Didier Mouget a rappelé que les services prodigués par PwC sont conformes aux règles nationales...et internationales. (Photo: Charles Caratini / archives)

Didier Mouget a rappelé que les services prodigués par PwC sont conformes aux règles nationales...et internationales. (Photo: Charles Caratini / archives)

«On va essayer d'être aussi transparent que possible», a déclaré Didier Mouget jeudi lors d'une conférence de presse convoquée en urgence après les révélations sur LuxLeaks, portant sur les accords fiscaux entre l'Administration des contributions et des grandes firmes soucieuses de minimiser leurs impôts à travers du shopping fiscal, notamment au Luxembourg.

Le managing partner de PwC qui était aux côtés de Wim Piot, associé en charge des services fiscaux, place cette affaire comme «une campagne massive qui vise essentiellement le Luxembourg et certaines activités qui y sont conduites». La firme d'audit, qui a réalisé la plupart des montages épinglés dans LuxLeaks, souffrirait ainsi moins de l'acharnement des médias étrangers de cette action concertée et «commerciale», selon Didier Mouget, mené sous la houlette du consortium de journalistes ICIJ.org

Pour autant, les centaines d'accords fiscaux qui ont fait l'objet de fuite dans les médias proviennent pour l'essentiel de PwC Luxembourg, victime d'un vol de documents en septembre 2010. Évoquant le secret de l'instruction (l'enquête est toujours en cours deux ans après le dépôt de la plainte), Didier Mouget n'est pas rentré dans le détail sur le comment de la fuite d'informations qui a fait l'objet d'une plainte contre X, déposée par PWC au Parquet de Luxembourg en mai 2012, après que des investigations internes aient permis d'identifier celui ou ceux qui en sont à l'origine.

Selon les indications du dirigeant, personne n'a été puni. Parmi les hypothèses retenues, il pourrait donc s'agir d'un ex-employé de la firme, qui aurait quitté PwC avant de transmettre les informations aux médias (notamment à des journalistes de France 2 et de la BBC) en 2012, soit deux ans apres la fraude commise en 2010.

«Une très grande partie, mais pas uniquement, des documents est basée sur des documents de PwC qui ont été obtenus de manière illégale», a fait savoir Didier Mouget en précisant que ceux qui les détenaient en faisaient du recel, ce qui relevait du droit pénal. Les dirigeants de PwC ont par ailleurs assuré que les conseils qu'ils ont été fournis aux groupes multinationaux étaient restés dans les clous de la légalité: «On conseille les clients sur la meilleure manière de gérer leurs obligations fiscales (...) et comment les groupes peuvent au mieux organiser la structuration de leurs activités de la manière la moins fiscalement coûteuse», a déclaré Didier Mouget. «Nous le faisons, a-t-il précisé, dans le respect absolu des réglementations fiscales locales et internationales».

Beaucoup de choses ont changé

«Nous n'avons jamais donné de conseil aux clients qui n'étaient pas en conformité avec leurs obligations légales», a-t-il ajouté en justifiant le fait que, face à la crise qui a rogné leurs revenus, les multinationales utilisent le Luxembourg pour y organiser certaines de leurs activités et payer moins d'impôt grâce, entre autres, au réseau très bien construit et efficace» de conventions fiscales bilatérales signées par le Grand-Duché «pour éviter de payer deux fois, voire trois fois l'impôt». «C'est une obligation que ces gens ont vis-à-vis de leurs actionnaires et même vis-à-vis de leurs employés, notamment pour une question de bonus, ainsi qu'à l'ensemble des stakeholders pour préserver les emplois et la capacité d'investir, notamment dans la recherche», a encore dit le patron de PwC. 

Les dirigeants de PwC ne se sont pas dits «surpris» par les LuxLeaks dont ils avaient eu connaissance depuis plus d'un mois. Didier Mouget et Wim Piot ont d'ailleurs assuré en avoir informé les autorités luxembourgeoises à l'avance. PwC veut relativiser l'impact de cette campagne en indiquant que les informations portent sur des accords fiscaux relativement anciens (les plus récents remontent à septembre 2010) et sur des pratiques qui n'ont plus cours désormais, puisque dans l'intervalle, des circulaires de l'Administration des contributions directes ont permis de mieux cadrer les rulings ainsi que les prix de transferts d'une entreprise à l'autre. 

«Depuis ces années-là, beaucoup de choses se sont passées dans le monde et au Luxembourg», a assuré Didier Mouget en citant les initiatives Beps pour lutter contre l'érosion de la base fiscale des multinationales.

Pas des transactions honteuses

Du coup, les analyses qui ont été faites par les médias internationaux s'appuient, à ses yeux, «sur des informations qui sont aujourd'hui dépassées ou en tout cas qui ne sont plus relevantes». De plus, a soutenu le managing partner, la plupart des transactions révélées par LuxLeaks «sont des transactions qui relèvent à Luxembourg du domaine public, car ces transactions sont décrites dans les comptes annuels des entreprises». Il suffirait donc d'acheter les bilans au registre de commerce et des sociétés pour avoir connaissance des contenus des rulings.

Didier Mouget s'est quand même montré nuancé: «la nature des documents est confidentielle, mais il ne s'agit pas de transactions honteuses». Pour lui, la solution aux problèmes des rentrées fiscales moindres dans les caisses des États n'est pas à chercher en «agressant des pays comme le Luxembourg»: «Il ne faut pas penser que c'est en agressant un pays comme le Luxembourg que l'on va résoudre le problème, car il s'agit d'un problème mondial. Je ne connais aucune société multinationale au monde qui va prendre la voie la plus taxée», donc avec le moins de «frottements fiscaux» pour organiser ses activités. Pour autant, le managing partner de PwC a dit comprendre l'émotion que les révélations du LuxLeaks avaient suscitée.