Au sein de l'Administration des contributions sera créée une commission des décisions anticipées. (Photo: Christophe Olinger / archives)

Au sein de l'Administration des contributions sera créée une commission des décisions anticipées. (Photo: Christophe Olinger / archives)

L’Administration des contributions directes a achevé cette semaine la rédaction du projet de règlement grand-ducal détaillant la procédure qui sera applicable aux décisions anticipées à partir du 1er janvier 2015, lorsque les rulings seront ancrés une fois pour toute dans la législation et de cette manière légitimés. Le gouvernement a tracé le cadre législatif des décisions anticipées, d’ailleurs bien avant que l’affaire LuxLeaks soit révélée, mais clairement sous pression de la Commission européenne qui les a dans son viseur, dans le projet de loi sur le paquet d’avenir. Le texte de loi annonçait le détail de la procédure dans un projet de règlement grand-ducal, notamment la tarification des prestations par l’Administration des contributions directes.

La communauté financière l’attendait avec fébrilité. La rédaction de Paperjam.lu en a obtenu une copie. Le projet de règlement ne comporte toutefois pas d’articles (il y en a 11 en tout) fixant les tarifs qui seront facturés par l’administration fiscale (le ministre des Finances Pierre Gramegna avait cité devant les députés le montant maximum de 10.000 euros l’unité). Toujours est-il que la fiche financière annexée au projet de règlement évoque le montant de 3,75 millions d’euros de recettes supplémentaires «pour le traitement des décisions anticipées», sans préciser s’il s’agit de prévision de recettes annuelles ou pluriannuelles.

Commission des décisions anticipées

Voici le futur mode d’emploi des rulings au Luxembourg. Une décision anticipée devra d’abord être adressée par écrit au préposé du bureau d’imposition concerné, être motivée, contenir la désignation précise du demandeur, des parties et autres tiers concernés ainsi qu’une description détaillée de ou des opérations prévues «sérieusement et de manière concrète» et «qui n’ont pas encore produit leurs effets». L’inventaire prévoit aussi une «analyse détaillée des problèmes de droit» et « l’assurance que toutes les indications nécessaires pour l’appréciation des données sont complètes et conformes à la réalité».

Une fois cette première étape administrative franchie, le préposé soumettra la demande pour avis à la commission des décisions anticipées (CDA). C’est l’une des nouveautés de la procédure.

Le CDA, précise le projet, «a pour mission d’assister le bureau d’imposition dans l’exécution et l’application uniforme et égalitaire de la loi fiscale». Ses membres seront désignés par le directeur de l’ACD «parmi les fonctionnaires et agents de la direction et ceux du service d’imposition». Le directeur nommera aussi son président. Cette administration dans l’administration déterminera elle-même ses règles de procédure et de fonctionnement.

Les «oraux» des cabinets fiscaux et autres avocats fiscalistes pour s’expliquer seront maintenus, mais seulement si le CDA le décide.

Après délibération, la commission transmettra son avis au préposé, auquel la décision revient in fine de mettre ou non son tampon sur le ruling. «La décision anticipée, précise le texte, ne peut emporter exemption ou modération d’impôt». La date de péremption d’un ruling sera de cinq ans. La décision liera l’ACD sauf dans trois cas: d’abord, «si la situation ou les opérations décrites l’ont été de manière incomplète ou inexacte», ensuite en cas de divergence entre les opérations réalisées et celles qui étaient à la base de la demande, enfin si «la décision anticipée s’avère par la suite comme n’étant pas ou plus conforme aux dispositions du droit national ou international».

Attention au revirement de jurisprudence

Un ruling sera invalidé si les lois luxembourgeoises et internationales sur lesquelles ils s’appuient devaient changer, s’il y a un revirement de jurisprudence administrative et en cas de modification d’une des caractéristiques essentielles de l’opération envisagée, souligne encore le projet de règlement.

Il n’y aura pas de recours possible, en raison du «caractère unilatéral et préliminaire à l’imposition définitive» du ruling.

L’article 9 du texte dispose enfin que «les décisions anticipées sont publiées de manière synthétique et sous forme anonyme dans le rapport d’activité annuel de l’Administration des contributions directes».