La société de Bissen, spécialisée dans la fabrication de produits de lavage et d’entretien pour le matériel roulant, a intégré le projet RIFE 2 pour mettre en place un système de management environnemental simplifié.
C’est une PME comme il en existe des milliers, qui a poussé tel un arbrisseau planté dans un bon terreau. La société L.C.I. – plus connue sous le nom de sa marque phare, Flowey – a connu une croissance remarquable depuis sa création, il y a 22 ans. Avec une accélération sensible depuis 2005, lorsque les deux associés-fondateurs, Filipp Florio et Simon Weynachter, ont eu l’idée de fertiliser leur pousse avec un engrais très naturel. « Nous avons alors décidé de fabriquer une gamme de produits sur base de matières premières d’origine végétale », raconte M. Weynachter.
Pour mener à bien ce challenge, les dirigeants de Flowey ont enclenché le turbo. « Depuis cinq ans, nous investissons 4,5 % de notre chiffre d’affaires (qui s’élève à 8 millions d’euros selon les chiffres de la Chambre de Commerce) dans notre département de recherche-développement », indique M. Florio. Le service va d’ailleurs passer prochainement de trois à quatre personnes.
La PME industrielle, qui emploie une cinquantaine de salariés au total, fabrique des nettoyants pour voitures, mais aussi des produits pour les camions et motos, ainsi que pour l’entretien des pièces (cuir, jantes, etc.). Elle conçoit également des accessoires et des produits pour le nettoyage des voitures dans les carwash. La plus large partie de sa gamme est commercialisée sous sa propre marque, Flowey, dans 25 pays, mais l’entreprise de Bissen a également signé des contrats exclusifs avec des constructeurs prestigieux tels que Ducati, Ferrari ou Abarth (département « sport » du groupe Fiat), pour des produits de lavage et d’entretien. 10 % du chiffre d’affaires sont ainsi réalisés par le biais des private labels.
Mais ce qui dope essentiellement le chiffre d’affaires de L.C.I. et donne du retentissement à sa marque, ce sont les innovations en matière de produits « verts » et son positionnement d’entreprise « écologique ». Comme toute entreprise chimique, la nouvelle usine de production, inaugurée en 2009 avec un investissement de 4,5 millions d’euros, respecte un cahier des charges très strict – dans le cadre du commodo-incommodo – pour empêcher toute pollution accidentelle. Mais ses concepteurs sont allés plus loin. « Les murs sont en pierre volcanique et nous envisageons l’installation de panneaux solaires sur la toiture, indique M. Weynachter. L’usine dispose en outre d’un système de récupération des eaux de pluie, qui sont filtrées puis utilisées dans la fabrication des détergents. Une production qui respecte l’environnement et qui en plus utilise des ingrédients d’origine naturelle, c’est un véritable atout en terme d’image de marque. »
80 % de produits « verts »
La gamme verte de Flowey, « Evo Pur », prend de l’ampleur et représente aujourd’hui près de 80 % du volume des marchandises qui sortent des ateliers, soit 30 tonnes par jour. « Nous avons réussi notre challenge de maintenir les prix entre notre ancienne et notre nouvelle gamme, alors même que le surcoût des matières premières d’origine végétale représente 20 %, souligne M. Florio. Grâce à nos efforts de R&D, nous parvenons à mettre au point des produits aussi efficaces avec des formulations moins concentrées », précise M. Weynachter.
Très au fait des réglementations et particulièrement enclin à favoriser l’essor de sa gamme « verte », Simon Weynachter a rencontré les ingénieurs-techniciens du CRP Henri Tudor lors d’une formation à la Chambre de Commerce. Il a alors découvert le projet RIFE 2. Le responsable du service R&D et du service Environnement, Vincent Podorieszack, s’est lancé dans l’aventure. « Flowey avait postulé sur les trois axes et a été retenu pour deux, la mise en place d’un système de management de l’environnement, ou SME, et l’utilisation rationnelle de l’eau, explique le chimiste. Dans les petites entreprises, rien n’est véritablement adapté aux démarches environnementales. Nous avons donc opté pour la méthode simplifiée, EMAS Easy. Sans RIFE 2, je n’aurais pas été capable de mettre un SME en place. J’ai suivi beaucoup de formations qui m’ont aidé à définir les outils spécifiques dont notre PME avait besoin. »
Nul besoin en effet, pour un SME, de faire de son site de production une véritable usine à gaz ! La méthode EMAS Easy, particulièrement adaptée aux petites structures, présente également d’autres atouts, selon ses utilisateurs : « Elle nous a permis de financer notre EMAS pour une somme 10 fois inférieure à ce que cela nous aurait coûté en passant par un cabinet de consultance privé », assure M. Podorieszack.
« Outre cet avantage financier, la méthode nous permet de mieux maîtriser notre outil, avec nos ressources internes, plutôt que de devoir faire appel à des compétences externes », complète M. Weynachter. Mais si la méthode est très séduisante, elle n’est pas pour autant une assurance complète : « Il faut que le chef d’entreprise accompagne fortement son chargé de projet. Qu’il en fasse une priorité, avec un engagement complet. Ce ne peut être un petit exercice de style ! Tout le monde dans l’entreprise doit se sentir concerné, car chacun a des tâches à réaliser, à son niveau, au sein du SME », avertit le dirigeant.
Grâce aux cours spécifiques suivis par le responsable R&D et Environnement, l’entreprise est en bonne voie pour obtenir la certification environnementale, correspondant à la norme ISO 14001. « Nous espérons l’obtenir au 2e ou au 3e trimestre de cette année », indique M. Podorieszack. Et comme dans l’histoire d’une PME, rien n’est linéaire, Flowey s’attèlera ensuite à obtenir la certification ISO 9001 (qualité). Une toute autre affaire, bien plus lourde à gérer, mais qui devrait être facilitée par les outils mis en place dans le cadre de la précédente certification.
Des gages de développement du marché ? « La certification ISO 14001 devraient nous aider à obtenir de nouveaux labels verts, effectivement », explique M. Weynachter. Mais il tempère aussitôt, en assurant que Flowey ne fait pas la course aux labels. Pas même l’Ecolabel de l’UE, qui gagne peu à peu la confiance des consommateurs ? « L’Ecolabel européen ne se prête pas aux produits pour automobiles, ils ne rentrent dans aucune des catégories existantes. D’une manière générale, les produits professionnels sont difficilement ‘ éco-labellisables ’, précise M. Podorieszack. Il existe une confusion énorme sur les labels. Pour avoir l’Ecolabel, les ingrédients doivent avoir un certain degré de biodégradabilité et de toxicité sur l’environnement, mais il n’y a aucun critère sur l’origine des produits. Or, à quel niveau se situe l’impact le plus préjudiciable sur l’environnement ? », interroge le chimiste. Pour Simon Weynachter, l’avenir se dessine en termes d’hybrid generation : « Nous devons avoir un dialogue juste et honnête avec nos clients et les consommateurs. En matière d’écologie, nous ne sommes pas dans un monde binaire. Nous ne pouvons produire des détergents 100 % naturels. Il faut une étape de transformation, avec quelques éléments de synthèse », explique-t-il. Pour le dirigeant de Flowey, le « 100 % bio » ne peut s’inscrire dans le viseur.
Hybrid generation
Mais une production respectueuse de l’environnement, oui. « Nous avons pris le parti de fabriquer des produits les moins toxiques possibles et dans leur formulation, naturellement renouvelables, avec des concentrations les moins élevées possibles », souligne-t-il. Après l’expérience RIFE 2, totalement réussie, Flowey ne ralentit pas le pas. « Il y a trois facettes dans une politique verte : les écolabels, les certifications ISO du site et l’éco-conception, c’est-à-dire l’analyse des cycles de vie d’un produit. Il faut des outils que nous n’avons pas pour quantifier ces projets. Nous allons donc nous engager, toujours avec le CRP Henri Tudor, dans le programme européen FEDER ‘ Éco-conception : passez à l’acte ’ », indiquent les deux associés de L.C.I. – Flowey.
Pour ces entrepreneurs, actifs depuis plus de deux décennies dans le pays, il n’y a qu’une seule façon pour leurs produits « made in Luxembourg » de se maintenir dans le top 3 du marché européen : se démarquer.