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Photo: Christof Weber 

Octavie Modert peut revoir sa copie. Les quatre projets de règlements grand-ducaux précisant les emplois de la fonction publique relevant de la puis­sance publique – et donc réservés aux Luxembourgeois – ont été sévèrement avisés par le Conseil d’Etat. La haute institution, désormais présidée par Georges Schroeder, a remis le 23 février dernier son avis sur les textes élaborés par la ministre déléguée à la Fonction publique et censés entrer en vigueur le 1er janvier dernier, en même temps que la loi – de fait inopérante. Un avis truffé de remarques faussement naïves et parfois, réellement cinglantes.

«Certains emplois repris ne répondent à première vue pas aux critères de la loi. Ainsi, le Conseil d’Etat n’a pas pu être rassuré que le conservateur de la section de paléontologie, qui d’après Larousse est la science qui se consacre à l’étude des fossiles, participe à l’exercice de la puissance publique ou à la sauvegarde des intérêts généraux de l’Etat qu’en raison du fait qu’il peut requérir, le cas échéant, la force publique.» Autre exemple pointé du doigt: «Les employés du secrétariat de la musique militaire. Aurait-on oublié que Fernand Mertens, chef de la musique militaire de 1909 à 1937 et compositeur, entre autres œuvres musicales patriotiques, de la Sonnerie nationale, était de nationalité belge?»

Et le Conseil d’Etat, précisant que «l’on pourrait multiplier les exemples», d’observer que «la nomenclature des emplois réservés proposée dans le projet ne se distingue pas particulièrement par sa cohérence ou sa fidélité à une ligne de conduite générale». Face à ces textes mal ficelés, il ne cache pas ses inquiétudes: «Il faut se rendre à l’évidence de la valeur tout à fait relative du relevé des emplois repris au projet de règlement sous avis au regard du droit communautaire.» Si les textes étaient publiés tels quels, le Luxembourg se retrouverait «inévitablement dans la ligne de mire de la Commission européenne», avertit l’institution.L’Association de soutien aux travailleurs immigrés (Asti), pour sa part, a commenté l’avis du Conseil d’Etat  en se demandant s’il ne s’agissait pas là, de la part du gouvernement,  d’«une opération pour gagner du temps en attendant une nouvelle condamnation par la Cour de Justice européenne». L’asbl retient toutefois un constat positif: les textes n’évoquent «d’aucun mot une quelconque limitation d’emplois communaux». Mais «encore faut-il en informer les communes», observe l’Asti qui a relevé depuis le début de l’année plusieurs appels à candidatures pour «artisan, receveur ou simple employé communal» réservés à des nationaux.