André Hesse et Luc Biever (Photo: Julien Becker)

André Hesse et Luc Biever (Photo: Julien Becker)

Communiquer constitue toujours un investissement. La plupart des dirigeants d’entreprise en conviendront. Mais à quelle hauteur porter ces investissements? Et pour quel retour? Ces questions, ceux qui envisagent de mettre en place des actions de communication se les posent forcément. Souvent, cependant, ils peinent à entrevoir des réponses claires.

Compte tenu des budgets qu’implique une campagne censée porter des fruits, il est important de s’assurer d’investir avec discernement et de pouvoir, dès le départ, entrevoir les retombées que les actions envisagées sont susceptibles de générer.

Au cas où… bonne nouvelle: les impacts d’une campagne peuvent être évalués. Il existe différentes possibilités permettant de ne pas laisser l’annonceur dans le doute. «On peut mesurer beaucoup de choses, aussi bien quantitativement que qualitativement, explique Luc Biever, managing director de TNS-Ilres. Le véritable enjeu, toutefois, est de déterminer ce que l’on souhaite mesurer.»

Avant toute chose, il faut pouvoir évaluer la situation existante, en amont de la mise en œuvre de la campagne. La notoriété d’une marque, avant une campagne, est rarement nulle! «De manière générale, un client vient avec des objectifs, des challenges qu’il souhaite relever au moyen d’actions de communication. Il sait où il veut aller, mais plus rarement d’où il vient, explique André Hesse, CEO de l’agence de communication Vous. Avant de pouvoir parler de la mesure du retour sur investissement d’une campagne, il faut pouvoir déterminer le bilan. Ce point de départ doit permettre d’évaluer le chantier, le chemin à parcourir pour atteindre les objectifs, et donc les moyens à mettre en œuvre pour les atteindre.»

Un bon briefing au départ, une analyse de la situation business de l’entreprise, liée au produit ou service que l’on souhaite pousser, doit permettre de se faire une bonne idée de la situation. Mais on peut aller plus loin, notamment afin d’évaluer la notoriété d’une marque ou la maturité de la connaissance du public sur un sujet déterminé autour duquel on souhaite sensibiliser. Des enquêtes pré-campagne peuvent donc être menées.

Avant, pendant, après

En outre, chaque campagne poursuit des objectifs qui lui sont spécifiques. «Aussi, son efficacité devra être évaluée en fonction de la stratégie mise en œuvre, des canaux de communication qui ont été exploités pour atteindre la cible envisagée», poursuit Luc Biever. Juger de la qualité d’une campagne dans toutes ses dimensions, en matière de perception de la marque et du message, à court et long termes, de la notoriété de l’entreprise, peut vite s’avérer complexe, pour peu que l’on mette en place des indicateurs précis. «Des enquêtes relatives à la valeur d’une marque avant, pendant la campagne et sur une période déterminée une fois celle-ci terminée doivent permettre d’en mesurer précisément l’impact, ajoute le dirigeant de TNS-Ilres. Des enquêtes menées auprès des consommateurs, relatives à la notoriété d’une marque ou encore au message porté par une campagne, permettent de se faire une idée précise des effets induits par les actions menées sur l’image d’une entreprise.»

Mesurer le retour sur investissement de cette manière exige de procéder dans les règles, subtilement afin d’obtenir des résultats valides. Pour certaines marques déjà bien ancrées dans le subconscient des consommateurs, les instituts de sondage vous diront qu’il n’est pas rare que, dans une approche trop directe, les personnes interrogées déclarent avoir vu la marque dans les médias un jour où elle ne s’y affichait pas.

D’autres affirmeront avoir vu la marque sans avoir perçu le message lié à la campagne. «Il faut donc envisager ces études selon une approche indirecte. Il ne faut pas se contenter de demander à la personne sondée si elle a vu la marque ces trois derniers jours dans les médias. Mais d’abord lui demander quels sont les médias qu’elle a consommés ces derniers jours, puis lui demander si elle a aperçu un message ou un élément constitutif d’une campagne avant de l’interroger sur la marque», souligne encore Luc Biever.

Ensuite, selon les résultats obtenus, en les comparant à d’autres données existantes, il sera possible d’évaluer l’efficacité d’une campagne. «Des organismes de sondage comme le nôtre peuvent comparer les effets d’une campagne par rapport à une autre, comparer l’efficacité d’une campagne selon le secteur pour un territoire donné», poursuit le managing director de TNS-Ilres.

Tout se mesure grâce au Web

Ces outils de mesure sont efficaces, mais particulièrement coûteux. Au Grand-Duché de Luxembourg, des enquêtes pré ou post-campagne restent exceptionnelles. Si elles permettent effectivement de bien évaluer l’effet d’une campagne, elles peuvent peser lourd dans l’investissement. Luc Biever confie que ces actions d’évaluation sont le plus souvent de mise dans le cadre de campagne à échelle internationale, exigeant des investissements considérables.

Souvent, les annonceurs préfèreront investir directement dans les actions de communication, en espérant qu’elles portent leurs fruits, que dans les moyens de mesurer leur efficacité. Il est cependant possible de mesurer l’impact de diverses actions de communication sans passer par des enquêtes ou des études d’opinion. À l’heure du web, les indicateurs de performance sont nombreux. Le trafic généré sur un site web, l’engagement d’une communauté sur les réseaux sociaux sont autant d’éléments qui peuvent rendre compte, de manière quantitative, de l’efficacité d’une campagne. «De nombreux médias nous permettent d’évaluer l’impact d’une campagne, même si elle n’est pas déployée sur le web exclusivement, commente André Hesse. Afin de pouvoir rendre compte des effets d’une campagne cross-media, tout en veillant à convertir une cible selon les objectifs déterminés, nous allons organiser une convergence vers un média. Le message distillé à travers l’ensemble des supports, en ligne ou print, va inviter les cibles à rejoindre un site web à partir duquel elles pourront effectuer un acte d’achat ou une autre opération envisagée.»

Sur le web, tout est mesurable. Dès lors, à partir des web analytics, il est possible de se faire une bonne idée de l’impact d’une campagne. Notons que si une action publicitaire ou de communication publicitaire a pour objectif d’améliorer les ventes d’un produit ou encore d’un service, ses effets peuvent évidemment se traduire directement dans l’évolution du chiffre d’affaires…

C’est sans doute plus complexe quand il s’agit de renforcer la notoriété. L’impact se faisant ressentir sur une durée beaucoup plus longue.

«Les web analytics constituent des indicateurs de mesure rationnels. Or, une campagne peut entraîner des effets qui ne le sont pas, comme un bouche-à-oreille positif ou négatif, explique Luc Biever. Notons aussi que l’acte d’achat lui-même ne résulte pas toujours d’un cheminement rationnel.»

L’enjeu de la créativité

Avant de penser à mesurer l’impact d’une campagne, le réel enjeu lié au retour sur investissement est sans doute de s’assurer qu’elle sera efficace, qu’elle atteindra la cible déterminée. Au cœur de l’élaboration de toute action de communication, la question de la créativité est centrale. Mais de quoi parle-t-on? Les bénéfices d’une bonne créativité sont-ils mesurables? «L’apport de la créativité, au cœur d’une campagne, est évident. C’est elle qui permet de différencier la communication. Elle constitue le meilleur moyen de séduire la cible, de l’attirer, de la convaincre. La créativité se traduit dans la forme et dans le message, dans une campagne singulière», poursuit André Hesse. La créativité n’est pas quelque chose de subjectif. «Elle découle d’une stratégie mûrement réfléchie, poursuit le CEO de Vous. Elle doit répondre à des objectifs, à un briefing, être en phase avec une cible dans un contexte donné et synthétiser un message qui générera un impact. À partir du moment où le message est construit de manière professionnelle, elle doit produire l’effet escompté.»

La créativité rend la communication visible. Face à l’abondance des informations reçues, si la cible voit la campagne menée, c’est justement parce qu’elle est créative. «Le cerveau humain fonctionne de telle manière qu’il nous préserve du trop-plein d’informations. Une bonne campagne doit donc se placer dans un contexte, de telle sorte qu’elle parviendra à toucher celui qui sera sensible au message qu’elle porte», commente Luc Biever.

Une campagne de communication, pour assurer un bon retour sur investissement, doit donc être ciblée. «La plupart du temps, le client est trop généraliste dans son ciblage. Notre boulot est de l’aider à déterminer son cœur de cible. Les jeunes de 16 ans, par exemple, constituent une cible trop large, précise André Hesse. Il est impossible de développer un message qui corresponde à tous les jeunes de cet âge.S’appuyant sur une stratégie claire, la créativité, le message et la forme de la campagne peuvent aussi être testés au préalable, pour voir comment réagit la cible. Si cela n’est pas forcément une habitude au Luxembourg, il est tout à fait possible de soumettre un message, un visuel, un concept à un panel pour évaluer sa réaction. «Si on peut mesurer l’impact d’une campagne a posteriori, l’idéal est évidemment de mettre toutes les chances de son côté», précise André Hesse.

Tout dépend évidemment de la campagne envisagée. Le retour sur investissement dépend de la cible, du produit, du contexte. «On ne communique pas de la même manière pour valoriser un produit high-tech, qui s’adresse à un cœur de cible précis et qui à peu de choses près pourrait se vendre seul, ou un produit d’assurance», détaille le patron de Vous. Le risque inhérent à l’investissement n’est, en outre, certainement pas le même. »

Tester sa campagne au préalable

Il peut cependant apparaître paradoxal que les campagnes relatives à un produit d’assurance, par exemple, continuent à se décliner généralement sous une forme relativement classique, alors que la concurrence est rude et qu’une dose de créativité permettrait sans doute de faire la différence. «Ce type de campagne, qui s’adresse de manière générale à un large public, qui doit être largement diffusée, qui coûte donc cher, mériterait sans doute une prise de risque, limitée dans la mesure où son impact pourrait être évalué auprès du panel», explique André Hesse.

Ce constat pose aussi la question du rapport entre quantité et qualité. Des campagnes de faible envergure peuvent générer d’importants retours. D’autres nécessiteront une diffusion large et a priori plus coûteuse pour générer un potentiel retour sur investissement. À ce niveau, il est important de distinguer le coût de production du coût de diffusion. «Encore une fois, la créativité permet de faire la différence. Une petite campagne très créative pourra avoir un impact plus conséquent qu’une autre, plus classique, diffusée largement. Là encore, en testant un concept auprès d’un panel représentatif de la cible, il est possible de proposer des campagnes créatives, en mettant toutes les chances de son côté», explique André Hesse.

Cette balance qualité-quantité doit être évaluée en fonction des objectifs et des ambitions affichées par l’annonceur. «Ce sont eux qui vont déterminer les moyens à mettre en œuvre, en fonction du secteur, de la position des concurrents et de leur présence médiatique, sur le terrain, conclut André Hesse. Compte tenu de ces nombreux éléments et d’autres, comme l’attractivité du produit, il sera possible d’évaluer les moyens à mettre en œuvre en regard des ambitions affichées. Mais il est possible, pour des acteurs actifs de communication, de pouvoir dire au client qu’en dessous d’un tel budget, ça n’en vaut pas la peine.»

Big Data

La créativité en danger?

La question de la créativité au cœur d’une campagne est essentielle. L’enjeu est de toujours mieux se démarquer, pour capter l’attention de la cible. Les évolutions, à l’avenir, laissent entrevoir de nouvelles perspectives. Et notamment avec une meilleure exploitation des données. Le big data est sur toutes les lèvres et présenté comme une nouvelle manière d’envisager la relation avec la cible. Demain, il sera possible de savoir où se trouve la cible et de lui apporter un bon message, au bon moment, selon le contexte. Dans la mesure où l’exigence de sortir du lot ou de capter l’attention sera moins grande, dans la mesure où le message pourra être poussé au moment où l’esprit est le plus alerte, où l’offre est pour ainsi dire attendue, la créativité est-elle en danger? Pas forcément, dans la mesure où le message devra séduire, convaincre, se distinguer de la concurrence, marquer les esprits. S. L.

Les bonnes pratiques des agences (4/4)

Agence: Moskito

Client: Ville d’Esch-sur-Alzette

Date du projet: mai 2013

Descriptif: Un nouveau logo, créé par Moskito SA et reflétant bien l’aspect de la nuit, a été dévoilé lors de la campagne pour la Nuit de la Culture 2013 à Esch-sur-Alzette.

 

Agence: Accentaigu

Client: ING

Date: 8 juin 2013

Descriptif: ING est le sponsor officiel du Marathon à Luxembourg et souhaite une visibilité maximale durant l’événement. Établir une campagne globale (ensemble de différentes actions de streetmarketing) visant à montrer le caractère sympathique de la banque et faire ouvrir de nouveaux comptes. Résultats: un paysage en majorité de couleur orange, un pic de fréquentation des réseaux sociaux et une visibilité constante du logo ING.

 

Agence: Accentaigu

Client: Alfi

Date: du 15 au 19 septembre 2013

Descriptif: Cinq jours de haute visibilité organisés par Accentaigu pour un groupe de contacts clé! La 38e conférence annuelle Iosco 2013 (International Organization of Securities Commissions) intitulée «Connecting global finance» s’est déroulée en 2013 au Luxembourg. Ce fut l’occasion exceptionnelle de réunir les décideurs et représentants des autorités de surveillance de plus de 110 juridictions. L’objectif était d’atteindre en un même lieu une audience internationale de haut niveau (experts, décideurs et praticiens) du Luxembourg et de l’étranger.