La Belgique est numéro un au hit-parade européen des meilleurs emplacements pour les entreprises de logistique. C’est ce qu’il ressort d’une étude réalisée par Cushman & Wakefield Healey & Baker, la bible de la localisation logistique dans le monde. Ce rapport tient compte des coûts, de l’accessibilité et de l’immobilier. Selon cette étude, la Belgique bénéficie notamment de ses prix locatifs bas, de sa position stratégique et d’un accès optimal aux plus importants marchés européens. Dominant le classement depuis 2003, elle est talonnée par la France, bien placée en raison des prix immobiliers de certaines régions, et par les Pays-Bas, plus concurrentiels sur le plan des coûts.
Anvers et Liège en vogue
Incontournable, le port d’Anvers est le 2e port maritime d’Europe derrière Rotterdam et le 4e du monde. Les deux tiers du trafic maritime sont assurés par le 1er port belge. Depuis près de 20 ans, il est accessible aux navires avec des cargaisons allant jusqu’à 160.000 tonnes. En 2005, il a traité plus de 160 millions de tonnes de trafic de marchandises maritimes. En 2006, le tonnage était de 167 millions et, en 2007, de 183 millions, soit une croissance de 30% en deux ans.
Le vrac (pétrole, minerais, charbons, etc.) constitue 38% de ce tonnage, les marchandises diverses (conteneurs, fers et aciers, produits chi-miques, papier, etc.), 62%. Chaque année, plus de 15.000 navires maritimes, en plus de 64.000 bateaux fluviaux, y abordent et chaque semaine, des navires partent vers 325 destinations.
Le port d’Anvers abrite également la deuxième concentration d’industries pétrochimiques au monde. Plus de 140.000 personnes gagnent leur vie d’une manière ou d’une autre grâce à lui. Celui-ci est indispensable pour l’importation et l’exportation de l’Union Européenne et représente la plaque tournante pour beaucoup d’activités commerciales mondiales. Le trafic en conteneurs, surtout, connaît une croissance explosive, avec un accroissement annuel de dix à 15%. Les conteneurs représentent plus des quatre dixièmes du trafic maritime d’Anvers.
Plusieurs faits expliquent le développement du port. Sa situation est centrale par rapport à son arrière-pays en Europe occidentale. Son accessibilité maritime est sans cesse améliorée grâce à la construction d’écluses toujours plus modernes. De nouveaux bassins sont aménagés et le port a été étendu sur la rive gauche. La superficie des terrains destinés à l’industrie a augmenté.
Le port est, en outre, doté d’un outillage et d’une infrastructure hautement spécialisés pour répondre aux techniques modernes comme la conteneurisation et le transroulage. Il est réputé pour la qualité de ses services, sa grande productivité et le nombre de lignes régulières. Les diverses fonctions portuaires ont été renforcées: transbordement, stockage, distribution, commerce ou productions industrielles. Il est, sans conteste, le moteur de la région anversoise. Il contribue à l’essor d’une agglomération considérée comme le centre économique de la région flamande.
Côté wallon, en 2007, le Port autonome de Liège (PAL) a battu son record absolu. Il a, en effet, enregistré une hausse de près de 10% par rapport à 2006, ce qui porte le tonnage à plus de 15 millions. Le trafic global (tous modes de transport confondus, wagons, camions, bateaux), a, quant à lui, connu une augmentation de 6%, soit plus de 21 millions de tonnes. Ces performances font du PAL le premier port intérieur belge et le troisième port européen, derrière Duisbourg et Paris.
Autre satisfaction concernant le trafic fluvial: près de 11.000 bateaux ont utilisé les infrastructures du port, soit une moyenne journalière de 30 bateaux. Enfin, dans le cadre du programme FEDER (Fonds Européen de Développement Régional), des aménagements ont été entrepris dans plusieurs zones portuaires.Entreprise publique, le Port de Liège assure la gestion de 31 zones portuaires. Au total, 366 hectares sont mis à disposition des utilisateurs de la voie d’eau, les entreprises privées et publiques. Certaines matières transportées ont connu une belle augmentation. C’est le cas des matériaux de construction (+ 12%), des minerais (+ 13%) et des combustibles solides (+ 40%). D’autres ont subi des reculs importants: les produits agricoles (19%), les produits chimiques (- 18%), les produits pétroliers (7%) et les produits métallurgiques (4%).
Les projets phares du port de Liège sont destinés à accueillir les plus grands centres de distribution européens avec, notamment, la construction de la plate-forme multimodale Liège Trilogiport. Acquis par la Région wallonne, les terrains seront équipés grâce aux Fonds européens dans le cadre de l’Objectif 2.
«L’intégration logistique offre aussi des chances uniques de développer une ‘Logistics Valley’ d’envergure européenne le long de l’axe Anvers – Liège et de créer un partenariat maritime/logistique entre les deux ports», souligne Emile-Louis Bertrand, directeur général du Port de Liège. Ces projets sont soutenus par des partenariats avec d’autres ports, particulièrement le port d’Anvers. Les travaux commenceront durant le troisième trimestre 2008 pour s’achever en 2010.
Depuis très longtemps, les ports d’Anvers et de Liège entretiennent d’excellentes relations politiques et économiques. Ce lien historique résulte d’une synergie économique très ancienne entre les deux villes, l’une au nord, l’autre au sud du pays. S’y ajoute une excellente coordination entre la logistique maritime à Anvers et l’industrie métallurgique à Liège.
Les récentes péripéties de la sidérurgie liégeoise, même si elles sont temporairement résolues, ont incité les deux villes à saisir au bond l’opportunité des développements de la logistique à l’échelon mondial. L’objectif est simple: assurer une logistique de distribution fluide en aval du déchargement portuaire via une excellente collaboration entre les ports anversois et liégeois. Les deux ports entendent réduire la facture logistique pour les entreprises actives et futures.
Dans le cadre du Groupement d’Intérêt Economique relatif au développement et à la commercialisation du Trilogiport, les responsables des deux ports, Marc Van Peel, président de l’Autorité portuaire d’Anvers et échevin d’Anvers, et Willy Demeyer, président du Port autonome de Liège et bourgmestre de Liège, ont décidé de faire ensemble la promotion de la future plate-forme logistique située à seulement 14 heures de navigation du port d’Anvers.
Liege Airport, le cargo d’abord
Liege Airport est le premier aéroport européen à avoir bâti sa stratégie en priorité sur le full cargo. Une stratégie payante puisqu’il figure dans le top 10 des aéroports européens pour ce domaine. Il faut dire qu’il possède plusieurs atouts, dont celui d’être situé dans le triangle Amsterdam – Paris – Francfort.
L’aéroport liégeois enregistre la quatrième croissance mondiale après les aéroports cargo des Etats-Unis, de la Chine et du Japon et l’activité cargo y représente environ les trois quarts du chiffre d’affaires. Le fret aérien de toutes natures y est traité, même des chevaux de course!
Les utilisateurs de l’activité cargo liégeoise comptent parmi les opérateurs les plus importants sur le marché du fret aérien. Plusieurs compagnies majeures y ont implanté leur hub européen. Et d’abord, TNT (Thomas Nationwide Transport), société de courrier et colis express qui assure une rotation quotidienne à Liège d’une quarantaine d’avions pour les quatre coins du monde.
Les dimensions de son centre de tri, fréquenté tous les jours par plus de 125 camions et camionnettes, sont énormes: le bâtiment couvre, sur deux niveaux, une superficie totale équivalente à quatre terrains de football et pas moins de 1.300 personnes y travaillent.
La société a déjà commencé à doubler ses installations et assure, en plus, plusieurs vols par semaine entre Liège et Shanghai. Liege Airport accueille aussi d’autres acteurs logistiques et compagnies aériennes qui ont «pignon sur tarmac» comme Cargo Airlines, Kalitta, El Al et Icelandair. Les deux pistes permettent d’accueillir les porteurs en toute sécurité. Le système d’atterrissage aux instruments permet aux avions d’être guidés et d’atterrir de manière automatique la nuit et, principalement, lorsque la visibilité est réduite à zéro.
Pour la manutention, Liege Airport a constitué une nouvelle filiale, dénommée LHS (Liege Handling Services), qui occupe déjà le nouveau hall de fret. Avec un capital de deux millions d’euros, cette société investit dans l’équipement nécessaire pour traiter tous types d’avions.
Grâce au caractère de proximité de la zone cargo, de nombreuses entreprises s’installent en région liégeoise. L’impact de l’aéroport sur l’économie wallonne est de plus de 5.000 emplois directs et indirects. Enfin, son développement fait naître des projets dans certains secteurs très ciblés, comme celui de la création d’un centre de bio-logistique européen qui réunira des acteurs actifs dans le bio-pharmaceutique.
TGV Fret, un grand défi
Liege Airport est à l’origine de la réflexion sur un TGV Fret avec son partenaire ADP (Aéroports de Paris). Cet Euro Carex (Cargo Rail Ex-press) placera le rail au service du fret express. Une association, Roissy Carex, dont Liege Airport est membre, a été constituée avec des partenaires publics et privés. Une étude de faisabilité a confirmé le potentiel des intégrateurs, essentiellement de TNT. Elle a également testé la sensibilité de nouveaux utilisateurs du transport routier à ce concept innovant. Elle a surtout permis d’identifier la meilleure localisation pour le terminal TGV Fret, à proximité de Liege Airport et de la ligne de chemin de fer Paris-Bruxelles-Cologne. Elle sera reliée à différentes plates-formes telles que Paris, Londres, Amsterdam ou Francfort.
L’analyse financière a permis d’affiner les coûts d’investissement et de fonctionnement. «L’association Liège Carex aura pour mission d’œuvrer à la concrétisation du projet pour son implantation en Wallonie, de contribuer à l’action de la société Euro Carex et de promouvoir ce nouveau concept auprès des acteurs économiques actifs dans la logistique, explique Luc Partoune, directeur général de Liege Airport. Pour l’aéroport liégeois, le réseau TGV Fret sera un atout de plus pour attirer de nouveaux trafics et générer des activités de logistique supplémentaires, voire de conditionnement et d’assemblage, et donc de l’emploi».
Actuellement, de grands constructeurs étudient la configuration de rames spécifiques permettant le transport de conteneurs compatibles avec l’aérien et le routier. Les prin-cipaux utilisateurs de départ seront les inté-grateurs de courrier express. Ils y trouveront une alternative à l’avion sur des distances de cinq à 600 km. Ils pourront ainsi faire face aux contraintes grandissantes qui pèsent sur le secteur aérien. Le raisonnement vaut également pour le transport routier qui y trouvera son intérêt pour des distances supérieures à 1.000 km.
Euro Carex va travailler à la recherche de fonds d’investissement européens et de partenaires ou sous-traitants pour l’investissement dans les terminaux TGV Fret, l’acquisition et l’exploitation du matériel, ainsi que pour la commercialisation de cette nouvelle inter-modalité. L’ambition des partenaires est d’entamer la construction des terminaux TGV Fret en 2010 et de lancer les premières lignes en 2012.
A quelques centaines de mètres de la piste d’atterrissage principale, aux abords de la zone aéroportuaire, se trouve également Liege Logistics, le village cargo relié au rail, qui forme avec Liege Airport une zone multimodale majeure. Cette plate-forme est dédiée aux transports rail/route, ainsi qu’à la distribution et à la logistique.
Fruit d’une collaboration entre le holding pu-blic Meusinvest et l’agence d’animation techno-logique SPI+, ce parc, d’une superficie totale actuelle d’environ 84 hectares, accueille une quinzaine d’entreprises, dont quelques-uns des plus grands prestataires de services logistiques. De par sa localisation et sa spécificité, ce parc bénéficie d’un équipement tout à fait particulier. En effet, on y trouve de très larges voiries et une aire de transbordement route/rail de 40.000 m2 qui peut accueillir des trains entiers et qui permet de combiner le transport de conteneurs.
Compétitivité croissante
Située au carrefour des grands axes de circulation européens de marchandises, du Nord au Sud et de l’Est à l’Ouest, la Wallonie permet d’atteindre rapidement près de 60% du marché de l’Europe occidentale. Un atout non négligeable.
Une de ses forces en matière de logistique et transport vient également du nombre de ses infrastructures: Liege Airport, 8e aéroport cargo d’Europe, le Port autonome de Liège, 3e port intérieur d’Europe, plusieurs plates-formes multimodales, de nombreuses autoroutes encore fluides, un réseau fluvial important et un réseau ferroviaire dense. D’autres avantages sont également prépondérants, comme la disponibilité de terrains et de biens immobiliers à prix compétitifs.
La Wallonie dispose encore de plusieurs parcs logistiques multimodaux, dont les principaux sont Liège, Charleroi, Centre Ardenne, le terminal d’Athus, Garocentre et le Dry Port Mouscron. La région compte de nombreux organismes de formation comme le Forem Logistique, les hautes écoles et les universités. Tous ces établissements offrent à leurs élèves l’opportunité d’acquérir expertise et savoir-faire et en font profiter les entreprises venues s’installer dans la région.
Au sein du secteur, la compétitivité va croissant. De nombreuses entreprises de transport et de logistique, régionales ou internationales, se sont créées ou installées en Wallonie. La Wallonie peut également compter sur une main- d’œuvre expérimentée et la présence de professionnels qualifiés et multilingues.
A l’heure actuelle, 4.032 entreprises wallonnes relèvent de ce secteur, soit plus de 26.242 em-plois, un chiffre d’affaires annuel d’environ trois milliards d’euros et une valeur ajoutée supérieure au milliard d’euros. Parmi ces entreprises, 1.568 sont situées dans le Hainaut, 1.300 en province de Liège, 490 en province de Namur, 409 dans le Brabant wallon et 265 dans le Luxembourg belge. Le tout avec un chiffre d’affaires annuel ventilé ainsi: 54,78 % réalisés dans le Hainaut, 33,77 % en province de Liège, 4,84 % en province de Namur, 4,26 % dans le Brabant wallon et 2,35 % dans le Luxembourg belge.
Quant à la valeur ajoutée, elle se répartit comme suit: 41,05 % en province de Liège, 37,94 % dans le Hainaut, 8,89 % en province de Namur, 7,61 % dans le Brabant wallon et 4,50 % en province de Luxembourg.
En matière d’emploi, 10.313 personnes travaillent dans le secteur en province de Liège, 10.298 dans le Hainaut, 2.312 dans le Brabant wallon, 1.998 en province de Namur et 1.321 dans le Luxembourg belge.
L’expérience de la majeure partie de ces entreprises leur permet de proposer des services à forte valeur ajoutée. Un grand nombre d’entre elles sont d’ailleurs de dimension européenne, ce qui renforce l’image d’une Wallonie centre de la logistique européenne. Ces dernières années, la Région wallonne a accueilli de nombreux investissements dans le secteur, tant belges qu’étrangers. Ceux-ci sont venus renforcer l’image attractive de la Wallonie en matière de logistique et transport. En 2006, le gouvernement wallon a d’ailleurs fait du transport et de la logistique l’un des pôles de compétitivité du Plan Marshall.