Pour ou contre Trump? Jean-Marc Chiaradia se penche sur le 45e président américain. (Photo: CapitalatWork)

Pour ou contre Trump? Jean-Marc Chiaradia se penche sur le 45e président américain. (Photo: CapitalatWork)

Fin de la présidence de Barack Obama, premier Afro-Américain président des USA. Le nouvel occupant de la Maison Blanche a décidé de marquer les esprits dès son entrée en fonction et de rompre avec les idées de son prédécesseur républicain.

Au cours de sa campagne, Donald Trump a utilisé le commerce extérieur comme fer-de-lance dans sa prétendue défense de la classe moyenne américaine. Il a montré aussi une envie de déréguler l’économie américaine et de détricoter l’Obamacare ou encore la loi Dodd-Frank. Il a également proposé de diminuer le taux de taxation et de lancer un plan massif d’infrastructure.

Les 100 premiers jours au pouvoir sont souvent l’occasion de donner le ton du mandat dans son ensemble et de mettre en application les engagements électoraux par des mesures concrètes. Après quelques jours d’investiture, plusieurs décrets ont déjà été adoptés:

  1. Abandon de la politique de réduction des énergies polluantes;
  2. Retrait du traité de libre-échange transpacifique;
  3. Décret contre la loi Obamacare;
  4. Gel des embauches de fonctionnaires, hormis le personnel militaire;
  5. Interdiction de financer par des fonds fédéraux des ONG internationales qui soutiennent l’avortement.

Trump a décidé de sonner le glas de la politique menée par Obama. Les marchés, d’abord enthousiasmés à l’idée d’une politique fiscale expansionniste, commencent maintenant à s’inquiéter d’un risque de protectionnisme accru. Le magnat de l’immobilier n’a pourtant caché ses idées conservatrices à aucun moment. Il a par exemple décidé de s’entourer de féroces défenseurs des intérêts américains: Wilbur Ross, au poste de secrétaire au Commerce, et Peter Navarro, comme directeur du Conseil national du commerce. Ce dernier est notamment connu pour sa position extrême quant à la politique chinoise.

Les frasques de Donald Trump concernant le Mexique et la Chine mettent en évidence le manque de diplomatie envers les principaux partenaires économiques des USA. À en croire José Calzada, homme politique mexicain et secrétaire à l’Agriculture, les échanges commerciaux entre les USA et le Mexique s’élèvent à 1 million de dollars par minute. Il y a donc également un risque pour l’emploi d’États importants comme le Texas, où 500.000 emplois ont été créés pour répondre à la demande mexicaine. La renégociation des accords Nafta ne se fera ni dans la confrontation ni dans la soumission, a annoncé le président mexicain.  

Du côté de l’empire du Milieu, Donald Trump a montré sa volonté de contester les 40 ans de politique agressive de la Chine en s’adressant directement au président taïwanais, froissant ainsi la susceptibilité des Chinois. Le discours pro-mondialisation de Xi Jinping à Davos était une mise en garde pacifique à l’encontre de ces manœuvres protectionnistes, et mettant paradoxalement en exergue les risques des tendances isolationnistes de Trump.

La menace plane sur la globalisation. S’attaquer à la Chine, un des plus grands importateurs, c’est mettre en péril le commerce mondial.

Économiquement, limiter les importations revient à taxer indirectement la consommation, le principal moteur de l’économie américaine. Favoriser le protectionnisme conduit à un ralentissement de l’innovation, élément pourtant essentiel aux gains de productivité.

Pourtant, les récentes enquêtes montrent que les chefs d’entreprise sont clairement favorables à cette nouvelle administration. Les indicateurs de jugement sur les perspectives à six mois ont enregistré un rebond spectaculaire. Les chefs d’entreprise sont avant tout sensibles aux promesses d’allègement de la régulation et de baisse des impôts.

Selon nous, cinq éléments sont à surveiller pour les entreprises américaines: le coût de l’énergie, le coût du travail, le climat des affaires, les conditions financières et les infrastructures.

Coût de l’énergie:

Le nouveau décret de Donald Trump vise l’indépendance énergétique. La reprise des forages de pétrole et de gaz de schiste, couplée à la réactivation des centrales à charbon, devrait faire des États-Unis un exportateur d’énergie.

Coût du travail:

Le marché du travail est plus tendu qu’avant la dernière crise. Le taux de participation au marché du travail semble devoir rester faible, en partie pour des raisons de vieillissement de la population. Une politique d’immigration plus restrictive n’améliorera pas la situation. Les entreprises américaines devront investir dans la robotique afin de contrer les pénuries de main-d’œuvre.

Infrastructure:

Il est de tradition aux USA pour le gouvernement fédéral de fournir les investissements, l’infrastructure, les finances et toutes les autres formes de soutien dont le secteur privé a besoin. Le nouveau président n’a pas encore eu le temps de valider des plans d’infrastructure, mais ils seront certainement bien accueillis par les entrepreneurs.

Climat des affaires:

La conduite de la politique par tweets suggère que Donald Trump n’éprouve pas un grand intérêt à renforcer le dialogue institutionnel. Comme nous avons déjà pu le constater sur Twitter, il faut s’attendre à une politique qui oscille entre favoritisme et intimidation.

Conditions financières:

Chaque fois qu’un parti arrive au pouvoir, il a tendance à emprunter pour financer ses priorités. Le déficit américain sous la nouvelle administration devrait donc augmenter. Une politique protectionniste et expansionniste dans un contexte de chômage aussi faible devrait conduire à des taux d’intérêt plus élevés. Des taxes à l’importation renforcent le dollar, la récente élection de «the Donald» a d’ailleurs permis au billet vert de s’apprécier face à la plupart des devises. Paradoxalement, cette force du dollar pourrait conduire à des pertes d’emplois, selon le modèle de la Fed. 

Le besoin primitif de se sentir protégé des forces économiques extérieures a permis l’élection de Donald Trump. Il serait audacieux de se prononcer sur les perspectives économiques américaines en 2017, quand le nouveau président américain défie toutes les lois habituelles de l’économie. Le Tariff Act de 1930 avait provoqué à l’époque une guerre commerciale catastrophique et amplifié la crise. Espérons que cette fois la raison l’emportera sur l’instinct.