Claude Sauber (Photo : Julien Becker)

Claude Sauber (Photo : Julien Becker)

Le secteur de la communication, tributaire du marché, des visions de ses clients ou de l’évolution des technologies, doit continuellement se remettre en question. Claude Sauber (Binsfeld) a observé les bouleversements et plaide pour l’imagination.

Monsieur Sauber, la situation dans votre secteur a-t-elle connu des changements significatifs au cours de ces dernières années ?

« Notre secteur a connu plusieurs bouleversements. Et la multiplication des outils en fait partie. Aujourd’hui, on va du média classique aux plates-formes Internet, en passant par les réseaux sociaux. Face à cette complexité croissante, les agences doivent évoluer sans cesse, afin de conseiller le client de façon adéquate. Prenons l’exemple des médias sociaux  : à quoi sert, pour une société, d’avoir 10.000 ‘likers’ si ces personnes ‘aiment’ sa page sans acheter ses produits ? Attirer du monde vers ces pages est évidemment nécessaire, mais pour qu’en finalité l’entreprise puisse leur vendre les produits ou services qu’elle propose. Notre métier est ainsi bien plus complexe que lorsque j’ai entamé ma carrière professionnelle, il y a une vingtaine d’années. Ces avancées ont également conduit nos interlocuteurs à se professionnaliser dans le domaine du marketing d’abord, de la communication ensuite. Les entreprises ont engagé des responsables de direction dans ces domaines, allant aussi vers des responsables en relations publiques, qui dépendaient hiérarchiquement des ‘markcom’. Aujour­d’hui, on a en face de nous des community managers… Les clients ont évolué, continuent à le faire, et exigent de notre part que l’on suive, voire que l’on anticipe, cette évolution.
Enfin, l’internationalisation contribue également à rendre notre métier plus complexe. Avant, nous avions une grande majorité de clients luxembourgeois ; maintenant, on se retrouve à travailler avec des interlocuteurs étrangers issus de divers horizons.
Ajoutez à cela la crise – qui n’est pas finie ! Il est évident que notre métier n’est en rien figé !
 

L’avenir appartient donc aux agences les plus audacieuses ?

« Oui, en un sens. Les agences doivent s’adapter, anticiper ces évolutions de fond. Leur avenir est tributaire de cette complexité. Mais cette dernière rend notre métier plus passionnant encore pour qui garde comme credo la créativité comme moteur de toute stratégie.

À regarder notre clientèle, j’ai le sentiment que les budgets ont tendance non pas tant à diminuer – même si tel semble être le cas pour cette année 2012 –, mais à se déplacer et à se fractionner. La communication interne est un exemple parlant. Internet a suscité de nouveaux besoins : les gens veulent tout savoir tout de suite. Et au sein d’une entreprise où chaque collaborateur veut être informé, la communication interne prend ainsi une nouvelle orientation, plus exigeante et plus détaillée. La stratégie de communication s’en trouve profondément impactée. Cette tendance va s’amplifier à moyen terme, je pense.


Tout comme vos besoins en compétences en interne ?

« Oui, le métier s’est diversifié et il nous faut donc des professionnels qui peuvent répondre aux besoins toujours plus pointus de nos clients, des collaborateurs ayant un haut degré d’expertise dans un domaine précis. Par exemple, nous avons embauché dernièrement une personne spécialisée en médias sociaux. Elle ne travaille que dans cette branche, qu’elle maîtrise donc parfaitement.
 

Si vous aviez tout pouvoir, quel aspect souhaiteriez-vous améliorer ?

« Sans hésitation : le respect de la créativité. Celle-ci est en effet à la base de toute stratégie de communication, aussi faut-il que l’on nous laisse le temps de l’exprimer au mieux. Nous répondons souvent à des appels d’offres, tout comme d’autres agences. Ces formes de concours non rémunérés ont bien trop souvent une date butoir trop proche, qui ne laisse pas le temps à l’imagination de donner sa pleine mesure. En outre, certains de ces appels d’offres ne respectent plus les droits d’utilisation de notre travail. Le respect de notre métier et de la créativité s’en trouve, hélas, trop souvent bafoué. »

 

Claude Sauber
- 49 ans
- Associé-directeur de Binsfeld corporate, qu’il intègre en 1994