L’avocat Me Sam Ries, entouré de Tatiana K., Christian S., Danielle H. et Lucien S. au Palais de justice en septembre. (Photo: Maison moderne / archives)

L’avocat Me Sam Ries, entouré de Tatiana K., Christian S., Danielle H. et Lucien S. au Palais de justice en septembre. (Photo: Maison moderne / archives)

«Si j’avais triché, je ne serais pas là», a expliqué une des enseignantes accusées, Danielle H., dont le mari, Christian S., est également sur le banc des accusés. L’enseignante du Lycée classique d’Echternach avait le 16 mars appris que le ministère de l’Éducation nationale, de l'Enfance et de la Jeunesse avait transmis les sujets et corrigés des épreuves communes aux enseignants du fondamental et du secondaire, qui siègent dans les conseils d’orientation, et ce avant même que toutes les épreuves aient eu lieu. Ayant en plus elle-même un enfant qui passait son cycle 4.2, elle aurait décidé d’informer les parents des camarades de son fils de la diffusion des épreuves, pour éviter d’être suspectée d’avoir triché. Selon elle, si elle n’avait pas averti les parents, personne n’aurait jamais su qu’elle avait obtenu les corrigés des épreuves.

L’accusée a dit avoir été «choquée» à l’époque, que le ministère envoie ces documents, avant même la fin des épreuves qui devaient se dérouler les jours suivants, à 236 enseignants du secondaire qui siègent dans les conseils d’orientation, y compris les enseignants qui eux-mêmes ont un enfant dans le cycle 4.2. Au tribunal cependant d’interpréter le refus et parfois l’incapacité de l’accusée d’expliquer le déroulement exact des faits. Au tribunal aussi d’interpréter la décision du mari de l’accusée en question, également inculpé, de ne pas faire de nouvelles déclarations ce mercredi, en s’appuyant sur son immunité due à un vice de procédure.

Dysfonctionnements

Une des autres enseignantes accusées, Tatiana K., a quant à elle affirmé non seulement avoir diffusé des informations à Lucien S. – son compagnon qui est membre du CSV et contre qui le ministère a porté plainte ce mardi pour son rôle dans l’affaire –, mais également à la presse. Questionnée par le procureur d’État Jean-Paul Frising, l’accusée a déclaré avoir aussi informé le directeur de son établissement, le Lycée classique d’Echternach, or celui-ci lui aurait simplement répondu par mail: «On aura tout vu…»

Tatiana K., ainsi que la troisième accusée, Natacha F., ont ainsi décrit cette situation devant laquelle elles n’auraient pas eu d’autre choix que de rendre le public attentif aux défauts de la procédure ainsi qu’aux dysfonctionnements dans la relation entre les écoles et lycées et le ministère de l’Éducation nationale, de l'Enfance et de la Jeunesse.

Viol ou pas viol du secret professionnel?

Ont suivi lors de la troisième audience du procès SchoolLeaks les premières plaidoiries. Tandis que l’avocat de la partie civile, Me Michel Molitor, a soulevé les nombreux «fumigènes» employés par la défense, ainsi que les «nombreuses zones d’ombre» dans les déclarations des accusés, l’avocat de Danielle H., Me Gaston Vogel, et l’avocat de Christian S., Me Fränk Rollinger, ont plaidé non-coupable pour leurs clients sur fond de leur interprétation du «secret professionnel» dans le Code pénal.

Gaston Vogel a par ailleurs critiqué la «négligence administrative» de la part du ministère, qui aurait selon lui provoqué l’affaire. Il a également soulevé la question que si le ministère a estimé que les enveloppes contenant les épreuves ne devaient pas être clairement marquées comme «confidentielles», car les épreuves ne font «que partie du processus d’orientation», comment pourrait-on alors encore parler de «viol du secret professionnel»?

Jeudi aura lieu la dernière audience du procès SchoolLeaks avec au menu les plaidoiries des avocats des deux autres accusées, Me Sam Ries et Me Yves Kasel. Suivront le réquisitoire et les éventuelles répliques.