millions d’euros.

Jean Stock a désormais les mains libres pour relancer la chaîne selon une ligne éditoriale plus en rapport avec ses aspirations initiales. Mais cela ne se fera pas du jour au lendemain, non plus. Pour l’heure, une nouvelle structure juridique est en cours de constitution et des arbitrages sont menés, au vu de l’état des lieux. «Notre priorité sera de renouer au plus vite avec les critères d’une télévision opérée avec des professionnels, explique M. Stock. Nous souhaitons que l’offre de programmes soit plus attrayante, rentable globalement et dirigée vers de nouveaux marchés.»

Il s’agira aussi de remplir un dossier pour l’obtention d’une nouvelle concession, le gouvernement luxembourgeois ayant, lui aussi, décidé de faire table rase de l’ancienne situation et de repartir sur de nouvelles bases.

En attendant, Luxe.TV continue d’émettre a minima, avec une personne chargée d’assurer la diffusion des programmes en piochant dans le stock de plusieurs milliers de reportages (tous en haute définition) que possède la société. Un patrimoine que Jean Stock entend bien désormais capitaliser.