L’avocat Marc Thewes va succéder, sur le ticket du CSV, au fiscaliste et ancien associé de KPMG Roger Molitor (démissionnaire) comme conseiller d’État pour un mandat fixé actuellement à 15 ans.
Cette nomination par le gouvernement est une reconnaissance, bien que tardive, pour l’avocat qui avait planché et présenté début janvier, avec le spécialiste de la communication Marc Glesener, sur l’audit du parti chrétien social et ses pistes de réforme. C'est d'ailleurs à lui que Marc Spautz et Laurent Zeimet, le président et le secrétaire général du CSV, penseront spontanément pour réaliser l'audit.
Diplômé de l'Université catholique de Louvain et de la London School of Economics, avocat brillant, surtout réputé dans le contentieux, il est entré au Barreau en 1991 et s’est associé en 1995 à Pierre Reuter pour former l’étude qui porte leurs deux noms. Marc Thewes a été assistant du célèbre professeur de droit constitutionnel en Belgique, Francis Delpérée, qu'il fit d'ailleurs venir au Luxembourg.
Activité éditoriale débordante
Sur le plan académique et éditorial, Marc Thewes a une activité débordante. Il est notamment le co-fondateur des Annales du droit luxembourgeois, le rédacteur en chef du Journal des tribunaux Luxembourg et il est membre du comité de rédaction du Bulletin d'information sur la jurisprudence publié par la Conférence du Jeune Barreau.
Il a longtemps commenté des décisions sur son blog, mais son activité éditoriale sur la toile avait baissé en cadence depuis un an, sans doute parce qu'il a consacré beaucoup de temps à l'audit.
Politiquement parlant, à part sa carte au CSV qu'il a toujours gardée, il est assez difficile à situer dans un des courants qui animent la principale formation de l’opposition. «C’est un homme qu’on a du mal à cerner politiquement», assure un observateur de la scène politique luxembourgeoise. «Il est au-dessus des courants et il n'était plus un homme du parti, bien qu'il le soit redevenu un peu avec la publication du rapport», analyse un second observateur.
Il faisait peur à la nomenklatura
Son arrivée au Conseil d'État est une résurrection pour un homme qui a contribué, dans l'ombre, à faire évoluer les mentalités chez les conservateurs et qui a été un de ceux qui ont poussé l'ancien Premier ministre Jean-Claude Juncker à inscrire la légalisation du mariage pour tous dans son programme de gouvernement (sa reconnaissance interviendra sous le gouvernement de Xavier Bettel). Pour autant, la génération des Juncker, François Biltgen et même Marc Spautz ne l'appréciait pas. «Il faisait peur à la nomenklatura, sans doute parce qu'il est brillant et qu'il est un grand intellectuel», fait remarquer l'un de ses proches.
La carrière politique de Marc Thewes a démarré à la fin des années 1980 et s'est brûtalement interrompue au millieu des années 1990. Il sera secrétaire général de la jeunesse chrétienne sociale et fera même partie du comité national du parti. Il se présentera aux élections communales de la Ville de Luxembourg en 1993, mais son côté très intello lui vaudra un assez mauvais score. «Il s'est rendu compte qu'il ne pourrait pas faire carrière sous Juncker, du coup il s'est consacré à 100% au droit», poursuit notre observateur.
Le départ de Jean-Claude Juncker de l'arène politique locale pour aller à la Commission européenne, a permis à l'avocat de faire son retour. Marc Spautz et Laurent Zeimet seraient allés le repêcher et lui redemander du service pour les aider à repenser la stratégie du parti, repoussé dans l'opposition pour la première fois depuis 30 ans.
Par ailleurs, et en raison des départs des conseillers d’État s’annonçant encore cette année, il y aura encore de la place pour un homme ou une femme du sérail chrétien social. L’ancien ministre et actuel député CSV Michel Wolter, aux antipodes d'un Marc Thewes, rêverait aussi de rejoindre l’équipe des Sages. Mais il lui faudra pour cela convaincre le gouvernement bleu, rouge et vert de lui donner le blanc seing. Ce qui n’est pas gagné d’avance.