C’est avec la satisfaction des résultats engrangés que le doyen Stefan Braum s’est prêté au jeu du bilan annuel, face à la presse. Et il n’était pas question de football (la Mannschaft chère à son cœur n’était pas encore en finale à ce moment de la journée) durant ce rendez-vous, mais bien des activités de la faculté de Droit, d’Économie et de Finance de l’Université du Luxembourg, dont il a la charge.
Créée en 2005, cette faculté comptait au 31 décembre dernier 2.628 étudiants, soit 886 de plus que l’année académique précédente. Au-delà des données de fréquentation, les publications et récompenses sont prisées par les institutions académiques pour rajouter du crédit à leur réputation. Et le score au «tableau d’honneur» semble positif pour l’Uni.
Notons, entre autres, la prise de parole – un privilège – de la professeur en droit pénal européen et international Katalin Ligeti devant la Chambre des Lords à Londres.
«Pour la première fois depuis la création du programme de tribunal-école (Moot Court), des étudiants ont participé à des concours simulant des procès et les mettant en compétition avec d’autres étudiants, et nous avons battu le Collège de Bruges au concours Cassin», se félicite le professeur Stefan Braum, doyen de la faculté.
Orientation vers l’international
Or l’Uni veut se positionner durablement dans le créneau du droit en tant que centre d’expertise international. Cette matière rassemble d’ailleurs le plus important contingent d’étudiants au sein de la faculté, avec 711 inscrits en 2013. À la fin mars, un bachelor axé sur une approche transnationale du droit avait été annoncé, et il sera lancé en septembre 2015.
Dans un autre registre, c’est un master en wealth management qui avait vu le jour début 2013, en collaboration avec le Private Banking Group de l’ABBL. Une mesure concrète imaginée pour répondre aux besoins des professionnels de plus de 10 ans d’expérience en banque privée, dans le cadre de la réorientation de la Place vers une clientèle plus fortunée. 12 participants sont actuellement actifs dans ce cycle de formation continue, s’ajoutant aux 10 premiers diplômés de l’été dernier.
Le récent accord de coopération signé entre la Chambre de commerce et l’Uni pour la mise sur pied d’une Business School à Luxembourg prolonge cette démarche vers l’international, alors que 69% des étudiants de la faculté ne sont pas Luxembourgeois. «Cet accord démontre que la société luxembourgeoise fait vraiment confiance à notre faculté», ajoute Stefan Braum.
Pas question pour autant de vouloir rivaliser pour le principe avec les grands noms des pays voisins. «Une étude de faisabilité est prévue pour l’année prochaine, et nous allons aussi prendre en compte les concurrents», précise Stefan Braum. «Nous devons bâtir le projet au fur et à mesure, peut-être en coopération avec d’autres business school, en proposant un modèle adéquat, qui fasse du sens pour le Luxembourg.»
Proche du carton jaune
Les projets de coopération avec d’autres institutions étrangères seront poursuivis dans les prochains mois (Singapour est citée), avec le souci de ne pas entraîner une inflation des conventions. Mais les préoccupations directes du doyen sont aussi d’ordre plus pragmatique. Principalement en matière de déménagement.
Suite au départ d’une partie des étudiants de l’Uni vers Belval, il est prévu que la fac de Droit, d’Économie et de Finance (actuellement répartie sur trois sites, deux au Kirchberg, un au Limpertsberg) soit centralisée au Limpertsberg d’ici 2018. Mais le doyen ne voit rien venir quant au budget et à la planification du projet. Le carton jaune est proche...
«Il faut agir maintenant au niveau politique pour s’assurer que la faculté déménage dans les délais prévus», prévient Stefan Braum. «Nous risquons d’avoir les mêmes problèmes que pour Belval, si des actions concrètes ne sont pas prises tout de suite.»
Le ton est aussi au regret lorsqu’il est question des financements de la recherche via le Fonds national de la recherche (FNR). «Ni le droit ni la finance ne font partie des priorités du FNR», regrette Stefan Braum. «Je comprends le besoin de cibler les ressources financières, mais pourquoi écarter les matières qui ont déjà montré leur succès», s’interroge le doyen.
À noter que de leur côté les partenaires issus du monde économique et financier (Atoz, Deutsche Bank, SES, Chambre de commerce, UBS, la BEI, Ceps/Instead et le Statec) se placent dans une approche à long terme, mais sont, dans l’absolu, peu nombreux. On serait en droit d’attendre plus d’investissements de la Place à l’égard d’une faculté destinée à former les collaborateurs de demain, voire à prodiguer une formation continue aux ressources actuelles.
Partie intégrante du nation branding
Les inquiétudes du doyen se replacent dans un contexte de concurrence entre les universités, tant pour attirer des étudiants que pour recruter des professeurs. Satisfait de la fréquentation estudiantine après presque 10 ans de fonctionnement, le doyen entend par ailleurs faire venir de nouveaux professeurs au Luxembourg. À l’instar des démarches entreprises par les acteurs du secteur financier, c’est tout un package qu’il faut désormais construire.
«Il ne suffit plus d’offrir un salaire attractif. Il faut aussi penser aux conditions de travail, à l’offre locale pour la famille», poursuit Stefan Braum qui veut attirer prochainement «les meilleurs des meilleurs».
Cet objectif souligne, si besoin en était, que l’Université fait partie intégrante du nation branding du pays, ce qui devrait entrer en ligne de compte pour établir la stratégie en la matière, qui est actuellement en chantier.