L'étude TNS-ILRES révèle que 27,1% des lecteurs de L'essentiel ne lisent aucun autre quotidien. (Photo:Luc Deflorenne)

L'étude TNS-ILRES révèle que 27,1% des lecteurs de L'essentiel ne lisent aucun autre quotidien. (Photo:Luc Deflorenne)

Editpress a confié à TNS-ILRES une étude sur le lectorat de L'essentiel. Il en ressort que le journal gratuit, coédité par le groupe de presse eschois, devance largement son concurrent Point24. L’essentiel détrônerait même le leader historique de la presse quotidienne luxembourgeoise, le Luxembourger Wort, auprès des 15-34 ans. Léon Zeches, administrateur délégué et directeur général de Saint-Paul Luxembourg (éditeur du d’Wort et de Point24), dénonce «la confusion» engendrée par la publication de ces résultats.

Selon M. Zeches, les chiffres communiqués en début de semaine (lire ICI) par L’essentiel, (édité par Edita, société détenue à parts égales par Editpress et le groupe suisse Tamédia), sont trop précoces pour donner une image réelle de la nouvelle donne médiatique depuis l’arrivée des gratuits, à l’automne dernier. Il faudra donc attendre juillet et l’étude commune de marché, co-financée par les éditeurs et le gouvernement, pour y voir plus clair, estime le directeur général de Saint-Paul, qui concède toutefois que «des différences» pourraient apparaître entre les deux gratuits concurrents, mais «sans commune mesure avec celles avancées par le communiqué».

M. Zeches, quel est votre sentiment général à la lecture des résultats de L’essentiel?

«Une grande confusion dans la publication de telles performances, car ces chiffres de lectorat sont d'une part imprécis: on ne sait pas s'il s'agit de lectorat global ou maximum du support en question, ou s'il s'agit du niveau d'audience par numéro moyen des quotidiens gratuits.

Confusion également dans la manière de publier ces résultats: l'étude en question (TNS-ILRES) est une étude privée commandée par l'éditeur et n'a rien à voir  avec l'étude media commune qui porte le titre de "TNS-ILRES PLURIMEDIA 2007-2008": la différence d'intitulé est effectivement mince; (cette) confusion (est) en outre entretenue par une référence à l'étude de l'an dernier "TNS-ILRES PLURIMEDIA 2006-2007".

(Un sentiment d’) imprécision sur la méthodologie: on ne sait pas comment elle a été réalisée, quels médias ont été scrutés. Est-ce que l'étude répond à un effort de promotion spécifique au profit de L'essentiel sur la période d'enquête du 15 au 28 janvier? Evidemment, dans ces conditions, les performances peuvent se révéler tout à fait favorables au média concerné.

L'étude commune au marché (à laquelle participe d'ailleurs le groupe Editpress) ne sera disponible qu'en juillet prochain: elle porte sur une période beaucoup plus large de neuf mois et scrute la consommation média typographique et électronique de l'ensemble de la population résidente adulte (15+) au travers d'un échantillon représentatif de 3.000 personnes interviewées: cela donne une image beaucoup plus neutre et globale de la consommation media sur l'ensemble des résidents adultes et pas uniquement sur une cible et période aussi partielles.

En conclusion, la confusion entretenue autour de cette publication qui consiste bien plus en un document marketing à vue partielle, est davantage destinée à l'adresse des annonceurs publicitaires qui seraient bien inspirés de demander des précisions sur ces points et de faire preuve d'esprit critique. Les comparaisons assez sélectives avec le Luxemburger Wort, qui conserve toutefois sa position de leader de la presse quotidienne sur l'ensemble de la population, passent néanmoins sous silence la position de L 'essentiel vis-à-vis du tageblatt; aucun mot non plus vis-à-vis du Quotidien ou du Jeudi (ces derniers titres étant édités par Editpress, ndlr.): l'optique de ce communiqué est très dirigée - et donc peu objective, contrairement à la publication des performances de l'étude commune qui reprend la consommation de quelque 200 médias au total.

Les résultats de Point24 correspondent-ils aux objectifs assignés?

«Oui, tant en termes commerciaux que de lectorat. Nous disposons toutefois déjà de premiers résultats partiels de la première vague de l'étude commune TNS PLURIMEDIA 2008 (tout comme les autres co-contractants à l'étude soit Editpress, RTL et le gouvernement); mais ces résultats sont encore bruts et non pondérés et le cahier des charges stipule de ne procéder à aucune communication avant la publication officielle de juillet 2008, ce que nous respectons vis-à-vis de nos partenaires.

Ce que je peux affirmer, c'est que, s'il existe des différences, elles sont sans commune mesure avec celles avancées par le communiqué d'Edita, et pas toujours à l'avantage de l'Essentiel.

Il vaut donc mieux s'armer de patience jusqu'à obtenir une vue d'ensemble plus neutre et globale, notamment sur l'ensemble de la population.  En termes commerciaux, la naissance de Point24 a indéniablement été porteuse de croisssance du chiffre d'affaires de la presse quotidienne de notre groupe, généré en novembre et décembre 2007.

Ces chiffres défavorables à Point24 sont-ils susceptibles de conduire à une refonte éditoriale pour le titre? A des modifications en matière de diffusion, de politique commerciale?

«Non, ces chiffres, de par leur caractère partiel et partial, n'influencent en aucune manière notre vision de la situation des journaux francophones dans leur ensemble, en vous rappelant que, dans le domaine des journaux d'expression francophone, outre les deux journaux gratuits, il existe également deux journaux payants et un journal hebdomadaire que le communiqué d'Edita passe sous silence. Le passé nous enseigne que les mouvements en matière de médias sont des phénomènes relativement lents en matière d'évolution, notamment dans un pays à facettes multiculturelles si variées, et hors de tout contexte promotionnel peuvent révéler des tendances surprenantes.

Est-il d’ores et déjà possible de mesurer un quelconque impact des gratuits sur les autres titres de votre groupe (en terme de lectorat, recettes publicitaires, etc.)?

«En l'état actuel, il est encore trop tôt pour tirer des conclusions tangibles, car nous ne disposons pas encore des duplications entre les titres francophones d'une part et des duplications entre l'ensemble des titres d'autre part. En outre, je vous rappelle que, tant pour des raisons méthodologiques que budgétaires, l'étude TNS PLURIMEDIA 2008 n'est pas encore en mesure d'évaluer le niveau de consommation des médias sur la cible frontalière. Quant aux recettes, il est indéniable que la naissance de Point24 n'a pas empiété sur les revenus de nos deux autres quotidiens; la pige publicitaire en sera un témoignage quand elle sera disponible. Je vous rappelle que l'introduction de Metro en Belgique n'a pas entaché l'audience des quotidiens traditionnels.

En marge de ces résultats, que répondez-vous aux personnes qui accusent les éditeurs de gratuits et les responsables communaux d’avoir gravement porté atteinte à la qualité du paysage urbain avec les boîtes de distribution?

«Si la polémique au sujet des 50 emplacements d'affichage supplémentaires (MUPI)  en relation avec la mise en place d'un service de vélos à la demande n'avait pas eu cours, on n'aurait jamais parlé des boîtes de distribution, qui ne présentent aucun caractère de dangerosité au niveau de la mobilité des personnes».