Paperjam.lu

 

Seuls les néophytes en matière d'Internet risquent de ne pas encore le savoir: l'offre d'emploi publiée sur le web est instantanément visible du monde entier, ce qui permet à l'intéressé(e) de postuler dans l'immédiat et au recruteur de faire publier sans tarder. Sans compter les autres avantages que vient de créer dans un laps de temps relativement court ce nouveau média électronique incontournable. Il est donc à supposer qu'à plus ou moins longue échéance, les modes de recrutement classiques risquent de disparaître. En toute logique, le processus d'élimination aurait donc déjà du démarrer. Or, en sondant le terrain, on peut constater que tel n'est pas encore le cas. Au contraire, au sein de l'empire de la presse tout va encore pour le mieux, car les revenus provenant du marché de l'emploi ne semblent pas régresser. L'occasion rêvée pour survoler le royaume du recrutement, et essayer de comprendre pourquoi le marché se développe de façon plutôt optimiste. En passant, bien entendu, par l'administration concernée (l'ADEM), qui a elle aussi quelques raisons de s'auto-complimenter, étant donné que le taux de chômage du Luxembourg, qui était déjà le plus faible d'Europe, a tendance à continuer sa lente mais prometteuse régression. 

Par voie de presse (écrite)

De tout temps, les recruteurs luxembourgeois ont eu un net avantage sur leurs homologues étrangers dès qu'il s'agissait de publier les postes devenus libres au sein de leurs sociétés respectives. Vu la situation monopolistique du plus important quotidien luxembourgeois, faire un plan média ne s'imposait que pour les insertions purement publicitaires, les offres d'emploi ne nécessitant qu'une parution ponctuelle dans un seul support. Le Luxemburger Wort était, et reste à ce niveau, le journal incontournable. Dans toutes les autres publications généralistes, les offres d'emploi apparaissent de façon aussi épisodique que clairsemée. De ce fait, quiconque désirant changer d'emploi continuera au moins à acheter l'édition "Wort" du samedi, même si le quotidien ne lui convient aucunement du point de vue idéologique.

L'explosion des sites «net» consacrés au secteur des Ressources Humaines étant, comme nous allons le voir plus loin, pourtant tout aussi considérable au Grand-Duché que dans les pays voisins, une diminution du volume d'offres paraissant dans le Luxemburger Wort serait par conséquent imaginable et envisageable. Or, il suffit de jeter un regard lointain sur l'édition du samedi (jour "J" du marché de l'offre), pour se rendre compte qu'elle pèse plus lourd qu'avant. Depuis 1992, le volume des offres d'emploi a augmenté en moyenne de 50 unités à trois cents, et elle continue de rester en hausse permanente suivant confirmation de M. Stoehr, directeur commercial de la Régie St Paul. Ce qui fait gonfler son volume encore plus sensiblement vient du fait que, confrontées à une concurrence plus ardue dans différents secteurs, les sociétés les plus importantes en ont profité pour insérer leurs offres dans des campagnes institutionnelles remplissant des demi pages ou même des pages entières par annonce individuelle. On peut en déduire qu'Internet n'est encore pour le moment qu'un outil d'embauche accessoire. Cela pouvant changer, la direction du "Luxemburger Wort" n'a pas attendu de se voir déclassée par la concurrence numérique, et n'a pas hésité à offrir une insertion complémentaire sur son site de recrutement à tout annonceur de la version "print". Tout cela en attendant que les ménages luxembourgeois soient encore mieux équipés en matériel informatique et se soient plus familiarisés avec un média qui reste encore un support plutôt élitiste pour cadres supérieurs.

Cette situation pourrait changer assez vite. D'une part, le Luxembourg compte d'ores et déjà parmi les pays les mieux équipés d'Europe en matériel informatique par habitant, d'autre part, le développement de la structure du e-Luxembourg peut très bien permettre au Grand-Duché de rapidement se démarquer. On peut penser en effet que le Grand-Duché puisse passer à la vitesse supérieure grâce à une efficacité exemplaire et à une situation économique exceptionnelle: une forte concentration de bureaux à équipement sophistiqué, un niveau de vie plus élevé, une volonté politique encore récemment confirmée.

Depuis quelques semaines, un hebdomadaire tente de faire aussi fort que les pages recrutement du Wort, en se consacrant exclusivement aux Ressources Humaines. "Jobs", le nouveau journal de Pol Wirtz & Partners, société que l'on peut retrouver au rayon du "headhunting" (chasse de têtes), semble décidé à attaquer surtout les étages de direction, et cela particulièrement dans les secteurs du management, de la finance, de l'audit et des NTIC (Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication).

Enfin, en ce qui concerne la presse parlée ou l'audiovisuel en général, les quelques rares tentatives qui y ont été lancées ne font pas vraiment légion, celle de la société H&M (campagne internationale) sur les écrans cinéma faisant vraiment preuve d'un certain exotisme. Vu le coût de production élevé de pareilles campagnes, il n'est pas envisageable, dans un avenir proche ou lointain, de voir le recrutement se faire sous forme de clip.

Par voie publique (l'ADEM)

Le moyen de recrutement le plus classique car (institutionnalisé) mais pas forcément le plus usité, passe par l'administration centrale qui lui est dédiée. L'Administration de l'Emploi fait fonction de compteur dans le monde du travail, car en principe tous les recruteurs sont tenus d'y déclarer chaque nouvel emploi créé dans leur société. Comme tel n'est néanmoins pas toujours le cas, vu qu'un poste créé un mardi soir peut en théorie déjà être occupé le mercredi matin, les chiffres et statistiques émanant de l'offre et de la demande sont donc à considérer sans garantie totale. Le pourcentage de non-déclaration ne devrait toutefois pas être d'une importance telle qu'elle puisse influencer sensiblement le total réel. Ce qui semble certain, c'est qu'en 1999 par exemple, quelques 1.625 offres ont été déclarées mensuellement à l'ADEM par 730 entreprises différentes, ce qui nous conduit à une moyenne de vingt mille emplois créés sur l'année. Au cours des trois dernières années, le nombre d'entreprises aussi bien que celui de leurs offres d'emplois seraient en légère progression constante, suivant déclaration de Jean Hoffmann, conseiller économique auprès de l'ADEM. Au niveau des succès d'une administration qui reste toujours dans le collimateur de l'intérêt général et surtout de la presse, on pourrait compter, suivant M. Hoffmann, le système des assignations, cette soi-disant "tentative de mariage" entre les recruteurs et les demandeurs d'emploi répertoriés. Quelques 4.300 contacts sont ainsi créés mensuellement, dont au moins un sur quatre se solde par la positive, donc par une embauche. Il faut bien dire que ces 25% de succès constituent une estimation basse, provenant de confirmations d'entrepreneurs ou employés ayant déclaré le succès de l'opération auprès de l'administration. Une grande partie, sinon éventuellement même une majorité des concernés ne donnant pas ou plus de feedback après l'assignation, le nombre réel de "happy ends" pourrait se situer largement au-dessus de ce succès déclaré. Par ailleurs, des ateliers de formation sont organisés régulièrement sous le toit de l'ADEM avec le support de grandes sociétés désireuses de procéder à des engagements en série, voire en masses. En général, ces ateliers prennent fin avec un degré d'embauche sur place supérieur à 50%, et allant selon les cas, jusqu'à 100%. Dans le domaine social, il est aussi intéressant de noter que l'administration emploie toute une série de psychologues et d'éducateurs gradués, qui s'occupent aussi bien de l'orientation de certains demandeurs, que de la réintégration, voire de l'étude de comportement visant à expliquer et à redresser la situation de chômage.

Par Internet

Plus de 11.000 sites d'emploi ont été répertoriés à travers le monde, et aux USA on estime que plus de 50% du marché de l'emploi est sur le web. Une bonne dizaine de sites de recrutement ont vu le jour en un rien de temps au Grand-Duché, avec des concepts et des degrés de succès variables. Mais lorsque l'on les considère dans leur globalité, il faut avouer qu'une nouvelle forme de marché s'est définitivement imposée. Les raisons en sont simples: la publication par Internet crée des avantages considérables aussi bien pour l'annonceur que pour les candidats en ligne. Pour les premiers, le champ d'action s'élargit considérablement, car la visibilité de leurs annonces ne connaît plus de frontières géographiques, d'autant plus que leur parution n'est plus limitée dans le temps, une annonce restant affichée en moyenne, et suivant nécessité, jusqu'à six mois sur le site, et cela vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Sans parler des coûts de diffusion qui sont largement réduits par rapport à l'insertion presse.

Quant aux candidats, ils ont dorénavant la possibilité de déposer leur CV sur le site choisi, et de faire ainsi partie d'une base de données qui augmentera sensiblement leurs chances d'entretien, vu le fait qu'un seul dépôt de demande pourra être retenu par un nombre X de recruteurs intéressés par le profil d'un seul candidat. En s'abonnant, le candidat peut aussi recevoir régulièrement des offres.

Par la publication Internet des offres d'emploi, l'offre et la demande créent ainsi un nouveau dénominateur commun, qui devient multiplicateur à durée indéterminée pour les deux parties. Cette multitude de nouvelles chances crée aussi, bien entendu, certains désavantages, comme celui de la confidentialité qui est loin d'être garantie aux postulants. En effet, s'il se trouve que l'employé d'une société qui dépose son CV sur un site précis, risque par ce biais de le soumettre à son employeur actuel, si celui-ci est client auprès de la même société. Il est donc recommandé à chaque personne s'inscrivant auprès d'une "job company" de bien réfléchir au préalable à ce que son action pourrait engendrer, et de sélectionner scrupuleusement la société à laquelle il fera confiance.

Avant de jeter un ?il sur le fonctionnement des sites luxembourgeois les plus populaires, signalons encore une autre forme de recrutement sur le net, en l'occurrence celle qui se fait directement sur le site de l'employeur.

En effet, les grandes sociétés ont de plus en plus tendance à créer leur propre page de recrutement et à utiliser celle-ci à des fins bien plus subtiles que celles d'un seul appel d'offres en ligne, leur site leur permettant de façon encore plus ciblée d'insérer des campagnes institutionnelles dont les messages peuvent être retravaillés au jour le jour.

Pour en revenir aux sites de recrutement proprement dits, en voici les plus représentatifs:

carrieres.lu

Présenté dans notre dernière édition, ce nouveau site a été créé pour remplacer jobs.tageblatt.lu. Quelques 15 pages avec 150 offres d'emploi y étaient publiées, tous secteurs confondus, lors de notre dernière visite en fin d'année. Il est possible d'y laisser con CV, à disposition de la clientèle des annonceurs.

e-job.lu

Le site officiel de l'agence de recrutement Adecco compte certainement parmi les leaders du marché. À l'heure où nous avons visité le site, quelques 70 entreprises proposaient plus de 400 postes différents. Le demandeur peut y sélectionner suivant différents critères: par secteur (audit, banque, chimie, loisirs?), par filière (admin., inform., juridique, secrétariat), par métier, ou directement par ordre alphabétique des entreprises. Une calculatrice fiscale est mise à disposition, afin que le candidat, en cas d'indication de salaire brut pour un poste précis, soit à même de calculer son net.

Le dépôt d'un CV spontané sera à disposition de la clientèle (c'est-à-dire des annonceurs) intéressée.

emploi.lu

L'accès local au site Emailjob.com (ou www.optioncarrière.com) ne conduit qu'à une grande majorité d'offres d'emploi à l'étranger. Intéressant pour tous ceux qui désirent s'exiler.

etat.lu/ADEM

Le site de l'Administration de l'Emploi. Basique, mais indique tout du moins tous les nouveaux emplois déclarés à l'Administration. S'adresse donc principalement aux demandeurs d'emploi.

futurestep.lu

Ce qui fut l'agence P.A. Consulting dès sa création en 1986 a été racheté fin janvier 2000 par futurestep, un des leaders mondiaux du recrutement. Cette société se distingue des autres par leur façon d'agir. Privilégiant la discrétion la plus totale, elle se met entièrement au service du demandeur. Et ne publiera rien d'officiel sur le site. Après avoir défini le profil du demandeur, celui-ci reçoit les offres des clients potentiels. Le contraire n'est pas le cas, ce qui évite des surprises désagréables aux candidats. Selon le Directeur local, Ole Roed, la branche luxembourgeoise, qui se distingue par le recrutement, la consultance, et la gestion de carrière, se trouve trop jeune pour divulguer des premiers chiffres. Au niveau international. Futurestep est fière de pouvoir avancer le chiffre de 900.000 inscriptions complètes.

jobs.lu

Le site relié à l'hebdomadaire du même nom. Ce site vient de démarrer, mais avait, lors de notre visite, déjà quelques 242 offres en ligne, couvrant les besoins d'une cinquantaine d'entreprises.

jobsearch.lu

Les annonces du Luxemburger Wort, et plus particulièrement celles que l'on retrouve dans l'édition du samedi, puisqu'il s'agit là de la journée de l'offre d'emploi par excellence. Les 1.013 offres que nous y avons trouvées en fin d'année sont répertoriées par secteur et par date.

luxjob.lu

Incontestablement en tête du hit-parade, LuxJob se réjouit d'une belle popularité. Plus de 1.200 annonces sur le site en fin d'année 2000, sur les 6.000 annonces qui ont été éditées en tout. Quelques 210 employeurs peuvent se réjouir momentanément de 700.000 hits par mois, et l'équipe autour de Marc Neuen s'est vue confier plus de 3.200 CV valables, tous secteurs et toutes régions confondues. Sous la rubrique des "Spéciaux", on retrouve des liens intéressants ainsi que les logos de sociétés partenaires annonçant "en direct". Ou encore des témoignages de clients qui ne manquent pas de superlatifs: "publication pres-que immédiatement présente sur le site? moteur de re-cherche très performant?. pas de souci de format? maximum de services au coût minimum'. Bien entendu, la brochette d'éloges ne mentionne pas si ces annonceurs bénéficient ou non d'une commission pour ce genre de publicité.

stepstone.lu

Toute nouvelle sur le marché national, cette société renvoie dans un premier temps les intéressé(e)s sur son site belge dont les petites pierres qui bougent révèlent un certain dynamisme. Malheureusement, si on y apprend que sur 131.585 opportunités de travail proposées à travers toute l'Europe, il y en a 9.690 rien que pour le marché belgo-luxembourgeois, on n'y apprend à aucun moment comment se subdivise ce marché entre les deux voisins liés pour une dernière année à une union monétaire bilatérale. Rendez-vous dans quelques mois, car d'ici là, les choses se seront certainement précisées.

Par "headhunting"

La "chasse de tête" est un domaine bien à part au Luxembourg, et si celui-ci reste plus discret dans l'annonce de ses exploits, cela est parfaitement compréhensible en conséquence d'un marché très restreint et sur lequel la confidentialité a du mal à s'imposer. Quelques spécialistes du headhunting local ne sont donc pas forcément actifs que sur ce terrain, mais touchent bien souvent à d'autres domaines comme la consultance ou, plus loin encore, l'audit en entreprise. Aussi, suivant sondage auprès des acteurs sur le terrain, les gros profils feraient surtout l'exclusivité des sociétés spécialisées à l'étranger, le "chasseur" national se consacrant surtout aux cadres de profil moyen ou au management des grandes sociétés. Certains headhunters n'hésiteraient pas non plus, dès lors qu'ils ont du mal à recruter l'élément recherché, à procéder, avec l'accord du client, à la recherche classique par voie d'annonce. En ce qui concerne les secteurs couverts, des sociétés comme Schneider Consulting ou Capital Recruitment avouent que parmi les secteurs traqués, la banque domine encore de loin sur les secteurs IT ou Télécoms. Ceux-ci se devraient d'être en nette progression ponctuelle, mais on trouverait encore trop peu de "têtes à chasser" au niveau national dans ces secteurs, les spécialistes du genre se faisant aussi rares ici qu'à l'étranger. Selon le Manager de Daniel Reinert Consulting, le travail fait au Luxembourg, où M. Reinert exerce depuis trois ans, se fait totalement sur mesure. Il y a très peu de missions, et le recruteur a intérêt à faire partie d'un réseau international bien organisé. Daniel Reinert est ainsi le représentant pour le Grand-Duché du réseau international AIMS, qui regroupe 44 pays et se situe en 5e position mondiale en matière de headhunting. Son secteur privilégié est celui de l'industrie et du high-tech", et lui aussi avoue que la demande locale est bien supérieure à l'offre de compétences, c'est-à-dire que le nombre de pos-tes à pourvoir sur tout le territoire national, est bien plus grand que le nombre de candidatures.

Bien entendu, son réseau in-ternational lui permet aussi de chasser le spécialiste luxembourgeois pour le placer, le cas échéant, à l'étran- ger et vice-versa.

En ce qui con-cerne la sélection, donc le choix individuel du candidat à retenir, à défen-dre, voire à vouloir imposer, elle fera partie du chapitre suivant