L'Espresso continue de dérouler le feuilleton Panama Papers et de cerner les ramifications de et vers l'Italie. (Photo: Maison Moderne)

L'Espresso continue de dérouler le feuilleton Panama Papers et de cerner les ramifications de et vers l'Italie. (Photo: Maison Moderne)

Bien entendu, il n’y a rien de répréhensible, ni quoi que ce soit à dire moralement à ce qu’un ou une avocate d’affaires du Barreau de Luxembourg voit son nom cité dans les Panama Papers, ces fuites d’informations sur les structurations de sociétés mises en place à l’échelle industrielle par le cabinet panaméen Mossack Fonseca.

Le nom de l’avocate Simone Retter (et celui de son ancien associé Jean-Paul Goerens) apparaît dans l’édition de cette semaine du magazine italien L’Espresso, membre du consortium international des journalistes d’investigation, à l’origine de la publication des Panama Papers.

L’Espresso publie en plusieurs épisodes les noms des italiens ayant eu recours aux services du cabinet Mossack Fonseca. La semaine précédente, le nom d’Angelo Zito, dirigeant de fiduciaire au Luxembourg, et un des grands praticiens des montages offshore, avait été mentionné.

La mention de Simone Retter est liée à l’homme d’affaires Stefano Pessina, présenté comme un des gestionnaires les plus influents dans l’industrie pharmaceutique mondiale. Domicilié à Monaco, il est, selon le magazine Forbes, la troisième fortune de la péninsule avec un patrimoine de 13,4 milliards de dollars, derrière Ferrero et Leonardo del Vecchio de Luxottica, le repreneur des 13% du capital de Luxair, après la défection de Lufthansa en décembre dernier.

Le choix de Gramegna

Les documents «leakés» portent sur un montage autour de la société offshore Farniente dans le bouclage d’un contrat de prêt de 36 millions d’euros avec Dexia. Une opération réalisée entre octobre 2006 et décembre 2007. Les avocats Retter et Goerens agissaient alors à titre fiduciaire pour le compte du trust Serenity Trust. Ils ont «quitté la scène», selon les termes de L’Espresso, en juillet 2010.

Simone Retter siège depuis décembre 2014 au conseil de la Banque centrale du Luxembourg. L’avocate, qui est aussi membre du Private Banking Group au haut comité de la place financière de Luxembourg (présidé par Pierre Gramegna) et qui a été très impliquée dans le projet de loi sur la fondation patrimoniale (texte gelé pour cause de LuxLeaks), avait remplacé Betty Fontaine, directrice de la Brasserie Simon, laquelle avait démissionné de son mandat.

Le fait que le gouvernement, et en particulier le ministre des Finances Pierre Gramegna qui l’a sélectionnée et soutenue à bout de bras, ait placé dans les organes de la BCL une avocate d’affaires, spécialisée dans la domiciliation de sociétés, présentait un certain risque, qui a sans doute été sous-estimé par les dirigeants politiques, un mois à peine après la déferlente des LuxLeaks.

Pierre Gramegna a-t-il été averti de ce risque potentiel qui pesait sur l’institution? Il faudra probablement qu’il s’en explique et qu’il se montre à l’avenir plus sélectif dans ses choix, qui doivent porter sur des personnalités «moralement» irréprochables et déconnectées des activités opérationnelles liées à la place financière. Précisément pour éviter de prêter le flanc à la critique, souvent facile et rarement innocente, des médias étrangers.

Contactée par Paperjam.lu, Me Retter a assuré qu'elle connaissait le client, Stefano Pessina, depuis de nombreuses années et que sa société était totalement compliant du point de vue fiscal et juridique. La détention de cette société, a encore fait savoir l'avocate, est totalement transparente. Elle n'envisage pas de démissionner de son mandat au conseil de la BCL.