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 (Photo: Castegnaro-lus Laboris )

Dans cet arrêt, un salarié avait été embauché en qualité de Technico-Commercial, catégorie non-cadre, sous contrat à durée indéterminée avec une période d’essai de 6 mois débutant le 8 février 2013.

Par courrier daté du 29 mai 2013, l’employeur avait manifesté son intention de ne pas poursuivre la relation de travail avec le salarié, qui était encore a priori en période d’essai au regard des termes de son contrat de travail.

Le salarié considérant cependant que la période d’essai d’une durée de 6 mois devait être remise en cause, il saisit les juridictions du travail dans le but de faire valoir que la résiliation intervenue constituait en réalité un licenciement abusif.

Dans cette affaire, ce sont en effet les dispositions de l’article L.121-5 (2) du Code du travail prévoyant que la période d’essai ne peut être inférieure à 2 semaines, ni supérieure à 6 mois, et que par dérogation, ce maximum est à ramener à 3 mois pour le salarié dont le niveau de formation n’atteint pas celui du certificat d’aptitude technique et professionnelle de l’enseignement secondaire technique (CATP), et à étendre à 12 mois pour le salarié dont le salaire atteint un certain montant, qui étaient en discussion.

Sur base de cet article, le salarié arguait qu’une période d’essai de 6 mois ne pouvait lui être opposable eu égard à son niveau de formation inférieur à celui du CATP, alors que l’employeur estimait au contraire que les fonctions de Technico-Commercial occupées par le salarié permettaient de déduire qu’il disposait d’un niveau atteignant celui du CATP.

Obligation de l’employeur de s’informer sur la formation effective du salarié

Dans ce contexte, la Cour d’appel rappelle qu’il appartient à l’employeur qui engage un salarié et entend lui imposer une période d’essai de s’informer utilement sur la formation de ce dernier.1

À cet égard, la Cour précise que l’employeur doit s’assurer de la formation effective du salarié pour fixer la durée de la période d’essai, et qu’il n’est pas possible de simplement se référer à la nature de l’emploi offert.

Aussi, la Cour n’a pas fait droit à l’argument de l’employeur relatif au fait que la fonction de Technico-Commercial, supposait au moins la détention d’un niveau BEPC, sinon baccalauréat, voire un BTS (diplômes français), de sorte qu’il pouvait en être déduit que le salarié disposait d’un niveau atteignant celui du CATP.

Elle justifie sa position par le fait que les dispositions sur la période d’essai pour le cas du salarié dont le niveau de formation n’atteint pas celui du CATP visent à protéger les salariés qui ne possèdent pas un niveau de formation élevé contre l’incertitude qui peut exister au niveau de l’emploi.

Prise en compte d’une expérience professionnelle équivalente?

Dans cette affaire, au regard des faits de l’espèce, la Cour ne se prononce pas sur le fait de savoir si une expérience professionnelle équivalente du salarié aurait pu être prise en compte pour l’appréciation de la validité de la durée de la période d’essai.

Cependant, cela devrait en principe être possible si le salarié justifie d’une pratique professionnelle de 10 ans dans la profession en question, dès lors qu’il a déjà été retenu2 qu’une période d’essai de 6 mois pouvait s’appliquer, même en l’absence de détention d’un CATP ou diplôme équivalent par le salarié, du fait que celui-ci justifiait d’une expérience professionnelle de 10 ans3.

Réfaction de la clause relative à la période d’essai en cas de durée non conforme

Dans cet arrêt, étant donné que les éléments du dossier ne permettaient pas de retenir que le salarié disposait d’un CATP ou d’une formation étrangère justifiée par un certificat d’équivalence, et dès lors que l’employeur n’avait pas été en mesure de justifier l’application d’une période d’essai de 6 mois telle que fixée dans le contrat de travail, la Cour a jugé que la clause relative à la période d’essai était «nulle pour la période excédant la durée de trois mois».

De ce fait, il apparaissait que la résiliation du contrat de travail était in fine intervenue à un moment où le contrat de travail était devenu définitif.

Les dispositions légales relatives au licenciement d’un salarié sous contrat à durée indéterminée devenu définitif devaient ainsi trouver à s’appliquer, à savoir en l’espèce, respecter un préavis de 2 mois et justifier de motifs précis, réels et sérieux à la base du licenciement.

Dans cette affaire, en l’absence du respect du préavis légal par l’employeur et en raison de l’imprécision des motifs invoqués dans la lettre de licenciement, le salarié a obtenu le paiement par l’employeur d’une indemnité compensatoire de préavis (égale au montant restant dû à ce titre), et de dommages et intérêts (limités en l’espèce).

Cour d’appel, 29 mars 2018, n°42659

1 Par exemple, Cour d’appel, 15 février 2007, n°31187
2 Cour d’appel, 21 décembre 2006, n°31194
La référence à une durée de 10 ans s’explique par la mise en perspective de l’article L. 121-5 sur la période d’essai et de l’article L. 222-4 sur les salariés qualifiés.

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