Le tribunal est régulièrement amené à condamner des usagers de Facebook postant des messages à caractère haineux. (Photo: Licence C.C.)

Le tribunal est régulièrement amené à condamner des usagers de Facebook postant des messages à caractère haineux. (Photo: Licence C.C.)

Les juges de la 16e chambre du tribunal d’arrondissement de Luxembourg ont suivi les réquisitions du procureur d’État en prononçant mardi une peine de neuf mois d’emprisonnement assortie du sursis intégral au vu du casier judiciaire vierge du prévenu.

Claude E., 47 ans, était accusé d’avoir posté des messages et des images à connotation raciste et xénophobe sur deux comptes Facebook, le premier à son nom et le second intitulé «George Nicolay».

C’est par une dénonciation, le 17 décembre 2015, que la police grand-ducale a été avertie de la présence de contenu pouvant inciter à la haine sur le profil Facebook «Claude E.». Lors de son investigation, elle a notamment relevé le message suivant: «Voulez-vous que je vous dise quelque chose? Je hais cette vermine de demandeurs d’asile et d’étrangers. À quand la révolution? J’espère que Marine Le Pen et l’AFD récolteront assez de voix pour au moins nettoyer la France et l’Allemagne.»

Chaque foyer de réfugiés est un crime contre nos sans-abri.

Propos relayé par Claude E. sur son compte Facebook

Elle a également trouvé, rapporte le rappel des faits dans le jugement, la «parodie d’une publicité pour le détaillant ‘Edeka’ offrant à la vente une batte de baseball confectionnée en chêne d’origine allemande garantie, dans le cadre des semaines racistes, vantant les mérites de l’objet en tant que formateur d’opinion, pour un prix de 29€, en se servant du double sens du mot allemand ‘zuschlagen’ exhortant par la formule ‘jetzt zuschlagen’ le lecteur aussi bien ‘à saisir une affaire’ qu’à ‘frapper sur ceux dont l’opinion doit être formée’, destinée clairement à inciter à la violence contre les étrangers».

Claude E. avait encore posté une image intitulée «jedes Flüchtlingsheim ist ein Verbrechen gegenüber unseren Obdachlosen» (chaque foyer de réfugiés est un crime contre nos sans-abri), destinée à inciter à la haine à l’égard des demandeurs d’asile en insinuant que leur prise en charge se ferait au détriment des sans-abri sur place.

Une juxtaposition de photographies montrait aussi «une femme en tenue de combat avec un fusil, sous-titrée ‘Les femmes combattent pour leur liberté et leur patrie’, et l’autre un rassemblement d’hommes en civil, sous-titrée ‘Les hommes syriens combattent en Europe pour un nouvel iPhone’».

Le prévenu exprime un sentiment de haine à l’encontre des réfugiés, des demandeurs d’asile et des personnes d’origine étrangère.

Le tribunal dans son jugement

Une autre dénonciation était intervenue en février 2016, cette fois concernant le compte «George Nicolay», qui est plus tard apparu comme appartenant aussi à Claude E. Celui-ci y avait posté «diverses photographies documentant sa sympathie pour le Troisième Reich, régime ayant propagé la haine et la violence contre une communauté de personnes en raison notamment de leur appartenance à une religion déterminée, de leur handicap et de leur origine, faisant sienne cette idéologie, et incitant à son tour à la haine et à la violence contre un groupe de personnes en raison de leur origine, notamment par la photographie montrant une assemblée religieuse en train de prier, titrée «Oktoberfest 2025», insinuant que les rites musulmans supplanteront les coutumes bavaroises d’ici 2025, insérée dans une fenêtre intitulée «Wir werden es verhindern» (nous allons empêcher cela), ensemble avec le portrait d’un officier de la SS.

Le compte arborait encore une photo d’Adolf Hitler exécutant le salut nazi et la photo d’une façade de maison portant l’inscription «Es lebe der Führer! Es lebe Deutschland» (vive le Führer! vive l’Allemagne).

Une litanie de messages et images qui a amené Claude E. à comparaître devant le tribunal d’arrondissement de Luxembourg pour incitation à la haine, d’une part, et contestation, minimisation, justification ou négation de crimes contre l’humanité, crimes de guerre et génocides, d’autre part.

Dans son jugement, le tribunal considère que «par le choix de ses mots et des images publiées sur le profil ‘Claude E’, le prévenu exprime un sentiment de haine à l’encontre des réfugiés, des demandeurs d’asile et des personnes d’origine étrangère. S’agissant de l’image du détaillant Edeka, on peut en déduire un sentiment d’aversion à l’encontre de personnes d’origine étrangère. Il en est de même pour les autres images publiées où le prévenu montre un sentiment d’aversion à l’encontre des réfugiés et de l’islam.»

Des condamnations régulières

Les juges soulignent qu’«une partie des images et commentaires réprimés sont toujours publiés et accessibles au public au jour des plaidoiries», alors que le prévenu avait reçu sa citation en juillet dernier. «Il n’a fait preuve d’aucun repentir sincère de sorte que le tribunal estime que les faits sont adéquatement sanctionnés par une peine d’emprisonnement de 9 mois», poursuit le jugement.

Le prévenu a toutefois obtenu le bénéfice du sursis «avec la condition de supprimer les images et commentaires prohibés par la loi, publiés sur les profils Facebook ‘Claude E.’ et ‘George Nicolay’ dans un délai d’un mois à compter du prononcé du présent jugement». Un sursis probatoire de cinq ans a également été prononcé.

Le tribunal prononce régulièrement des condamnations pour injures à caractère racial. La dernière en date concernant les réfugiés concerne le récidiviste Pierre Peters.Trois personnes avaient également été condamnées il y a un an pour des publications haineuses sur les réseaux sociaux.