Les 28 ont trouvé une position commune sur plusieurs projets de réformes au sein du paquet «Énergie propre».  (Photo: CC)

Les 28 ont trouvé une position commune sur plusieurs projets de réformes au sein du paquet «Énergie propre».  (Photo: CC)

Un difficile accord, qualifié par la présidence estonienne de l’UE elle-même d’«ambigu», a émergé autour des «mécanismes de capacité», qui permettent de compenser des producteurs d’électricité qui gardent opérantes des capacités de production nécessaires pour franchir les pics de consommation, et qui ont soulevé un débat sur la place du charbon dans l’Union.

Au cours d’un conseil des ministres de l’Énergie marathon terminé dans la nuit, les 28 ont ainsi trouvé une position commune sur plusieurs projets de réformes qui font partie du gigantesque paquet de propositions dévoilées par la Commission fin novembre 2016.

Ce «paquet Énergie propre» vise à aligner l’UE avec ses engagements pris dans le cadre de l’accord de Paris sur le climat en décembre 2015, à travers la révision de huit législations communautaires.

Un «mépris total» pour l’accord de Paris

Les 28 ont aussi trouvé une position commune pour la future négociation avec le Parlement européen sur la place des énergies renouvelables, confirmant l’objectif que celles-ci représentent «au moins 27%» de la consommation d’énergie de l’UE en 2030. Les différents textes seront négociés en 2018 avec l’autre co-législateur de l’UE, le Parlement européen, et la Commission, pour une réforme finale. Les ministres de l’Énergie de plusieurs États membres, dont la France, la Hongrie, le Portugal ou la Roumanie, se sont opposés à la proposition de la Commission qui souhaite éliminer en cinq ans les tarifs réglementés à destination des consommateurs les plus vulnérables. Le texte de compromis des ministres évoque simplement le caractère «temporaire» de ces tarifs spéciaux.

Au cours de ce même Conseil des ministres, les États ont confirmé l’objectif général d’«au moins 27%» de renouvelable en 2030 malgré la pression d’ONG leur demandant de le relever, craignant que cela ne suffise pas pour tenir les engagements de réduction d’émissions de gaz à effet de serre pris à Paris. WWF a qualifié le compromis trouvé de «mépris total» pour l’accord de Paris.

L’objectif de 27% d’énergie renouvelable est bien trop bas.

Carole Dieschbourg, ministre de l’Environnement

La ministre de l’Environnement Carole Dieschbourg s’est dite «déçue» après s’être battue avec la France et la Suède notamment: «Dès le début le Luxembourg a poussé pour que les ministres de l’Énergie et du climat travaillent ensemble sur ces questions pour arriver à une position commune, et ce n’est pas ce qui a été retenu. Une position commune permettrait pourtant d’avancer, car énergie et climat sont liés. 78% des émissions de CO2 proviennent de l’énergie, nous devons être en cohérence avec les accords de Paris.»

Le Luxembourg a voté contre le texte d’orientation générale, trop ambigu selon la ministre: «La formulation n’est pas du tout claire concernant la place du charbon notamment. Pour le Luxembourg la priorité est de supprimer progressivement le charbon, j’espère que le Parlement européen va prendre le relais». Le Luxembourg aurait également aimé des engagements plus forts, comme le stipule les accords de Paris: «L’objectif de 27% d’énergie renouvelable est bien trop bas, nous aurions voulu un engagement plus fort, et ce jusqu’en 2050. Mais ça n’a pas été retenu. Je suis donc déçue, mais ce n’est qu’une étape.»

Le député européen luxembourgeois Claude Turmes a fustigé un accord jugé «minimaliste»:

<blockquote class="twitter-tweet" data-lang="en"><p lang="en" dir="ltr">.<a href="https://twitter.com/EUCouncilPress?ref_src=twsrc%5Etfw">@EUCouncilPress</a> minimalistic deal on governance <a href="https://twitter.com/hashtag/EnergyUnion?src=hash&amp;ref_src=twsrc%5Etfw">#EnergyUnion</a>. Good that pro <a href="https://twitter.com/hashtag/renewables?src=hash&amp;ref_src=twsrc%5Etfw">#renewables</a> FR DE SE DK LU LT managed to push <a href="https://twitter.com/EU2017EE?ref_src=twsrc%5Etfw">@eu2017ee</a> to a third reference point for trajectories. Language on <a href="https://twitter.com/hashtag/climate?src=hash&amp;ref_src=twsrc%5Etfw">#climate</a> is weak. Up to <a href="https://twitter.com/Europarl_EN?ref_src=twsrc%5Etfw">@Europarl_EN</a> to get ready! <a href="https://twitter.com/hashtag/CleanEnergyEU?src=hash&amp;ref_src=twsrc%5Etfw">#CleanEnergyEU</a> <a href="https://t.co/XQsVYXV75i">https://t.co/XQsVYXV75i</a></p>&mdash; Claude Turmes (@ClaudeTurmes) <a href="https://twitter.com/ClaudeTurmes/status/942903423434969088?ref_src=twsrc%5Etfw">December 18, 2017</a></blockquote>
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Ce dernier accuse ainsi les dirigeants européens de ne pas prendre les accords de Paris au sérieux: «Les États membres refusent de réviser à la hausse l’objectif de 27% fixé pour les énergies renouvelables, tout en ouvrant la porte à de nouvelles subventions pour le charbon. Cela montre que le sommet One Planet à Paris n’était guère plus qu’un coup publicitaire de la part des leaders européens.»

C’est finalement sous l’impulsion de la France, de l’Allemagne, de la Suède et du Luxembourg, ralliés par des pays comme la Lituanie, le Danemark, les Pays-Bas ou encore l’Italie, que les 28 se sont entendus pour se donner trois points de passage: en 2023 (24% de l’objectif réalisé), 2025 (40%) et 2027 (60%).

Tous les espoirs reposent désormais sur le Parlement européen.

Claude Turmes, député européen

Cette décision redonne de l’espoir à Claude Turmes: «Un petit point positif est le succès des négociations entre les États membres progressistes tels que l’Allemagne, la France et le Luxembourg, qui ont appelé hier à l’introduction d’un troisième objectif intermédiaire et donc à un meilleur suivi du développement des énergies renouvelables. Afin de sauver les ambitions du traité de Paris sur le climat lors des négociations du trilogue et de les répandre dans le droit européen, tous les espoirs reposent désormais sur le Parlement européen».

Par contre, le résultat a été mitigé sur la révision du règlement portant sur le fonctionnement du marché de l’électricité. Neuf pays ont voté contre, en lien avec les mécanismes de capacité, l’une des mesures les plus discutées.

Selon l’accord trouvé à 28, les nouvelles installations pourront participer au dispositif après 2025 seulement si leurs émissions se trouvent sous ce seuil de 550 grammes ou sous celui de 700 kilos de CO2 émis en moyenne par an par kilowatt installé. Une limite a été instaurée pour la participation au dispositif des centrales électriques existantes «qui ne pourront pas recevoir d’aides après 2030 et pour qui les aides devront être réduites après 2025», a expliqué le Conseil dans un communiqué.