Luc Frieden, ministre des Finances, a semblé à court d’arguments face à la journaliste de France 2. (Photo : David Laurent/wide/archives)

Luc Frieden, ministre des Finances, a semblé à court d’arguments face à la journaliste de France 2. (Photo : David Laurent/wide/archives)

La place financière semble avoir choisi d’adopter un profil bas suite à l’enquête diffusée vendredi soir dans l’émission Cash investigation de France 2.

L’équipe d’Elise Lucet y a tenté de dénoncer les pratiques d’évasion de certaines multinationales (Wendel, Pearson, GSK…), qui, en domiciliant des sociétés dépourvues de substance au Grand-Duché, réduisent leurs factures fiscales et privent certains grands États (France, Grande-Bretagne...) de précieuses recettes à l’heure des restrictions budgétaires. Recettes fiscales qui, a conclu le reportage, servent pourtant à bâtir des écoles, à construire des routes et à payer des fonctionnaires…

On est pour l’instant très loin des violentes réactions qui avaient suivi un reportage diffusé en 2008, déjà sur France 2, qui accusait le Luxembourg de favoriser le blanchiment d’argent.

Grulms se désiste

Aucune réplique officielle n’était encore disponible ce lundi de la part des responsables de la Place. Fernand Grulms, qui devait répondre aux questions de paperJam.TV et avait dans un premier temps accepté l'invitation, s'est finalement désisté. Explications du CEO de Luxembourg For Finance : la réunion qui devait avoir lieu ce lundi matin pour définir une position officielle n’a finalement pas eu lieu.

Il faut également dire que Luc Frieden ne s’est guère montré à son avantage au cours de l’interview de France 2. À court d’arguments, le ministre des Finances n’est pas parvenu à reprendre la main face à la journaliste.

Mis en cause, PwC s’est pour sa part contenté de répéter sa communication de vendredi : « Les services de conseils fiscaux délivrés à nos clients, ainsi que les activités qu'ils conduisent au Luxembourg, en accord avec ces services, respectent scrupuleusement, et sans exception aucune, les lois et réglementations luxembourgeoises, les normes et traités internationaux ainsi que les codes d'éthique auxquels nous sommes soumis. Au stade actuel, aucun élément ne permet de dire que les quelques documents montrés dans le reportage ont été obtenus auprès de PwC, ce qui, si c'était le cas, constituerait une infraction pénale. »

47.000 pages

France 2 s’était procuré un document de travail de quelque 47.000 pages, émanant du cabinet, qui détaille les montages fiscaux proposés aux entreprises.

Trois jours après la diffusion du reportage, les acteurs semblent donc surtout mettre en avant le caractère légal des pratiques, dont Luc Frieden a semblé reconnaître lui-même qu’elles étaient moralement contestables.

C’est également ce que souligne Arnaud Sagnard, avocat fiscaliste. « Ces pratiques sont tout à fait légales. Les entreprises n’ont jamais bénéficié d’accords contraires à la loi fiscale luxembourgeoise. » Selon l’expert, le montant des facturations entre filiales d’un même groupe n’a simplement jamais été défini au Luxembourg par une politique précise de prix de transferts.

Pour Arnaud Sagnard, l’administration fiscale, accusée à tort, n’est d’ailleurs pas à l'origine de ces 'rescrits', ces accords préalables dont bénéficient les entreprises. « La notion de ruling a été en fait dévoyée. Ces pratiques ont été mises en place par les cabinets d’audit et d'avocats en échange d’importants honoraires. »