Dr Marc Schiltz, 46 ans, est secrétaire général du FNR depuis 2011. (Photo: Luc Deflorenne)

Dr Marc Schiltz, 46 ans, est secrétaire général du FNR depuis 2011. (Photo: Luc Deflorenne)

Au début des années 2000, les CRP Lippmann et Tudor prenaient peu à peu de la consistance, le FNR (créé en 1999) développait ses premières initiatives, la recherche publique germait sur un terrain en friche. «Là où d’autres pays ont eu des décennies voire des siècles pour mettre en place leur secteur public de recherche et d’innovation, le Luxembourg a dû mettre les bouchées doubles pour combler le retard», explique le Dr Marc Schiltz, secrétaire général du FNR. En l’espace d’une décennie, le budget de l’État alloué à la recherche a été multiplié par 10. «Aujourd’hui, nous nous trouvons à un moment charnière tant pour la recherche publique que pour la recherche en général. Nous avons atteint un niveau de maturité qui nous impose de nouvelles responsabilités, mais aussi qui nous ouvre le chemin vers de nombreuses et attrayantes perspectives.»

Les dispositifs réglementaires ont été adaptés et rénovés, les conseils d’administration ont été renouvelés, de nouvelles têtes chapeautent les organigrammes (Gabriel Crean à la tête du List, Rainer Klump, recteur depuis un an de l’Université du Luxembourg), la fusion des CRP Tudor et Lippmann a permis d’atteindre une masse critique de chercheurs (le List compte entre 600 et 700 scientifiques) et, last but not least, «il y a le site de Belval que beaucoup de visiteurs étrangers nous envient». L’écosystème devient biotope...

50/50

La recherche publique a donc bien négocié son premier virage et, déjà, certaines de ses compétences passent les frontières et s’affirment dans l’environnement européen, notamment pour ce qui concerne les domaines de l’ICT et de la biomédecine systémique.

Quant à la recherche privée, la situation est moins réjouissante, «car l’on constate une diminution des investissements privés dans le domaine de la recherche et de l’innovation depuis 2012», explique le Dr Marc Schiltz. «Les chiffres sont toutefois à relativiser, car si la crise a effectivement laissé des traces, il faut savoir qu’un facteur purement technique a également joué, à savoir la modification du mode de calcul. Par ailleurs, certains signes laissent augurer que les investissements repartent lentement à la hausse.»

Aujourd’hui, l’équivalent de 1,4% du PIB du Luxembourg est investi dans la recherche, chiffre stable depuis quelques années. «Mais la part de la recherche publique est plus importante et compense la baisse des investissements dans le privé. Aujourd’hui, la répartition est de 50/50.»

Un rapport Eurostat, publié en 2012, mettait notamment en exergue qu’au Grand-Duché, beaucoup d’entrepreneurs regrettaient le manque de partenariats entre le public et le privé, vu comme la difficulté majeure en matière de développement de leur département de recherche. «Cette année, un rapport de l’OCDE publié en avril formule comme recommandations principales de développer une vision stratégique générale, d’une part, et de favoriser le travail en synergie des acteurs privés et publics, d’autre part. Voici les axes de travail qui vont permettre au secteur de se développer et sur lesquels nous travaillons déjà, en concertation notamment avec le ministère de l’Économie, afin de développer une programmation conjointe, pour soutenir de grands projets de recherche entre des entreprises et des acteurs de la recherche publique.» Les synergies existent et le centre SnT (Security, Reliability and Trust) est révélateur de cette tendance, car après cinq années d’existence, il comptabilise une vingtaine de partenariats avec des entreprises situées sur le territoire luxembourgeois. C’est aussi un des objectifs que s’est fixés le List. Des pistes de réflexion et d’action sont à l’ordre du jour et devraient, à terme, multiplier les opportunités de synergies.

«Nous avons une université, une recherche scientifique, des infrastructures modernes ; tout ceci est gratifiant pour l’image de marque du pays. Oui, mais nous devons maintenant mettre en place une stratégie de développement économique qui tienne compte de nos spécificités.» La taille du pays en est une: «Nous ne pouvons pas nous permettre de faire du saupoudrage. Il nous faut faire des choix, développer une vision cohérente et globale et réfléchir sur les secteurs d’avenir vers lesquels orienter notre politique de recherche.»